La maladie touche tous les êtres humains d’une manière ou d’une autre, qu’il s’agisse d’une simple grippe, d’une affection douloureuse chronique, d’un handicap ou d’une maladie mortelle.
Parce que la lectrice et le lecteur, même s’ils n’ont pas eux-mêmes été gravement malades, peuvent se reconnaître dans l’idée des deux royaumes de Susan Sontag (le royaume des bien-portants et le royaume des malades), la maladie est un thème fréquent et puissant dans la littérature.
Lorsque nous sommes malades, nous avons le sentiment de ne plus faire partie de la société ; nous pouvons nous concentrer uniquement sur la maladie, la douleur et l’inconfort et, ce faisant, nous nous retirons de la vie pendant un moment.
Les malades sont sous ce sens des déviants ; ils ne sont pas normaux, c’est-à-dire hors des normes. La littérature a toujours utilisé la maladie pour mettre en évidence les écarts par rapport à cette normalité obligée, qu’ils soient positifs ou négatifs. La maladie est l’un de ces territoires inconnus devant lequel la personne malade est confuse et anxieuse, posant de nombreuses questions sans réponse sur la manière d’agir, sur ce qu’il faut dire et sur la durée du séjour dans ce territoire étranger. La maladie peut donc symboliser un voyage, même s’il est effrayant et désorientant.
Beth March
La maladie puis la mort de Beth March des Quatre filles du docteur March de Louisa May Alcott est un élément significatif du roman. La maladie et la mort de Beth contribuent au développement des autres personnages, en particulier de ses sœurs. Sa douceur, son altruisme et son stoïcisme face à la maladie ont un impact profond sur les membres de sa famille. Ses sœurs, en particulier Jo, apprennent de précieuses leçons sur l’amour, le sacrifice et l’importance de la famille grâce à leur expérience avec Beth.
La maladie et le décès de Beth favorisent l’évolution morale et émotionnelle des personnages, en particulier de Jo. Jo apprend à canaliser son chagrin dans des actions positives et cherche à réaliser les souhaits de Beth. Cette évolution est un élément essentiel de l’arc dramatique de ce personnage.
La maladie de Beth met en évidence le thème central de la famille et de la sororité dans le roman. Ses souffrances et sa mort finale rapprochent les sœurs March, qui la soutiennent et la soignent. Cela souligne l’idée que la famille est une source de force et d’amour dans les moments difficiles.
La description de la maladie et de la mort de Beth reflète les dures réalités de l’époque à laquelle se déroule l’histoire (l’arrière-plan décide des thèmes qui peuvent être abordés dans le récit sans que celui-ci paraisse anachronique). Ici, il s’agit d’un commentaire sur les options médicales limitées dont dispose la famille et sur l’impact de la maladie sur un foyer, en particulier lorsque les ressources financières manquent pour fournir des soins adéquats.
La mort de Beth oblige les personnages et la lectrice ou le lecteur à se confronter aux thèmes de la perte et du deuil. Son absence affecte profondément sa famille, et le roman explore la façon dont ils font face à sa mort et continuent néanmoins à vivre. Il met en évidence l’impact durable de la perte sur ceux qui restent. La personnalité de Beth et sa maladie contribuent à la profondeur émotionnelle et au caractère poignant du récit. Ses souffrances et sa mort finale suscitent la sympathie et l’empathie du lecteur/spectateur, faisant d’elle un personnage mémorable et aimé.
Colin Craven
La transformation de Colin Craven dans Le jardin secret de Frances Hodgson Burnett, lorsqu’il découvre le pouvoir de guérison de la nature, est porteuse de plusieurs niveaux de signification. Au début du récit, Colin est dépeint comme un enfant maladif et alité qui se croit gravement malade. Cependant, lorsqu’il passe du temps dans le jardin et s’expose au monde naturel, il commence à retrouver sa santé physique.
Sa transformation représente les propriétés de guérison autant physique que spirituel du monde naturel. Il s’agit d’un thème courant dans la littérature, où le monde naturel est dépeint comme une source de renouveau physique et de vitalité. Le périple de Colin symbolise une renaissance ou une seconde chance dans la vie. La transformation de Colin n’est pas seulement physique, mais aussi psychologique et émotionnelle. Son exposition au jardin et l’environnement stimulant fourni par Mary et Dickon ont entraîné un changement d’état d’esprit. D’un enfant craintif et s’apitoyant sur son sort, il devient un individu plus confiant et plus positif. Cela met en évidence les avantages thérapeutiques et psychologiques de la connexion avec la nature.
Son enfermement initial dans sa chambre et sa croyance en sa propre maladie représentent la stagnation et le désespoir. Lorsqu’il s’aventure dans le jardin, il se débarrasse de son cocon métaphorique et émerge en tant qu’individu plus fort et plus dynamique. Cela reflète l’idée de la capacité de la nature à apporter la renaissance et le renouveau. Le parcours de Colin peut être considéré comme une métaphore du développement personnel et de la découverte de soi. Grâce à ses interactions avec le jardin, il apprend l’autonomie, le pouvoir de la pensée positive et l’importance des liens affectifs avec les autres. L’évolution de son caractère illustre l’idée que la nature peut être un enseignement, guidant les individus vers l’épanouissement personnel et la maturité.
Ainsi, la transformation de Colin souligne l’idée que les humains sont intrinsèquement liés au monde naturel.
Tiny Tim Cratchit
Le personnage de Tiny Tim Cratchit dans Un chant de Noël de Charles Dickens et sa maladie invalidante sont des éléments cruciaux de l’histoire, servant de symboles de compassion et de charité. La fragilité et la maladie de Tiny Tim suscitent un fort sentiment de sympathie et de compassion tant chez le lecteur ou la lectrice que chez les personnages de l’histoire. Sa souffrance est un rappel brutal du sort des pauvres et des personnes vulnérables dans la société, en particulier à l’époque victorienne.
Par l’intermédiaire de Tiny Tim, Dickens attire efficacement l’attention sur la souffrance de ceux qui sont dans le besoin, encourageant le lecteur/spectateur et les personnages du récit à ressentir de l’empathie et de la compassion. L’état de Tiny Tim souligne l’urgence de la charité et de la générosité. Sa famille, en particulier son père Bob Cratchit, a du mal à joindre les deux bouts et, sans l’aide de leur riche employeur, Ebenezer Scrooge, leur vie serait encore plus difficile.
En décrivant les difficultés de la famille Cratchit et la vulnérabilité de Tiny Tim, Dickens souligne l’importance de la charité, en particulier pendant les fêtes de fin d’année (non seulement un arrière-plan spatial dépeint par l’époque victorienne et à l’intérieur de celles-ci dépassant l’époque elle-même l’arrière-plan temporel de Noël).
La condition de Tiny Tim joue un rôle essentiel dans la transformation d’Ebenezer Scrooge, le personnage principal de l’histoire. Scrooge, qui est au départ un personnage avare et insensible, subit un profond changement lorsqu’il est témoin de l’avenir possible de la mort de Tiny Tim. La compassion et la générosité retrouvées de Scrooge sont directement liées à son souci du bien-être de Tiny Tim. Le symbole de la maladie de Tiny Tim influence la rédemption de Scrooge.
Le message sur le véritable esprit de Noël est étroitement lié à Tiny Tim. Son innocence, sa vulnérabilité et l’amour qu’il reçoit de sa famille incarnent l’idéal de la famille, de l’unité et de la gentillesse prôné par Dickens.
La souffrance et la mort potentielles de Tiny Tim constituent un contraste frappant avec la joie, l’amour et la bonne volonté qui devraient être présents pendant Noël.
Frodon
La maladie de Frodon Sacquet dans son enfance, bien qu’elle ne soit pas au cœur de l’intrigue du Seigneur des Anneaux de J.R.R. Tolkien, donne de la profondeur à son personnage et rend plus convaincant son parcours héroïque ultérieur. La guérison de Frodon de sa maladie infantile met en évidence sa résilience et sa détermination. En surmontant un grave problème de santé à un jeune âge, il démontre sa force intérieure, qui devient un attribut crucial au cours de sa périlleuse quête pour détruire l’Anneau Unique.
La maladie précoce de Frodon et sa guérison confèrent à son personnage une qualité intrinsèque qui ne fait pas de lui un être héroïque par nature. Le lecteur et la lectrice ont tendance à s’attacher aux personnages qui ont fait face à l’adversité et l’ont surmontée. Le voyage de Frodon vers le Mordor, rendu plus difficile par le fardeau de l’Anneau, est d’autant plus inspirant qu’il a déjà lutté contre la maladie.
L’expérience de Frodon avec la maladie fait de lui un personnage facile d’accès. Le lecteur/spectateur peut éprouver de l’empathie envers ceux qui sont confrontés à la maladie, que ce soit personnellement ou par l’intermédiaire d’un proche, et cela peut créer un lien plus fort avec le personnage (ou la personne dans le monde réel).
L’humanité et la vulnérabilité de Frodon rendent son héroïsme ultérieur plus compréhensible et plus engageant.
Le contraste entre la maladie infantile de Frodon et sa quête extraordinaire pour détruire l’Anneau est frappant. Sa maladie de jeunesse semble insignifiante par rapport aux enjeux de vie et de mort de la quête, ce qui souligne l’ampleur de la tâche qu’il entreprend. Ce contraste accentue la tension dramatique de l’histoire.
La guérison de Frodon peut symboliser l’espoir et toutes nos potentialités de transformation. Elle renforce le thème selon lequel même ceux qui ont été confrontés à l’adversité peuvent relever de grands défis et faire la différence dans le monde. Son voyage devient un symbole d’espoir et de capacité de développement personnel et d’héroïsme chez tous les individus.
Anne Shirley
Anne Shirley est l’héroïne de Anne… La maison aux pignons verts de l’autrice Lucy Maud Montgomery. Anne a eu une enfance difficile et abusive, qui a affecté sa santé et son bien-être émotionnel. Lorsqu’elle est adoptée, elle commence à s’épanouir. Avant son adoption, Anne était une orpheline qui avait été ballottée d’un foyer à l’autre, souvent victime de négligence et de mauvais traitements. Le fait d’être adoptée par Marilla et Matthew Cuthbert lui a donné un sentiment d’appartenance et de stabilité qu’elle n’avait jamais connu.
L.M. Montgomery a insisté sur la nécessité d’appartenance pour le bien-être émotionnel et l’épanouissement personnel des enfants. Marilla et Matthew ont apporté à Anne un soutien émotionnel et un environnement affectueux. Ce soutien l’a aidée à guérir des cicatrices émotionnelles de son passé et à développer une meilleure estime de soi. Elle a appris qu’elle était appréciée et aimée, ce qui a eu un impact positif sur sa perception d’elle-même et sa capacité à faire confiance à autrui. Cela lui a également permis d’accéder à l’éducation, ce qui lui avait été refusé plus tôt dans sa vie. Sa curiosité intellectuelle et son amour de la connaissance se sont développés et elle a excellé dans les études, ce qui a eu un impact durable sur son avenir.
La maison aux pignons verts, figure récurrente tout au long de l’œuvre, offre à Anne un cadre naturel à la fois beau et stimulant. Cet environnement lui a permis d’établir un lien profond avec la nature et de développer un sens de l’émerveillement et de l’appréciation du monde qui l’entoure. Son amour de la nature est un thème central du roman.
L’adoption d’Anne lui a donné l’espace et la liberté nécessaires pour grandir en tant qu’individu. D’une enfant imaginative, passionnée et quelque peu impulsive, elle est devenue une jeune femme responsable, capable et attentionnée. Les conseils, la discipline et l’amour de Marilla et Matthew ont joué un rôle important dans cette transformation. Elle a noué des amitiés, développé un réseau social et appris l’importance des relations et de la communauté. Ces liens ont enrichi sa vie et lui ont apporté un soutien émotionnel.
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