Dans le précédent article GLENN GERS : UN AUTEUR AU TRAVAIL (1), Glenn Gers posa les bases de son scénario : idée, synopsis & personnages. Prenez le temps de préparer votre scénario. Lorsque vous ne parvenez plus à écrire, rangez votre plume dans son encrier, prenez quelques distances avec votre œuvre et revenez plus tard.
La préparation d’un récit passe par une phase de questionnement (ou brainstorming). Glenn Gers ressentit le besoin d’interroger ce qu’il avait écrit lors de l’article précédent. C’est tout à fait naturel de penser à son récit au cours d’autres activités car écrire est si personnel que cela ne nous lâche pas.
Le brainstorming
Un brainstorming est quelque chose de simple. Vous posez autant de questions qui vous viennent à l’esprit et vous répondez autant de réponses qui vous viennent à l’esprit.
Glenn Gers interroge ce qu’il a écrit :
Pourquoi ces personnages se sont-ils mobilisés dans la poursuite d’assassins qui échappe encore à la justice ? Dans quel but font-ils cela ?
Motif et intention permettent de mieux cerner nos personnages, de les comprendre.Le mot justice m’inspire un besoin de justice : un crime ne peut rester impuni ; il faut que justice soit faite. Pour cela, des gens de bonne volonté peuvent alors s’assembler pour punir ceux et celles dont le comportement déviant blesse ou tue autrui.
Je pourrai même introduire un thème religieux pour expliquer ce besoin.Et si leur intention est simplement de se divertir d’un quotidien ennuyeux ? Ce n’est pas futile que de chercher à se sentir exister et le quotidien qui nous contraint dans la norme, dans les habitudes est de plus en plus pesant au fil du temps.
Se donner un but quel qu’il soit est salvateur.Notre personnage principal, ce journaliste sans emploi, consacre t-il son temps libre à préparer un ouvrage sur les dangers du net ? Dénonçant les manœuvres qu’utilisent des individus sans scrupule pour attirer des innocents dans des pièges ?
Peut-être que l’un d’entre eux cache un secret encore plus terrible et se sentira menacé par l’enquête du journaliste (pensez à mettre à jour les fiches de vos personnages lorsque l’exercice de brainstorming apporte des informations nouvelles les concernant).
Nommer ses personnages
Donner un nom à vos personnages (même temporaire) peut aider à mieux les cerner dans vos réflexions.
A ce moment du travail, je n’ai que quelques esquisses de leur profil psychologique. Concernant mon personnage principal, j’ai fait quelques recherches sur le journalisme d’enquête. Je décide de donner à mon personnage principal le prénom Éric en référence à Eric Schlosser.
Maintenant, il y a cette jeune femme avec qui notre personnage principal partagera un amour réciproque. Précédemment, j’en avais fait une femme solitaire qui fuyait son ennui en s’inventant toute autre sur le net.
Ariane me semble lui convenir. Issu de la mythologie grecque, Ariane trouve refuge dans un monde imaginaire, entourée de créatures fictives. Vous le constatez, recherches & brainstorming sont deux des clefs d’un esprit créatif curieux. Ce serait peut-être ce personnage qui chercherait à tromper son ennui (option issu du précédent brainstorming). Il faudra apprendre à connaître davantage notre personnage Ariane. Pour l’instant, son image (psychologique) est encore assez nébuleuse. Prenez des notes lorsque des questions surviennent ainsi et relisez ces notes régulièrement.
Concernant le suspect, c’est-à-dire le personnage vers qui le véritable assassin a réussi à attirer tous les regards (ainsi que ceux du lecteur/spectateur puisque la forme pour le moment est de garder mystérieuse l’identité du tueur), Glenn Gers avait d’abord envisagé un homme. Maintenant, il a l’intuition qu’une femme serait plus appropriée. Elle serait une femme combative, impliquée socialement, intelligente. Je pense la prénommer Virginie en référence à Virginie Despentes dont le parcours me fascine.
Les autres personnages
Dans le précédent article, Glenn Gers souhaitait que la victime n’occupe pas la seule fonction de victime mais qu’elle possède quelque profondeur psychologique. Ainsi, il voit l’animateur comme un paranoïaque qui voit derrière chaque accident mortel mais totalement fortuit la présence d’une main assassine.
Gers insiste sur l’importance de donner au moindre personnage un véritable contour psychologique. Ainsi, lorsqu’ils apparaissent dans le récit, la première impression que l’on a deux devrait correspondre à leur personnalité.
Dans la didascalie qui précède leur introduction, décrivez vos personnages afin que lecteurs et lectrices saisissent en une ligne ou deux quelques traits constitutifs de leur existence. Par exemple,
KAT STRATFORD, dix-huit ans, jolie – mais s’efforçant de ne pas l’être – dans une robe de grand-mère ample et des lunettes, tient en équilibre une tasse de café et un sac à dos en sortant de sa Dodge Dart 75 bleu layette. [Dix Bonnes Raisons de te larguer]
UNE JEUNE CHASSEUSE se cache dans le feuillage au bord d’un étang. Elle est petite pour son âge, 19 ans et en paraît 16, mais elle possède déjà la concentration d’un adulte. [Northest Kingdom, un scénario écrit par Alex R. Johnson].
Vous pouvez aussi vous servir de leur entrée en scène comme celle de Jack Sparrow qui arrive au port dans une barque qui est en train de couler (Pirates des Caraïbes).
Quelle que soit la forme que vous souhaitez donner à cette première impression, considérez que vous ne dénigrez pas vos personnages en les affublant d’adjectifs durs (comme par exemple, tout en lui indiquait qu’il était un perdant né), vous ne faites que les décrire pour éclairer une personnalité qui justifiera leurs actes au cours de l’intrigue.
Où est la comédie ?
Glenn Gers s’est souvenu qu’il voulait écrire d’abord une comédie romantique. Or jusqu’à présent, il parle essentiellement de meurtres. La comédie peut s’emparer de thèmes sérieux et graves (M.A.S.H. Par exemple).
Il est donc venu le moment d’aborder les thèmes qui figureront dans votre récit, c’est-à-dire ce dont vous voulez vraiment parler parce que cela vous préoccupe. On ne parle jamais aussi bien des choses que l’on connaît que lorsqu’on les envisage sous leurs répercussions morales, politiques, sociales, religieuses ou tout autre portée philosophique ou non concernant notre condition humaine tant physique que métaphysique, notre devenir ou notre place dans le monde.
Glenn Gers s’oriente vers le sentiment que l’on doit agir dans un monde devenu fou. On peut se livrer à toutes sortes d’analyse face à cette assertion. Après tout, si le monde est à notre image, nous sommes tous responsables de ce qu’il est (du moins en apparence).
Que certains d’entre nous aient développé un sentiment de culpabilité et décident de corriger les fautes qui incombent à l’humanité toute entière est un choix personnel. Posant que ce qui se ressemble s’assemble, la constitution du groupe mû d’une même volonté rencontre une logique possible : ces individus aux personnalités fort différentes auront un but commun.
Une fiction est à la fois un moyen de divertissement qui permet aux lecteurs et lectrices de s’échapper de leur quotidien mais c’est aussi un message destiné à une prise de conscience. Auteurs et autrices aident à prendre conscience et à agir ; c’est leur message, c’est-à-dire les thèmes dont ils traitent dans leurs œuvres.
A l’image de l’engagement du personnage principal dans son aventure, l’auteur et l’autrice d’une fiction espère susciter autant l’engagement de leurs lecteurs et de leurs lectrices. Créer donne du sens, mais lecteurs et lectrices restent maîtres de leur jugement.
Glenn Gers a découvert aussi que le grand public avait une fascination pour les serial killers. Et comme cela l’étonne, il s’en interroge. Soyez toujours étonné de ce qu’il se passe autour de vous. Gardez un esprit critique en toutes circonstances. Questionnez vos préjugés.
Les histoires de serial killers ont toujours connu un succès. Comment cela est-il possible ? Dans la vie réelle, il y a des conditions certainement plus létales qu’une rencontre avec un tueur en série : un chauffard ivre, un cancer et même les inégalités sociales peuvent mener à la mort d’un être humain.
Cette idiosyncrasie collective, Glenn Gers envisage de la traduire chez l’un des membres du groupe dont l’esprit sera rempli de menaces non fondées de conspirations. Il pense en faire un stéréotype mais progressivement, il fera ressortir chez ce personnage une profondeur psychologique qui se manifestera de plus en plus car ce qui compte lorsque l’on donne vie à un personnage de fiction, c’est son humanité. Chaque personnage devrait posséder un esprit complexe.
L’usage d’un stéréotype dans ce cas est utile parce qu’il permet d’établir le rapport que ce personnage entretient avec les autres. Puis progressivement, il prendra des décisions et agira contre ce qu’on attend habituellement de ce stéréotype découvrant en lui des aspects cachés de sa personnalité qui changeront alors le regard que les autres personnages et le lecteur/spectateur portaient jusqu’à présent sur lui ou sur elle.
Définition d’une comédie romantique
Une comédie romantique conte l’histoire de deux êtres qui pensent ne jamais pouvoir former un couple. Ou du moins, l’histoire nous fait penser que ces deux êtres ne sont décidément pas faits pour être ensemble.
En conséquence, ils devront surmonter les obstacles qui les empêchent de se découvrir un amour réciproque. Nous pouvons nous poser la question dès maintenant sans pour autant en chercher la réponse : Quel est cet obstacle qui les prive encore d’un amour espéré ? Quel est le doute qui les enserre et les tient éloigné l’un de l’autre ?
Pourquoi ne pas chercher aussitôt des réponses aux questions qui nous viennent à l’esprit ? Parce que ces questions décideront de la destinée de votre scénario. Pour toutes les questions importantes comme celle qui entrave un amour dans une comédie romantique, il faut prendre le temps de la décision.
A ce moment du processus de création de votre œuvre, vous ne savez pas encore très bien où vous allez. Ne vous posez pas des limites trop tôt car autrement, elles deviendront des contraintes. Au contraire, cherchez dans les livres que vous avez lus ou les films que vous avez vus des situations ou bien des personnages même secondaires dont vous sentez intuitivement que vous pourriez vous en emparer pour développer un aspect que ces livres ou ces films ont à peine frôlés mais avec lesquels vous pourriez travailler votre propre récit.
Rassurez-vous, ce n’est pas du plagiat.
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