SECRET & PERSONNAGES

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On a tous quelque chose de secret en nous. On l’accepte assez facilement d’ailleurs. On se le dit à soi-même mais lorsqu’il s’agit de l’écrire, il est beaucoup plus difficile de l’admettre.

S’il est difficile de se confesser sur la page (trop effrayant, trop embarrassant, trop douloureux, trop dangereux, cela signifie que vous tenez là probablement une idée avec assez de consistance pour un récit, bien plus qu’une simple situation. La simple situation serait de retranscrire nos peurs, nos angoisses, nos blessures les plus profondes. Pour captiver des lecteurs et des lectrices, il faut que nous comprenions qu’en notre intérieur, il existe des secrets qui font mal. C’est cette souffrance qui fascine et libère.

Le secret façonne le personnage

Il doit être axé sur le personnage, c’est-à-dire qu’il doit s’agir de quelque chose qu’une ou plusieurs personnes gardent jalousement et qui les concerne et les implique. Le secret ne devrait pas être orienté vers la quête dans le sens où il devient un prix à rechercher.

C’est un conflit personnel qu’il faut oser affronter. Au quotidien, il peut être profitable de prendre du recul et concevoir alors le changement personnel que l’on cherche à atteindre et à forger pour nous-mêmes et ceux qui nous entourent.

En fiction, comme l’avait remarqué Aristote, l’effet sera une catharsis, une sorte de purgation de nos passions aveuglantes. Nous reconnaissons dans le tourment qui dévore le personnage quelque chose que nous partageons.

Tout comme l’être de fiction en lequel nous nous identifions par ce biais, on est prêt à tout pour protéger le secret. Voici notre grand tort. Le conflit nous frappe comme le vent puissant affole une roue à aubes. Et ces remous des passions : jalousie, colère, haine, tristesse mais aussi de douceur : … les moindres incidents que je me rappelais, un mouvement qu’elle avait fait en voiture auprès de moi, ou pour s’asseoir en face de moi dans sa chambre, propageaient dans mon âme un remous de douceur et de tristesse qui de proche en proche la gagnait tout entière (Albertine disparue – Proust) ; sont certes différents de nos propres inquiétudes, cependant, nous nous soumettons tous à ces inquiétudes, à ces problèmes.

Le contenu sera tout autre car chacun a eu ses propres expériences, menant à divers résultats [chacun réagit différemment à un deuil par exemple mais on n’échappe pas au deuil]. Quel est le lien avec la fiction ? Considérons la réponse de William Noble : Nous commençons donc par un ou plusieurs personnages qui ont un terrible secret. Ensuite, on passe à l’action ou au suspense, selon que l’on souhaite que le secret soit divulgué immédiatement (dans ce cas, nous aurions de l’action parce que les choses commenceraient à se produire) ou non (dans ce cas, il y aurait un suspense, car il y aurait une incertitude sur ce qu’il se passerait ou se passera lorsqu’il sera divulgué). En fiction, l’emploi du conditionnel offre plus de possibilités que le futur car affirmer le futur retire le doute alors que la fiction a besoin de cette incertitude sur le devenir des actions entreprises.

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