L’ÉLABORATION DU PERSONNAGE

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Il peut être impressionnant de penser son personnage. Inventer une vie est une responsabilité. Il n’est pas très important de commencer par décrire physiquement un personnage. La couleur de ses yeux ou son poids auront peut-être une certaine influence sur son comportement mais ce qui compte surtout, nous rappelle Robert Newton Peck, c’est l’intériorité du personnage, son esprit, son âme et ses valeurs toujours défiées au gré de ses expériences.

La tâche semble complexe. Commencer par dessiner les contours du personnage facilitera les choses. Peck préconise de lier dans l’équation des choses tangibles, réelles qui deviendraient en quelque sorte des signes singuliers de ce personnage.
Par exemple, on pourrait l’identifier par un chandail qu’il aime particulièrement.

Le travail préalable sur le personnage

Les réflexions auxquelles vous allez vous livrer dans ces moments de création d’un personnage ne sont pas destinées à être insérées dans le récit. Ce sont d’abord des notes. Peut-être que lors du processus, vous entamerez un dialogue non pas avec vous-mêmes mais effectivement, avec ce personnage imaginaire, qui n’est encore qu’un brouillard. Prenez-vous au jeu de ce dialogue. Faites en des notes.

Ces notes servent à faire connaissance avec votre personnage. Vous l’entendez parler, ressentez sa douleur, et l’aimez assez jusqu’à lui poser la main sur son visage.

Et même si ces mots dont vous couvrez une page ne sont pas destinés à être lus par quelqu’un d’autre que vous-mêmes, vous en tirerez une satisfaction, affirme Robert Newton Peck. Et puis, ce que Peck constate aussi, c’est que connaître son personnage éloigne le souci de la page blanche.

Ne commencez pas par écrire Chapitre Un mais plutôt par Mon personnage principal. Et livrez-vous à un brainstorming sur ce personnage.

Quel est son nom ?

Ainsi, vous l’identifiez. Vous pourriez même user de Lui ou Elle si aucun pseudonyme ne vous satisfait à ce moment. Ce qui compte est de le distinguer parmi toute la foule qui peuplera votre récit (c’est ce qu’on nomme la Dramatis Personnae, l’ensemble de vos personnages).

Quelles furent les conditions de son éducation ?

Il est important que vous compreniez le milieu dans lequel ce personnage a évolué lors de son enfance. Parce qu’il s’agit d’un monde singulier qui ne sera peut-être pas celui dont vous planterez le décor dans votre récit.

Il ne s’agit pas encore de décrire le vécu d’un personnage, les expériences qui peuvent expliquer son comportement maintenant. Cet autrefois du personnage pourrait expliquer les choix qu’il fait lors de l’intrigue. Ce type d’informations entre dans l’intrigue.
Par exemple vous pourriez vouloir ici que votre personnage fût élevé dans un milieu ouvrier alors que toute votre histoire décrit une ruralité qui vous tient à cœur. Vous pourriez aussi définir si les années de formation lui ont servies, s’il a réussi sa scolarité, si ce qu’il fait maintenant dépend pour une large part des études qu’il a suivies.

Notons aussi que Robert Newton Peck ne lie pas l’intelligence de votre personnage aux conditions de son éducation. Peut-être dit-il ainsi à voix basse que l’intelligence serait une chose innée. Votre point de vue sur cette question entre aussi en ligne de compte ici.

Quelles sont ses croyances ?

Ont-elles ont été inculquées ou furent-elles pour ce personnage comme une révélation ? Est-ce qu’il vit pleinement ses croyances ou les rejettent-ils ? Est-il croyant ou athée ou bien est-il comme l’agnostique, encore à s’étonner et à s’interroger sur le sens de son existence ?
Dans l’article précédent, Robert Newton Peck insiste sur le fait que l’on met beaucoup de soi dans la création d’un personnage. Si, par exemple, vous êtes croyant, peut-être qu’il vous serait profitable de faire de votre personnage un être foncièrement anticlérical.

Notez que Peck enveloppe le mot croyances avec un concept religieux. Il ne cherche pas à définir une orientation politique, par exemple, qu’il classe plutôt dans les valeurs qui caractérisent un personnage (ou nous-mêmes d’ailleurs). Vous pourriez tout aussi bien nommer cette question comme Quelles sont ses croyances et valeurs ? Si cela correspond mieux à votre propre perspective.

Ou alors considérez la question initiale comme la question sur la spiritualité de votre personnage.

Quel est son aspect physique ?

Robert Newton Peck conseille de ne pas s’étendre sur le physique d’un personnage. Si certains aspects peuvent avoir une importance sur ce qu’il paraît être (par exemple, le personnage pourrait ressentir un malaise d’un certain surpoids ou bien faire en sorte que cela ajoute à son charme), vous pouvez noter cette caractéristique physique.

Quelles sont ses valeurs ?

Ici, vous poserez tout ce qui n’est pas de l’ordre du religieux. L’idée somme toute est de tenter d’unifier intérieurement votre personnage. Il existe une telle pluralité de personnalité que, si vous-mêmes êtes confus quant à la nature d’un personnage, vous risquez tout autant de confondre vos lecteurs.

Il serait maladroit d’affubler votre personnage d’artifice comme par exemple un personnage égoïste si vous ne possédez pas une intention comme par exemple cet égoïsme serait l’image qu’il renvoie aux autres et qui interfère négativement sur ses relations. Il lui faut alors dépasser ce jeu d’apparences afin d’aller à la rencontre de lui-même (s’unifier) si cet assainissement peut servir l’intrigue.

Je pense qu’il est utile de connaître les valeurs de son personnage parce que soit, ce sera un personnage qui se pliera aux valeurs établies, aux préjugés, aux diktats en quelque sorte du monde dans lequel l’auteur ou l’autrice le jette. Habituellement, un tel personnage qui ne lutte pas contre le monde n’est pas le personnage principal.
Soit, ce qui caractérise le personnage principal, c’est qu’il est souvent en butte contre une morale par exemple qu’on cherche à lui imposer. Votre personnage sera donc soit critique envers les valeurs du monde, soit il les acceptera.

Quelles sont ses opinions ?

Alors que croyances et valeurs sont considérées davantage comme des convictions, l’opinion a un caractère plutôt transitoire. Au gré de ses expériences, un personnage peut changer d’opinion.

Vous pourriez montrer aussi, sans qu’il les partage, si votre personnage consent ou non aux opinions d’autrui.

Quels sont ces triomphes et ces échecs ?

Vous pourriez ainsi définir dans quoi il excelle et surtout ce qu’il évite de peur de l’échec. Avec cette question, vous êtes aux abords du trauma (dont il ignore peut-être les conséquences) qui caractérise actuellement votre personnage.

Quelles sont sa situation familiale et son orientation sexuelle ?

Maintenant, vous commencez à avoir une idée de l’entourage de votre personnage principal.

Quelle est sa profession ?

Ce qui est important, souligne Robert Newton Peck, c’est de savoir s’il s’épanouit dans cette profession ou au contraire, si elle est un fardeau pour lui (ce qui pourrait expliquer pourquoi il prend certaines décisions).

Quels sont ses loisirs ?

Est-il un manuel qui aime le bricolage ? aime t-il se perdre dans la lecture ? Aime t-il recevoir des amis ? En décrivant ses loisirs, vous saurez si votre personnage préfère la tranquillité, se réfugier seul, se délectant de ses méditations ou bien s’il ne supporte pas la solitude, se créant des relations aux autres fragiles et souvent vaines. Vous pourrez alors monter des scènes entières autour des loisirs. Par exemple, lors d’une réunion entre amis et bien qu’il n’y croit pas, votre personnage peut céder, après quelques réticences, à se laisser hypnotiser. Vous le menez ainsi à éprouver une expérience qui orientera votre intrigue.
Vous pourriez aussi montrer de lui ou d’elle qu’il ou elle est un être sociable, appréciant sincèrement la présence d’autrui ou bien encore, s’il prend l’excuse de ses loisirs pour fuir une situation familiale qui l’étouffe.

Prend-il soin de lui ?

A travers cette question, Robert Newton Peck effleure la nature de ses relations aux autres. Une personne négligée crée autour d’elle une sorte de douve empêchant quiconque de s’approcher de trop près.

Prendre soin de soi, c’est aussi faire retour sur soi comme apprendre à gérer ses émotions, par exemple. Le regard que porte le personnage sur son corps peut être aussi révélateur de son équilibre émotionnel.

Parle t-il beaucoup avec les mains ?

Accompagner la parole par le geste est une forme de spontanéité. C’est un indice de la passion et de l’engagement qui anime le locuteur. Parler avec les mains est un signe de l’extraverti. Nul doute que les questions suggérées par Robert Newton Peck sont pragmatiques. On cherche à façonner un personnage avec des faits réels de son existence quotidienne.

A t-il une âme d’artiste ?

Il y a certainement beaucoup à faire autour de cette question. Un peu de recherche s’impose. Par exemple, à travers cette âme d’artiste, vous pourriez en faire un personnage résolument tourné vers l’avenir. Peut-être pas quelqu’un d’insatisfait mais qui tente de dire par son art plus ou moins dilettante (s’il est un artiste ou seulement s’il possède une âme d’artiste) son malaise concernant son présent.

Quels sont les événements qui ont le plus marqué ce personnage ?

Avec cette question, vous abordez la mémoire de votre personnage. Quels sont les souvenirs dont le lecteur doit prendre connaissance pour cerner davantage ce personnage ? Ce que conseille Robert Newton Peck, c’est de concrétiser les souvenirs par des objets, des choses tangibles qui agiront alors comme des signes ou des symboles des morceaux choisis du passé.

Quelles sont ses manies ?

Il ne s’agit pas tant de rendre sympathique votre personnage. Si Robert Newton Peck met cette question sur la table, c’est plutôt pour décrire un syndrome mental. Il existe à travers les manies dont vous pourriez vouloir affubler votre personnage un trouble du comportement. Vous pourriez vouloir aussi rapprocher ce trouble du trauma qui caractérise un personnage principal et qu’il devra dépasser lors d’une crise (cette crise est d’ailleurs une articulation structurelle du récit).

Quel son but ?

Le but, ici, ne sera pas à confondre avec l’objectif du héros dans le récit. C’est quelque chose de plus personnel. Quels sont ses rêves, ses espoirs mais aussi ce qu’il hait et qu’il voudrait pouvoir éradiquer ?

Comme vous le constatez par ces questions, un travail d’écriture de fiction exige d’emblée un travail de préparation. Mais si vous prenez ce temps de préparation, Robert Newton Peck est persuadé que votre écriture ensuite sera facilitée et certainement moins stressante.

Ce n’est pas à propos de quoi vous allez écrire qui devrait vous préoccuper. Plutôt, à propos de qui ?

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