Comment trouver le bon personnage ?
Vous passez en revue les candidats jusqu’à ce que vous en trouviez un qui correspond au rôle et pour lequel vous ressentez indistinctement une certaine attirance nous dit Dwight V. Swain.
Construire un personnage, c’est commencer par décider quel personnage construire. Vous commencez à partir de vos propres fantasmes et sentiments. Parce que le personnage que vous ne pouvez pas projeter ou ressentir échouera.
Vous chassez votre personnage jusqu’à ce que vous en trouviez un qui vous ressemble… un qui correspond à vos standards. C’est exactement ce que vous faites. Vous les trouvez, nous dit Dwight V. Swain.
Comme un coup de foudre
Vous croisez l’image d’un personnage et quelque chose se produit. Vous ne savez pas pourquoi. Et peut-être que vous ne le saurez jamais.
Mais d’un seul coup, votre pouls s’accélère, vous avez une sensation que vous n’avez jamais ressentie auparavant.
Cette image se connecte à vos fantasmes inconscients, aux images et aux empathies qui tourbillonnent dans les profondeurs de votre esprit.
Le même principe s’applique lorsqu’il s’agit de personnages fictifs, de personnages à inventer pour une histoire. L’un après l’autre, vous triez leurs possibilités diverses et variées à la recherche de celui qui vous attire – c’est-à-dire qui correspond à vos manies et à vos standards tout en étant capable de porter votre message.
Lorsque vous commencez un projet de fiction, vous vous engagez à vivre avec les personnages impliqués dans l’histoire et cela peut se développer sur une période de temps considérable. L’exemple classique est celui de Sir Arthur Conan Doyle et Sherlock Holmes.
Doyle est finalement devenu si las d’écrire sur Holmes qu’il l’a tué dans la célèbre scène des chutes de Reichenbach. Pour apaiser les lecteurs indignés, il a été obligé de le ramener à la vie.
Sous cet angle, vous pouvez voir combien il est vital de ne pas se piéger en travaillant avec un personnage que vous trouvez terne, ennuyeux ou fatigant. Même une nouvelle peut s’éterniser si votre protagoniste – ou toute autre personnage important, d’ailleurs – anesthésie votre muse.
Continuez donc à chercher, à tester jusqu’à ce que vous mettiez en avant une personne (du moins l’incarnation d’un personnage) qui correspond aux exigences de votre histoire et qui vous passionne.
Personnification
Le but de tout cela est qu’en fait, « trouver » un personnage signifie personnifier – c’est-à-dire donner une forme humaine à – des aspects de soi-même que vous aimez, n’aimez pas ou auriez aimé avoir. Car à la base, nous écrivons tous sur nous-mêmes, nous rappelle Dwight V. Swain. Ou, pour dire les choses encore plus clairement, tous vos personnages sont vous.
Un processus conscient ? Rarement. La plupart d’entre nous ne se connaissent pas si bien que cela. Mais nous savons au moins ce que nous aimons. C’est un bon départ ne serait-ce que pour l’intuition.
Lorsque, pour une raison quelconque, une épiphanie nous frappe alors que nous cherchons à tâtons un personnage sur lequel fonder notre projet actuel, nous le reconnaissons – c’est-à-dire qu’il nous émeut et nous éveille à un degré ou à un autre, nous encourageant ainsi à l’explorer et, si cela nous stimule encore plus, de le développer plus en profondeur. Un personnage comme Scarlett O’Hara n’a vu le jour que parce qu’elle fascinait autant son auteur que le lecteur.
L’astuce consiste à explorer vos propres réactions jusqu’à ce que vous trouviez ce qui les stimule le plus nous conseille Dwight V. Swain. Vous pouvez trouver l’inspiration dans la musique, dans des personnes que vous connaissez ou ne connaissez pas (des personnes réels ou d’autres personnages de fiction).
Quelle que soit votre approche, l’important est de vous laisser aller, via la libre association et sans autocensure. Comment adapter les personnages que vous recherchez à votre histoire ?
Alfred Hitchcock l’a bien dit : « D’abord, vous décidez de ce que les personnages vont faire, puis vous leur fournissez suffisamment de caractéristiques pour qu’ils paraissent plausibles qu’ils le fassent. En un mot, vous rationalisez leur présence et leur comportement.
La vérité du personnage
Est-ce qu’un être fictif qui n’existe que dans votre imagination peut-il être considéré comme une véritable personne ?
Ils ne sont pas une imitation de la réalité. Mais une représentation de celle-ci. Le travail de l’auteur en ce qui concerne les personnages consiste à créer (à rêver) des personnages qu’il peut facilement faire se comporter d’une manière intéressante et faire des choses intéressantes dans des situations, des circonstances ou des contextes que les lecteurs trouvent intéressants – tout en gardant l’histoire crédible et le personnage crédible.
Mais au cœur de la construction du personnage, il y a beaucoup plus d’implication et de subtilité. Ce processus est centré sur la capacité de l’auteur à comprendre pourquoi le personnage pense et fait les choses qu’il fait.
Qu’est-ce que rationaliser un personnage ?
Fournir des raisons plausibles (mais pas nécessairement vraies) pour justifier son comportement. Pour attribuer ses actions à des motifs rationnels et crédibles sans analyse de la réalité et surtout des motifs inconscients.
De plus, de vraies personnes ou d’autres personnages d’autres auteurs ne sauraient s’adapter par eux-mêmes à tous les points de vue de votre histoire. Vous devez les adapter pour qu’ils correspondent à l’image que vous essayez de créer.
Mais ce n’est pas une corvée de les combiner en morceaux – les cheveux de l’un, la taille de l’autre, un regard ou un zézaiement, un orgueil ou un préjugé ou la compulsion d’un troisième.
Le problème est de savoir ce qui fait agir les véritables personnes. Pour des personnages de fiction autres que les siens, on peut se livrer à quelques analyses. Mais face à un être humain, il est difficile de s’en faire une idée rien qu’en l’observant.
D’abord, parce que, comme le rappelle Dwight V. Swain, tout un chacun porte un masque. Et que souvent, ces personnes ne se connaissent pas vraiment elles-mêmes.
C’est juste qu’il n’y a aucun moyen, quel qu’il soit, de juger sincèrement de leurs actes, de les justifier ou de les réfuter. En effet, il est tout à fait possible d’avancer d’autres justifications ou explications, des hypothèses tout aussi plausibles pour rendre compte du comportement de chaque individu.
Convaincre le lecteur
Plus précisément, cela signifie que, dans les limites de l’imagination (c’est Dwight V. Swain qui pose des limites à l’imagination. Vous pourriez objecter dans une discussion sur le forum), l’auteur est libre de créer n’importe quel type de personnage qu’il souhaite, et de lui faire faire tout ce que l’auteur peut concevoir, à condition seulement de rationaliser le comportement du personnage de telle manière que les lecteurs y croient.
Lors de la quête de votre personnage, vous ferez des rencontres. Vous vous apercevrez que le conteur et les personnes réelles (ou fictives) qu’il croise sont foncièrement différentes. Car chacun vit dans un monde qui lui est propre et difficilement perméable.
Plus précisément, dans le cadre de sa réflexion, l’auteur suspend temporairement ses propres normes et adopte celles de quelqu’un d’autre.
C’est ce que fait un auteur quand il crée un personnage. Il apprend simplement à mettre temporairement ses propres croyances et attitudes dans les limbes (dixit Dwight V. Swain) et à adopter celles de quelqu’un d’autre : la personne sur qui il écrit, le personnage qu’il crée. En fait, l’auteur prétend posséder des principes et des qualités qu’il ne possède pas.
L’auteur qui est incapable de simuler est confronté à une tâche presque impossible, car ses personnages manqueront de ce souffle de vie que l’on aperçoit dans la présence de l’autre.
Consciemment ou inconsciemment, naturellement ou par apprentissage, l’auteur doit avoir ou acquérir la capacité de se mettre à la place d’une autre personne peut-être improbable.
Parfois, l’empathie se manifeste immédiatement, par intuition ou par osmose. Un personnage peut devenir un être à part entière, vivant dès le moment de sa conception.
Le plus souvent, en tout ou en partie, le personnage et sa situation devront être construits, fabriqués… construit par étapes ou tissés (comme aime le dire la théorie narrative Dramatica) grâce à l’habileté de l’auteur à rationaliser (la clef selon Dwight. V. Swain).
D’ailleurs, pour Swain, cela devrait être simple (même de construire un personnage complexe ou bien de commencer avec un archétype ensuite altéré) et évident. L’évidence est un concept qu’il faut manier prudemment et surtout conserver un esprit critique à son égard.
Ce qui semble évident chez les mots de Swain, c’est que cette empathie ou recherche d’empathie avec un être fictif donne à l’auteur les clefs pour déchiffrer les mystères, les pensées, les secrets des personnages qui viendront peupler l’histoire à écrire.
Un personnage lié au contexte
Un personnage et son discours doivent être contextualisés. Il faut comprendre le rapport au monde de n’importe lequel des personnages de l’histoire. Sans énigme à résoudre, Sherlock Holmes n’est plus que l’ombre de lui-même et aussi intéressant qu’il peut être en soi, s’il n’y a pas cette condition d’un mystère à résoudre, on a peu d’intérêt à suivre ses aventures.
Votre inconscient le sait. En conséquence, et que vous le vouliez ou non, il voit chaque personnage qui advient dans votre esprit, qui n’est encore qu’une idée probablement informe mais cette idée est à la fois personnage et circonstance ou situation.
Instinctivement, il conçoit et mesure vos incarnations par rapport aux exigences de certains rôles et fonctions. La théorie narrative Dramatica rejoint ici l’analyse de Dwight V. Swain lorsque ces rôles et fonctions tels que les perçoit Swain sont chez Dramatica des archétypes, c’est-à-dire des personnages objectifs qui répondent à une fonction comme protagoniste ou antagoniste ou Guardian…
Il pourrait être bon d’apprendre à penser en termes de vos propres goûts et aversions, nous suggère Dwight V. Swain. Ce sont toujours vos matières premières de base quand il s’agit de construire un personnage. A la manière d’un acteur, cherchez dans votre passé des souvenirs vibrants d’émotions – des expériences qui ont toujours un pouvoir sur vous et que vous pourriez vouloir exorciser.
Ces moments de douleur, d’extase et d’humiliation doivent porter leurs fruits à travers vos inventions. Qu’est-ce qui les a provoqué ? Qu’est-ce qui vous a fait craquer, ou perdre votre souffle, ou brûler de honte jusqu’à la racine de vos cheveux ?
Pourquoi ces notions de souffrance, d’extase et d’humiliation… importent-elles autant ? Parce qu’elles sont universelles. Votre vécu vous est personnel mais l’émotion ressentie lors de ce vécu (qu’on la nomme souffrance par exemple) est partagée avec d’autres, d’autres qui souffrent aussi (mais leur souffrance leur est singulière, seul souffrir est universel).
Ce qui compte alors, c’est ce que vous ressentez – et que ce sentiment vous rende proche de toute l’humanité. Il vous met également en relation avec les personnages de votre histoire.
De plus, certains aspects du comportement humain sont jugés positifs par la grande majorité selon les cultures. D’autres se révèlent négatifs. Ainsi, si vous inventez vos personnages avec cette double perspective, vous devriez avoir la réaction voulue auprès de vos lecteurs.
Concrètement, cela signifie que la première étape pour créer un personnage efficace (toujours selon les propos de Dwight V. Swain) consiste à rechercher les personnes qui suscitent des sentiments forts en vous. Des personnes que vous admirez, d’une manière ou d’une autre. Des personnes que vous aimez. Des personnes qui vous dérangent ou vous déconcertent ou que vous détestez. Des personnes qui vous intriguent.
Des personnes que vous enviez ou avec lesquelles vous aimeriez échanger votre place, non seulement en termes de situation ou de statut, mais aussi d’attributs, de traits de caractère.
Votre prochaine étape consiste à vous demander, en considérant le type d’histoire que vous voulez écrire, si certaines de ces personnes, certains de ces attributs, pourraient s’intégrer.
Y a-t-il une femme que vous aimeriez connaître ? Un homme qui a les qualités – peu probables, très probables – qui pourraient convenir à un autre héros ? Pouvez-vous concevoir un seul méchant ,ou une bande de méchants comme dans De l’or en barre de T.E.B. Clarke ?
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