Nous allons aborder le chapitre 12 de la théorie (c’est une traduction du livre original de Melanie Anne Phillips et Christ Huntley, les fondateurs de cette théorie narrative) que je me suis permis d’annoter.
Sommaire complet :
DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE
CHAPITRE 12
LES ÉLÉMENTS DE STRUCTURE : LE THÈME
Qu’est-ce exactement que le thème ?
Il semble que toute autrice et tout auteur est conscient du thème, mais essayez d’en trouver un qui puisse le définir ! La plupart vous diront que le thème a à voir avec l’atmosphère de l’histoire. Mais en quoi cette réponse diffère du genre ?
D’autres vous diront que le thème est le message de l’histoire. D’autres encore mettront en avant que le thème est la prémisse d’une histoire qui illustre les résultats d’un certain type de comportements.
Si l’on pousse un peu plus loin, l’atmosphère (ou la tonalité) d’une histoire pourrait être la colère ; un message pourrait être que les centrales nucléaires détruisent l’environnement ; une prémisse pourrait être que la cupidité mène à se détruire soi-même. Il semble évident que chacune de ces assertions pourrait apparaître dans la même histoire et chacune possède quelque chose de thématique en elle.
Il est cependant certain qu’aucune n’apparaît complète en soi. Parce que chacune est seulement un angle différent de ce qu’est réellement le thème.
En fait, le thème est une question de point de vue. Et le point de vue est une question de relations. Le thème décrit la relation qui existe entre ce qui est en train d’être regardé et d’où cela est regardé. C’est pour cela que le thème est habituellement si ardu à expliquer.
Ce n’est pas une chose indépendante comme peut l’être l’intrigue ou un personnage, mais c’est une relation entre l’intrigue et un personnage.
Un exemple familier est celui des trois aveugles qui tentent de décrire un éléphant. Chacun d’eux est comme un personnage d’une histoire et leur investigation de la bête est l’intrigue.
- L’un d’entre eux, touchant la queue, commente : C’est long et fin comme un serpent !
- Un autre, touchant l’oreille, répond : Non, c’est large et plat comme la feuille d’un arbre de la jungle.
- Le dernier investigateur touche alors la patte de l’éléphant et rétorque : Vous avez tort tous les deux. C’est rond et corpulent comme un arbre !
L’approche de l’éléphant prise par chacun de ces personnages et comment ils l’ont compris, dépend de leur point de vue et de la réalité (ici, celle de l’éléphant). Il est vrai aussi que si l’objet de leur étude aurait été un autre animal (une autre chose, une autre réalité), la perspective (leur point de vue) aurait été aussi changée.
D’où nous regardons correspond aux quatre points de vue représentés par les quatre lignes dramatiques (d’une histoire en général) :
- La ligne dramatique de l’Objective Story
- La ligne dramatique du personnage principal
- La ligne dramatique de l’Obstacle Character (ou Influence Character)
- La ligne dramatique de la Subjective Story
Nous vous renvoyons à DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (3) pour une première définition de ces lignes dramatiques.
Concernant les fictions, ce que nous sommes en train de regarder est le problème que le Story Mind considère.
Pour le Story Mind, en plus de la définition à laquelle le lien donné ci-dessus vous renvoie, nous vous conseillons la lecture de DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (21)
Donc, pour vraiment comprendre ce concept de perspective (et par conséquent le thème), nous devons être capable de décrire précisément la nature du problème soulevé par l’histoire puis de voir comment son aspect change selon chacun des points de vue différents (c’est-à-dire selon chacune des lignes dramatiques).
Décrire le problème de l’histoire
Lorsque nous cherchons à catégoriser quelque chose, nous essayons de restreindre sa définition comme lorsque nous demandons si quelque chose est animal, végétal ou minéral.
Lorsque nous catégorisons les problèmes (comprenez qu’il ne s’agit pas de hiérarchiser les problèmes comme si certains d’entre eux étaient moins importants que d’autres) qui pourraient être d’intérêt pour le Story Mind, la première chose que nous pourrions vouloir est de savoir si le problème est externe (comme une situation insupportable) ou s’il est interne (comme un trauma non résolu de l’enfance par exemple).
Les problèmes externes se produisent dans le monde (Universe pour la théorie), c’est-à-dire dans l’environnement (par souci de compréhension, considérons que cet environnement est d’abord une situation) ; Les problèmes internes se produisent dans l’esprit (Mind pour la théorie).
De plus, certains problèmes n’ont rien à voir avec l’état des choses (tels une situation externe ou un état d’esprit) mais sont des processus qui sont allés de travers.
- Un processus externe tombe sous la catégorie de Physics ce qui signifie simplement une quelconque activité physique (c’est de l’action pratique, de l’agir).
- Un processus interne qui résulte en un problème concerne la catégorie Psychology qui signifie simplement une manière de penser.
Notez qu’une manière de penser (Psychology) est différente d’une attitude figée (Mind). Psychology décrit un problème tel que de passer trop de temps avec des détails par exemple alors que les problèmes qui relèvent de la catégorie Mind sont davantage comme des préjugés (ou des opinions).
Ayant identifié quatre catégories avec lesquelles nous pouvons classer la nature du problème du Story Mind, nous pouvons les arranger en une quaternité à l’image de ce qui a été fait précédemment avec les éléments de personnage.
Et comme ces quatre catégories classent le problème, Dramatica se réfère à elles comme autant de classes.
Détaillons..
Jusqu’à présent, nous avons été capable de déterminer grossièrement qu’un problème peut être un processus ou un état externe ou interne représenté par quatre classes. Nous pouvons déjà avoir une vue plus fine du problème que nous décrivons dans notre histoire. Il nous suffit seulement de considérer laquelle de ces quatre classes décrit le mieux le problème au sujet duquel nous souhaitons écrire. Par exemple, si nous avons l’idée d’une histoire sur des personnes coincées sous l’eau dans un navire immergé, ce serait un problème externe convenablement illustré par un état des choses (une situation), c’est-à-dire que cette idée d’histoire prendrait place dans la classe Universe.
Si nous souhaitons écrire sur un voyage éprouvant à travers la jungle pour retrouver une cité perdue, nous décririons un problème Physics, c’est-à-dire une activité externe de laquelle émergent des difficultés. Une histoire qui explore un père qui ne veut pas laisser sa fille se marier en dessous de sa condition sociale est le mieux décrit comme un problème de la classe Mind car il s’enracine dans une attitude figée (opinion ou préjugé). Et finalement, un auteur qui souhaite commenter thématiquement sur un groupe d’amis se manipulant les uns les autres optera pour Psychology comme classe du problème car la problématique thématique est de changer sa manière de penser (qui diffère de changer d’état d’esprit, de point de vue sur quelque chose).
Il est important de noter que les quatre classes joueront en fin de compte une fonction dans une histoire réputée complète (ce que Dramatica nomme un Grand Argument Story).
Concernant ce Grand Argument Story, nous vous proposons la lecture de :
- COMPLETE STORY & DRAMATICA
- DRAMATICA : LES ELEMENTS DE STRUCTURE
- DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (21)
Comme nous le verrons plus tard, chaque classe décrira le problème tel qu’il apparaît selon les différentes lignes dramatiques (que Dramatica nomme Throughlines).
Star Wars
Nous avons vu précédemment comment les quatre lignes dramatiques (ou Throughlines) de Star Wars étaient illustrées.
Considérons maintenant ces Throughlines comme des domaines. Dramatica emploie le terme de domaines pour signifier le contenu des lignes dramatiques. Les domaines sont l’aspect pratique de la théorie.
Le domaine de l’Objective Story
Cet Objective Story œuvre dans le domaine Physics (la classe des activités).
Star Wars parle d’une guerre entre l’Empire et la Rébellion. Il n’existe pas de lieu précis exigé par cette guerre. C’est plutôt une exploration des feintes, des raids et des batailles rangées qui se produisent entre les deux forces antagonistes.
Le domaine du personnage principal
Ce domaine correspond à Universe (c’est-à-dire la classe des situations).
Luke Skywalker est un garçon de ferme qui ne se satisfait pas de sa situation sur une petite planète désertique. Il possède un énorme potentiel de talents inexplorés parce que son père était un chevalier Jedi mais tout le monde ne le perçoit que comme un enfant perdu au fin fond de la galaxie.
Le domaine de l’Influence Character
C’est la classe des attitudes figées (Mind).
Obi Wan Kenobi vit dans le monde de la Force. Son attitude vis-à-vis du pouvoir et de l’impact de la Force, l’existence du côté obscur de la Force et l’importance de cette religion sont inébranlables.
Le domaine de la Subjective Story
Concernant la Subjective Story, nous vous conseillons la lecture du chapitre 10 de la théorie :
- DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (21)
- DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (22)
- DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (23)
- DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (24)
Le domaine de la Subjective Story se nourrit de la classe Psychology, c’est-à-dire de la classe des manières de penser.
Obi Wan manifestement manipule Luke par des moyens psychologiques. Il essaie de contraindre Luke à l’aider à se rendre à Alderaan mais Luke résiste. Obi Wan ne révèle pas la destinée funeste de l’oncle et de la tante de Luke bien qu’il ne se montre pas surpris d’apprendre ce qui leur est arrivé.
A dessein, Obi Wan laisse Luke dans l’ignorance de ses ressources lorsque ce dernier négocie avec Han Solo l’enjoignant à se taire alors que Luke peut à peine se contenir. Obi Wan garde Luke sous sa coupe en distribuant parcimonieusement les informations sur la Force, l’Empire, le passé.. Et c’est encore Obi Wan qui murmure à l’oreille de Luke lors de plusieurs moments critiques.
Nous continuerons la traduction de ce chapitre 12 dans le prochain article.