La théorie narrative Dramatica est une approche de l’écriture. Elle peut sembler ardue de prime abord, mais elle peut définitivement vous faire comprendre les mécanismes à l’œuvre dans un récit.
Sommaire : DRAMATICA : LA THEORIE EXPLIQUEE
Abordons dans cette traduction de l’ouvrage de Melanie Ann Philipps et Christ Huntley la notion de personnages subjectifs.
CHAPITRE 10 : LES PERSONNAGES SUBJECTIFS
Au cours du Chapitre 2 sur les éléments de structure, nous avons décrit quatre lignes dramatiques (Throughlines) dans une histoire :
- La ligne dramatique globale de l’histoire (Overall Story Throughline)
- La ligne dramatique du personnage principal (Main Character Throughline). Essentiellement l’arc dramatique du personnage principal, c’est-à-dire les différents états psychologiques qu’il connaîtra au cours de son aventure).
- La ligne dramatique de l’Influence Character. Ce personnage particulier a en charge la garantie de l’évolution du personnage principal. L’autrice et ‘auteur ont besoin d’appuyer l’argument de leur personnage principal en proposant des solutions alternatives à son problème. Ce n’est pas un point de vue différent comme une opposition de l’antagoniste. Ce dernier serait en quelque sorte l’antithèse du protagoniste. L’Influence Character sert à expliquer davantage l’argument du héros ou de l’héroïne, c’est-à-dire le message de l’auteur et de l’autrice. Pour le lecteur/spectateur, la ligne dramatique de l’Influence Character décrit simplement ses actions et ses préoccupations tout au long de l’intrigue.
- La ligne dramatique de la Subjective Story. La Subjective Story est la description de l’intersubjectivité entre le personnage principal et l’Influence Character. C’est l’illustration de ce qui se passe dans l’intériorité des personnages en regard de la relation qu’ils entretiennent.
La ligne dramatique globale du récit (Overall Story Throughline) décrit la valeur relative des approches des personnages les plus importants (Overall Story Characters).
Chaque personnage important (que Dramatica a catégorisé en archétypes, c’est-à-dire en fonctions dans le récit) a une approche spécifique du problème soulevé par l’histoire. Pour faire simple, ce problème pourrait se réduire à la question dramatique centrale : Est-ce que le héros réussira ou pas ?
Pour découvrir la notion d’archétype chez Dramatica : DRAMATICA : LA THEORIE EXPLIQUEE (6)
C’est comme si chaque archétype venait dans l’histoire avec un mode d’être qui le distingue de tous les autres et qui oriente ses décisions.
La ligne dramatique du personnage principal (Main Character Throughline) décrit le point de vue et l’évolution du personnage principal. La ligne dramatique de l’Influence Character décrit un point de vue alternatif à celui du personnage principal ainsi que l’impact croissant de cet Influence Character sur le personnage principal.
Et la ligne dramatique de la Subjective Story décrit la dialectique (ou le mouvement concret) qui se joue entre le personnage principal et l’Influence Character quant à la légitimité (ou la possibilité) du changement que devrait connaître le personnage principal. La relation entre ces deux-là vivifie l’arc dramatique du personnage principal. Ce qu’il se passe entre ces deux-là génère l’énergie qui imprime un mouvement à leur relation pour aboutir à la transformation éventuelle du personnage principal.
Une bonne façon de penser ces quatre lignes dramatiques est de les considérer comme 4 points de vue différents que le lecteur/spectateur pose sur le Story Mind.
Dramatica compare une fiction à l’esprit humain quant à sa faculté de résoudre les problèmes. Se poser des questions et y répondre, avoir des problèmes et chercher des solutions pour les résoudre, voilà ce que devrait être nos vies. Nous vous renvoyons à cet article pour une plus ample définition : DRAMATICA : LA THEORIE EXPLIQUEE (3)
Ce sont les mêmes 4 points de vue que nous utilisons tous dans nos relations de la vie réelle :
- Le personnage principal représente le point de vue du JE.
- L’Influence Character représente le point de vue du TU.
- La ligne dramatique de la Subjective Story couvre la perspective du NOUS.
- et la ligne dramatique globale explore la perspective du ILS.
Pour approfondir cet aspect des choses, vous pourriez être intéressé par LE POINT DE VUE DU JE
Pris ensemble, les quatre points de vue s’étendent du plus personnel au plus impersonnel et exposent tous les angles que nous pouvons utiliser pour examiner la nature de nos problèmes et la valeur relative de solutions alternatives (car l’évidence n’est probablement pas une bonne chose en fiction).
Nous avons précédemment traité les éléments de personnage sous une perspective purement objective (Chapitre 4 et suivants).
Lorsque nous nous tenons dans la peau d’un personnage, cependant, nous avons une perspective complètement différente. Plutôt que d’observer comment les événements d’une histoire sont liés les uns aux autres, nous devenons beaucoup plus concernés par la manière dont ces événements nous affectent personnellement. Proposer cette expérience est le but du personnage principal.
Le personnage principal : le seul dans son genre
Il n’y a qu’un seul personnage principal dans une histoire. Pourquoi ? Parce que chaque histoire prise comme un tout est un modèle du Story Mind qui reflète notre propre esprit, et dans notre esprit, nous ne pouvons être qu’une personne à la fois.
Qu’est-ce que le Story Mind ?
Dramatica est fondé sur le concept que la structure et la dynamique d’un récit ne sont pas aléatoires mais représentent une analogie avec un esprit humain en prise avec un problème. Dramatica nomme ce concept le Story Mind.
Le Story Mind n’est ni un personnage, ni l’auteur, l’autrice ou même le lecteur/spectateur. Il est l’histoire elle-même. C’est comme si l’expérience du lecteur et de la lectrice avec la totalité de l’histoire était comme de regarder à l’intérieur de la tête de quelqu’un.
Chaque acte et chaque scène, la progression thématique et le message, le climax, plus tous les personnages et ce qu’ils font représentent les parties et les fonctions (ou pensées si vous préférez) du Story Mind.
Une histoire complète argumente de façon efficace tous les aspects possibles du message. Ainsi elle pointe sur toutes les perspectives humaines possibles sur ce problème spécifique. C’est ainsi que la structure et la dynamique interne d’une histoire singulière créent un Story Mind singulier.
C’est aussi pour cela que les personnages sont des éléments communs à toutes les histoires, ainsi que le thème, l’intrigue, les actes et les scènes.
Chacun de ces éléments représentent la façon dont la psychologie humaine essentielle est recréée dans une histoire afin que nous puissions observer nos propres processus de pensée plus objectivement de l’extérieur vers l’intérieur.
Quelques précisons
Avant de continuer, il est important de noter qu’il peut y avoir plusieurs personnages centraux dans une œuvre mais qu’il ne peut y avoir qu’un personnage principal dans une histoire (c’est-à-dire qu’une œuvre complète peut contenir plusieurs histoires).
Une œuvre est un produit fini qu’un auteur ou une autrice donne à une lectrice ou un lecteur et peut contenir une histoire unique, plusieurs récits imbriqués ou bien plusieurs histoires partielles et complètes toutes tissées ensemble ou au moins imbriquées dans le même tissu du récit. Cela implique qu’un livre ou un film, une pièce ou une série ne peuvent avoir aucun personnage principal ou bien plusieurs. Mais pour chaque histoire particulière dans cette œuvre complète, il ne pourra y avoir qu’un seul personnage principal.
Le Grand Argument Story
Le Grand Argument Story est l’histoire dans laquelle sont illustrées les quatre lignes dramatiques [la ligne dramatique globale (Overall Story), la ligne dramatique de la confrontation entre le personnage principal (Main Character) et l’Influence Character, la ligne dramatique du personnage principal (son arc dramatique en somme) et la ligne dramatique de l’Influence Character].
Notez que chaque ligne dramatique illustre une évolution. Chacune de ces évolutions est marquée de nœuds dramatiques de manière à ce qu’il n’y ait aucun manque logique dans les arguments à la fois passionnés (c’est-à-dire nourris des émotions et des sentiments des personnages) et impassibles (la simple observation des événements).
Le Grand Argument Story couvre à la fois le message et sa contradiction (puisque le message est une proposition de l’autrice et de l’auteur et comme toutes les propositions, celle-ci possède sa propre contradiction). Si vous n’exposiez pas en quelque sorte l’antithèse de votre message (c’est-à-dire la justification d’un point de vue opposé), vous seriez dans le domaine de la propagande ou de la prédication.
En offrant les deux aspects du problème, le Grand Argument Story ne peut être réfuté. Le concept du Grand Argument Story sera développé dans les prochains articles. Pour le moment, considérez-le comme une argumentation complète qui pose définitivement le message de l’auteur et de l’autrice lors du dénouement de l’histoire.
Le Grand Argument Story bien que nécessaire n’autorise cependant pas le lecteur/spectateur à chausser en quelque sorte la conscience de chaque personnage (ou de chaque élément apparemment doté d’une conscience) et voir à quoi ressemble l’histoire sous cette perspective. Si cela devait être le cas, il y aurait trop d’informations à gérer pour le lecteur et la lectrice et un risque de les rendre confus.
Ainsi, le Grand Argument Story a vu sa finalité orientée afin de déterminer si le personnage principal perçoit son problème sous le bon angle ou s’il doit changer de préjugé et adopter un autre point de vue.
Conseils de lecture : DRAMATICA : LES ELEMENTS DE STRUCTURE
Nous continuerons la lecture de ce chapitre 10 de la théorie dans le prochain article
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