Démineurs de Mark Boal est une histoire sur une unité d’élite de l’armée chargée de trouver et de désamorcer des bombes afin de protéger les citoyens.
Le personnage principal est le Sergent William James.
Nous nous proposons d’analyser la toute première séquence du film afin de démontrer comment Kathryn Bigelow a utilisé les techniques filmiques afin de rajouter de la signification à toute l’histoire.
In medias res
Démineurs débute in medias res. Il s’installe au milieu de l’intrigue dès sa séquence d’ouverture.
Cette séquence s’articule autour de Sanborn, Eldrige et Thompson.
Ils essaient de désamorcer une bombe. Eldridge et Sanborn sécurisent les lieux alors que Thompson revêtu d’une combinaison de protection a dû s’approcher de la bombe suite à un incident technique.
Soudain, Eldridge aperçoit quelque chose de suspect près d’une boucherie proche. Tout en hurlant, il essaie de cibler le boucher. Sanborn tout en criant lui aussi reste en arrière afin de contrôler la zone. Thompson qui n’a pas compris ce qu’il se passe se met à courir.
La scène se termine avec le boucher composant un numéro sur son portable afin de déclencher la bombe.
Thompson est tué.
Une narration
Tout d’abord, cette histoire adopte une forme narrative. C’est incontestable.
Il nous est présenté dans cette séquence d’ouverture le type de travail que devra faire William James en remplacement de Thompson.
Plus astucieux sont les effets appliqués à l’impact de l’explosion qui représente la réalité de la mission.
Posée ainsi, cette séquence d’ouverture traduit l’un des tous premiers obstacles que James devra résoudre. Il faudra qu’il s’assure que cela ne se reproduise pas.
Cette scène donne aussi certaines informations concernant Eldridge. Il vivra très mal la mort de Thompson. Un état de conscience qui sera développé par la suite.
Concernant James, la violence de la séquence met en place le contexte particulièrement dangereux. Personne ne peut être en sécurité. Gérer ce type d’événements requiert une aptitude et une patience qui seront des qualités propres à William James.
Vous pourriez bénéficier d’une approche intéressante sur le contexte en lisant ou relisant cet article :
LIEU, EPOQUE & STYLE DE VOTRE MONDE
Dramatica distingue personnage et player. Un player est tout élément dramatique qui ajoute à la signification du récit.
Ici, l’intensité de la situation est mis en exergue par l’accompagnement musical avec une emphase sur des sons graves, longs et étranges.
Cela aide à diriger notre attention sur Eldridge, Thompson et Sanborn. Cela annonce aussi l’imminence de ce qui suit. Ces sons extradiégétiques (hors de la réalité de la scène) peuvent avoir été voulus soit par Mark Boal le scénariste, soit par Kathryn Bigelow.
Dialogues et l’environnement
Il y a beaucoup de dialogues entre Eldridge et Sanborn. Mais lorsque le boucher est introduit dans la scène, tout prend la forme de cris.
C’est la retranscription du chaos qui est recherchée. Les sons se mêlent harmonieusement à l’action. Le souffle lourd de Thompson alors qu’il tente de s’éloigner de la bombe ajoute à l’angoisse de la scène.
Ce sont des sons vraiment naturels destinés à capturer la dure réalité de la guerre.
Un aspect documentaire
Bien qu’il s’agisse d’une narration, le style est celui du documentaire. Les plans sont conçus pour simuler des prises de vue sur le vif. Mouvements saccadés ou par exemple lorsque Eldridge observe les alentours dans son viseur, l’image prend un aspect granulaire.
Ceci est destiné à créer l’effet participatif du lecteur/spectateur dans la scène, à l’impliquer dans ce qu’il s’y passe.
Le style documentaire sert à illustrer l’expérience et les événements réels dans la vie d’un soldat en Iraq. Le cadre sert à la narration mais l’action et les personnages sont autorisés à entrer et sortir de ce cadre au cours de la scène.
Le rythme aussi ajoute à la tension de la séquence
C’est ainsi que les événements se précipitent à l’approche de l’explosion et que celle-ci est montrée en slow motion. Cet effet est destiné non seulement à montrer la violence de l’explosion mais aussi le destin de Thompson.
De plus, la succession des plans rapides et des plans ralentis met l’accent sur les pensées affolées des personnages et partant, du spectateur ainsi que sur l’intensité de l’action.
Les angles de prises de vue ajoutent à l’expérience du spectateur
Les points de vue subjectifs (ceux de Eldridge en particulier) sont destinés à nous mettre à la place des personnages. Nous observons la scène selon la perspective des personnages.
Il est important de comprendre que les auteurs n’ont pas voulu créer un monde, ni recréer un monde existant. Ce sont des simulations certes mais celles d’un monde réel.
L’univers décrit dans le film est utilisé aussi comme contraste avec les Etats-Unis. Le montage, quant à lui, insiste sur le chaos à venir.
Cette séquence d’ouverture est essentielle à tout le récit à venir. L’émotion qui en découle annonce la terrifiante vérité de la guerre. Ainsi que le dilemme de William James partagé entre cette passion qu’il éprouve pour cette activité dangereuse et sa famille restée au pays.
Merci de participer à nos recherches en nous offrant vos dons.