Quelque soit votre manière d’écrire (planifier ou ne pas planifier), le premier jet de votre scénario renfermera une intrigue. Probablement désordonnée mais bien entendu, peut-être pas.
La question à se poser maintenant est en fait de savoir si elle fonctionne c’est-à-dire si elle pourrait fonctionner avec un lecteur.
Fonctionner avec le lecteur consiste à lui offrir une expérience censée le transporter dans l’histoire. L’intrigue est la force motrice de toute votre histoire.
Une intrigue fonctionnelle se reconnaît à quatre questions qui doivent trouver une réponse satisfaisante pour le lecteur :
- De quoi parle l’histoire ?
- Qu’est-ce qu’il s’y passe ?
- Qu’est-ce qui donne l’envie de savoir ce qui va se passer ?
- Qu’est-ce qui rend les personnages si passionnants ?
Ce qui est intéressant avec ces questions est que les personnages s’y dessinent en filigranes. Ce qu’il arrive aux personnages est l’intrigue.
Il est donc très recommandé de se pencher ne serait-ce qu’un peu sur les conventions que l’on applique habituellement aux intrigues.
Une histoire
L’intrigue et la structure sont toutes deux au service d’une seule entité : une histoire. Ecrire une fiction, c’est entraîner un lecteur dans votre univers de faux-semblants auquel le lecteur accordera pourtant de la crédibilité.
Ce monde fictionnel doit procurer au lecteur une expérience différente de ce que son quotidien lui offre chaque jour. C’est au travers d’une expérience que le lecteur est transporté dans ce monde. Une histoire n’est pas de la propagande avec des arguments qui font débat ou des opinions ou des faits qui rappellent par de trop nombreux aspects les propres routines de vie du lecteur ou bien son environnement quotidien.
Cet univers de faux-semblants que nous avons mentionné est l’illusion que la vie se déroule sur la page. Mais ce n’est pas la vie du lecteur, c’est celle de personnages de fiction.
Doit-on vraiment parler d’être de fiction ? Ont-ils vraiment une existence ? En tout cas, ils sont certainement des formes intelligibles capables de susciter en nous toutes sortes d’émotions.
Une intrigue a des fondamentaux
Il existe quelques bases qui, une fois comprises et appliquées, vous aideront à écrire une intrigue solide.
Rien ne remplace la pratique mais les quatre principes suivants pourront être utiles :
Un personnage principal
Mais pas n’importe quel personnage. Il vous faut un personnage convaincant et suffisamment intéressant pour qu’on le suive tout au long de son aventure.
Ce qui ne signifie pas non plus qu’il doit être éminemment sympathique pour emporter l’adhésion du lecteur.
D’ailleurs, nous ne pouvons résister à voir ce qui arrive à un être humain (même s’il est imaginaire) lorsqu’il est dessiné avec toutes les couches psychologiques nécessaires (de manière à en faire un être complexe) et qui fait de sa vie un gâchis sans rémission.
Nous vous conseillons la lecture de
DAVID TROTTIER : LES 10 CLEFS D’UN PERSONNAGE (1)
DAVID TROTTIER : LES 10 CLEFS D’UN PERSONNAGE (2)
Un objectif
Le personnage doit avoir un objectif, une volonté indéfectible, un désir impérieux.
Ce but qu’il s’est fixé (volontairement ou non) est la force motrice de la fiction. Il génère un mouvement incoercible et motive très sérieusement le personnage principal.
Cet objectif est généralement de deux sortes : soit le protagoniste veut obtenir quelque chose, soit il veut fuir quelque chose. Et dans les deux cas, sa détermination est irréversible.
Pour qu’une intrigue soit solide, il est préférable que ce héros n’est qu’un objectif et un seul à poursuivre. Ce qui pose immanquablement la question dramatique :
Réussira-t-il ou non à atteindre son but ?
Si le but du personnage principal est suffisamment crédible, cette question dramatique est un facteur essentiel dans l’intérêt du lecteur qui sera impatient et curieux d’avoir la réponse.
Autrement dit, cette mission que le héros a pris en charge doit être essentielle à son bien-être, à sa survie, à sa santé mentale, à tout ce qui peut interférer avec son devenir (qui est évoqué lors du dénouement). Vous pourriez même envisager la mort du héros si celle-ci est une rédemption. Le symbole est tout autant porteur de sens que l’analogie ou la parabole.
L’idée générale est que le personnage principal devienne une personne meilleure qu’elle ne l’était au début de l’histoire. En fin de compte, cette recherche du bonheur est une finalité dans la construction et de l’intrigue et du personnage.
Une confrontation
Il serait trop facile et de peu d’intérêt pour le lecteur que le personnage principal parvienne sans mal à réussir son objectif. Pour renforcer l’attention du lecteur (donc le lien empathique, condition nécessaire de l’engagement du lecteur dans l’histoire), il faut une confrontation.
Une opposition qu’elle vienne d’autres personnages ou de forces quelconques extérieures (telles la nature, la société, une institution) a pour fonction essentielle d’apporter à l’intrigue sa force vitale.
Alors que l’objectif imprime un mouvement à l’intrigue, l’opposition que rencontre le protagoniste lui insuffle de la vie, un battement.
D’ailleurs, ce que recherche le lecteur est de ressentir un intense engagement émotionnel tout au long de l’histoire. Le conflit est la voie royale pour y parvenir. Les choses ne devraient pas être faciles pour le protagoniste qui devrait avoir quelques obstacles à surmonter avant d’espérer un quelconque soulagement.
Un climax
C’est l’ultime confrontation entre le personnage principal et son antagonisme. Le climax apporte toutes les questions que l’histoire a soulevée et surtout , celle de la question dramatique majeure :
Le héros a t-il réussi ?
Le climax est l’ultime énergie déployée par l’intrigue. Elle doit absolument éviter la frustration du lecteur en le laissant sur sa faim en quelque sorte.
Les possibilités de clore une intrigue par le climax sont nombreuses et toutes ne sont pas des Happy Endings. Certaines pourraient être des métaphores bien que le rapport d’analogie recherché puisse être un peu trop faible pour un climax. Un symbole pourrait mieux fonctionner.
Prenons l’hypothèse que la dernière rencontre entre le héros et le méchant de l’histoire soit une lutte physique. Le héros parvient à défaire l’antagoniste mais ce faisant, ils chutent tous deux dans le vide.
Heureusement, le personnage principal survivra. Sa chute a été amortie par le corps même de son ennemi mortel.
C’est une fin heureuse, certes, mais l’intention était de démontrer une renaissance du héros avec le symbole du vide.
On peut inverser la signification du symbole et ne faire chuter que l’antagoniste. Dans ce cas, c’est une plongée dans les abysses ou l’Enfer, la place naturelle d’un méchant.