Un personnage agit rarement de manière spontanée. Ses gestes, ses paroles, ses attitudes sont souvent marqués par des comportements appris, imités, hérités, qu’il rejoue (ou qu’il tente de rejeter) dans les situations dramatiques.
Nous-mêmes, toi et moi, lecteur/spectateur, nous reproduisons des comportements que nous avons intériorisés parce qu’hérités de notre éducation ou de notre culture. Sartre l’a démontré : nous nous inscrivons dans un rôle social (celui de la mère de famille ou celui de l’amant, par exemple) et puis peut-être aussi qu’un ancien traumatisme nous retient prisonnier dans un même schéma, habituellement douloureux d’ailleurs.
Nous n’innovons pas dans nos comportements au quotidien. C’est, comment dire, des choses que nous mettons en scène comme l’acteur, lui-même représentation d’un aspect de notre condition humaine. Don, dans Mad Men, est constamment dans le jeu. Il se montre séducteur, brillant, mais c’est un comportement qu’il a restauré des années 50, d’un modèle viril, apparemment invulnérable, mais n’est-ce pas pour masquer une misère et sa véritable identité ?
Il y a dissonance entre son être véritable et l’apparence qu’il en donne. C’est toute la tension dramatique de son personnage. Donc, autrice ou auteur, si tu cherches à arrondir le portrait d’un personnage, interroge-toi d’abord sur ce qu’il rejoue sans en avoir pleinement conscience. Cela te permettra d’examiner d’où vient cette étrange restauration : d’un passé traumatique, de son éducation ? Et peut-être même qu’il le rejoue de manière stratégique, car a-t-il une intention ? Que vise-t-il avec cette attitude qui semble le définir ?
Alors, nous penserons au retournement. Quand prend-il conscience qu’il n’est pas lui-même dans ce mensonge qu’il se fait à lui-même ? Après tout, s’il l’aide à traverser la vie et qu’il en est heureux, pourquoi s’en priver ? En revanche, il peut soudain ressentir comme une oppression et chercher à s’en libérer. Mais alors, quel en sera le coût ?
