Story Engineering de Larry Brooks présente le concept des six compétences clés de la narration, essentielles à l’élaboration de récits de qualité. Ces compétences sont conçues comme une boîte à outils complète pour les autrices et les auteurs, chacune ayant son propre ensemble de composants, de listes de contrôle et de critères.
Larry Brooks souligne l’importance de comprendre ces outils les uns par rapport aux autres, en établissant un parallèle entre la narration et le fonctionnement complexe du corps humain, soulignant que, tout comme certains organes sont essentiels à la vie, des éléments narratifs spécifiques ne sont pas à négliger pour assurer le bon fonctionnement d’une œuvre.
Les six compétences de base sont réparties en quatre éléments fondamentaux de l’échafaudage d’une histoire et deux compétences narratives nécessaires à une mise en œuvre efficace. Ce cadre simplifie le processus complexe de la narration en parties gérables, garantissant que chaque aspect de la création du récit est couvert. En comprenant et en appliquant ces compétences, les auteurs et les autrices peuvent édifier des récits solides, compétitifs.
1. Le concept
C’est l’idée initiale qui fait naître l’histoire, une situation intrigante qui promet un voyage passionnant. C’est plus qu’une simple prémisse ; c’est le rebondissement ou le point de vue unique qui fait sortir l’histoire du lot.
2. Le personnage
Essentiel à toute histoire, il nécessite un héros pour lequel la lectrice et le héros peuvent se mobiliser. Cette compétence implique de développer des personnages multidimensionnels qui ont des désirs, des conflits et des arcs dramatiques qui font avancer la narration.
3. Le thème
Ce que l’histoire éclaire sur la vie réelle, distinct du concept. Le thème représente le message sous-jacent ou la morale de l’histoire. Il s’agit de ce dont l’histoire parle vraiment à un niveau plus profond, au-delà de l’intrigue.
4. La structure
La structure est la tessiture qui permet à l’histoire de tenir en un tout. Elle implique la disposition stratégique des points de l’intrigue et des scènes afin de créer un flux narratif satisfaisant.
5. Exécution des scènes
Il s’agit de concevoir des scènes individuelles efficaces et captivantes, chacune jouant un rôle spécifique dans l’avancement de l’intrigue ou le développement des personnages.
6. La voix de l’auteur
Le style unique de l’auteur et de l’autrice et l’utilisation de mots qui donnent vie à l’histoire d’une manière distinctive. C’est la façon dont l’histoire est racontée, le choix spécifique des mots et le ton général qui rendent le récit captivant.
Le concept
Le concept est fondamentalement la source à partir de laquelle toute l’histoire s’abreuve ; c’est l’étincelle ou l’idée initiale qui inspire la création d’un univers narratif. Comprendre et affiner cette compétence essentielle est fondamental car elle prépare le terrain pour que tous les autres éléments de la narration puissent se déployer. Un concept est plus qu’une simple idée ; c’est une prémisse convaincante qui promet une histoire captivante. C’est ce qui différencie votre histoire des autres et la rend unique. Un concept fort combine souvent des éléments familiers d’une manière inattendue, offre une nouvelle perspective ou pose une question qui demande à être explorée. C’est le Et si.. ou l’accroche qui capte l’imagination de l’auteur, de l’autrice et du lecteur/spectateur.
Le concept sert de pilier au développement de l’intrigue. Il guide l’arc narratif, en veillant à ce que chaque moment de l’intrigue, chaque décision des personnages et chaque exploration thématique soient cohérents et soutiennent la prémisse générale. Puisque les personnages sont développés avec leurs propres histoires, motivations et arcs, un concept solide intègre ces éléments de manière transparente, en veillant à ce que les itinéraires des personnages ne soient pas seulement personnels, mais aussi profondément liés à l’exploration du concept.
Un concept bien défini contient intrinsèquement un potentiel thématique. Il ne s’agit pas seulement d’événements qui se produisent, mais de ce que ces événements révèlent de la condition humaine, de la société ou d’un aspect particulier de la vie. Le concept doit inviter à une réflexion plus approfondie, afin que l’histoire résonne auprès du lecteur/spectateur à plusieurs niveaux.
Un concept fort trouve souvent un équilibre entre l’originalité et la familiarité. Il doit offrir quelque chose de nouveau ou une nouvelle approche de thèmes ou d’idées existants, tout en étant suffisamment compréhensible pour que le lecteur/spectateur s’y intéresse.
L’idée de familiarité sera bien mieux compréhensible si nous faisons appel au célèbre empiriste David Hume. Contrairement à d’autres qui pourraient rechercher des idées innées ou des influences divines, David Hume postule que la familiarité naît de l’accumulation d’impressions sensorielles. Imaginez le monde comme une toile vierge sur laquelle l’expérience peint des impressions vivantes. Chaque rencontre nouvelle, chaque vue, chaque son, chaque toucher, laisse sa marque, formant une bibliothèque mentale des rencontres passées.
Lorsque quelque chose de similaire se présente à nouveau, ces impressions passées reviennent spontanément, créant un sentiment de reconnaissance. Telle est l’essence de la familiarité. Mais la familiarité n’est pas simplement un écho passif du passé. Elle façonne activement nos jugements et nos attentes. Lorsque nous rencontrons quelque chose de familier, nous nous appuyons sur nos expériences passées pour anticiper les résultats futurs.
Cela peut s’avérer incroyablement efficace, nous permettant de nous orienter dans le monde avec une relative facilité. Cependant, comme tout outil, la familiarité a ses limites. Tout comme des coups de pinceau répétitifs peuvent ternir une peinture, le recours excessif à la familiarité peut nous rendre aveugles à la nouveauté, à l’innovation, à l’hardiesse.
Nos attentes, façonnées par nos expériences passées, peuvent devenir rigides, entravant notre capacité à percevoir les nuances et à apprécier l’imprévu. C’est pourquoi Hume insiste sur l’importance d’un questionnement constant et d’une ouverture d’esprit.
Si la familiarité est un guide précieux, elle ne doit pas devenir une cage de fer pour l’esprit curieux. De surcroît, nous devons reconnaître la subjectivité de la familiarité. Ce qui est familier pour une personne peut être totalement nouveau pour une autre. Cela souligne le rôle essentiel de l’expérience individuelle dans la formation de notre compréhension du monde. Cela nous rappelle qu’aucune perspective unique ne détient la vérité absolue et qu’un dialogue ouvert entre les différentes expériences est essentiel pour enrichir notre compréhension.
Un engagement émotionnel
Les meilleurs concepts sont ceux qui promettent un engagement émotionnel. Ils posent des dilemmes, des défis ou des mystères que le lecteur et la lectrice se sentent obligés de voir résolus. L’édification d’un concept requiert à la fois une intuition créative et une réflexion stratégique. Il implique un brainstorming, des recherches et un perfectionnement.
En tant que scénariste, vous devez constamment vous demander si votre concept
- offre une perspective unique ou nouvelle.
- offre suffisamment de possibilités de conflit et de développement des personnages.
- a une accroche claire et convaincante qui peut être communiquée de manière succincte.
Si le concept est la base, sa véritable force n’apparaît que lorsqu’il est intégré de manière efficace aux autres compétences de base : le personnage, le thème, la structure de l’histoire, l’exécution des scènes et la voix de l’auteur. Chaque compétence enrichit le concept, en lui ajoutant de la profondeur qui le transforment d’une simple idée en un récit vivant et captivant.
Par essence, le concept n’est pas seulement le point de départ, mais le fil conducteur de toute votre histoire, influençant tous les aspects du processus de narration. À mesure que vous maîtriserez cette compétence, vous constaterez que votre capacité à créer des histoires captivantes et significatives s’améliorera considérablement.
Cette maîtrise, associée à la créativité et à une voix unique, est ce qui permettra à votre travail de se démarquer dans le paysage très encombré de l’écriture de scénarios et de récits.
La voix de l’auteur
Dans Story Engineering, Larry Brooks développe le concept de voix de l’auteur comme l’une des six compétences de base nécessaires à une narration réussie. La voix de l’auteur englobe le style et l’expression uniques qu’une autrice ou un auteur apporte à leur récit. C’est la façon dont l’histoire est racontée, le choix des mots, le rythme des phrases et le ton général qui distinguent le travail d’un auteur de celui d’un autre.
Pour développer votre voix d’auteur, concentrez-vous sur les aspects suivants :
De l’authenticité : Votre voix doit être le reflet fidèle de vos idées, de vos expériences et de votre vision du monde. L’authenticité trouve un écho auprès du lecteur et de la lectrice parce qu’elle provient d’un lieu de vérité et de sincérité.
De la clarté : Si la créativité est essentielle, la clarté garantit que vos idées sont communiquées efficacement. Votre voix ne doit pas obscurcir votre histoire mais l’éclairer, en rendant les émotions et les thèmes complexes accessibles à votre lecteur/spectateur.
De l’émotion : Une voix d’auteur peut transmettre la profondeur émotionnelle de vos personnages et de votre histoire. Il s’agit de choisir des mots et des structures qui évoquent les sentiments souhaités chez votre lecteur/spectateur, afin qu’il s’investisse dans le processus narratif.
De la cohérence : Bien que votre voix doive pouvoir s’adapter à différentes histoires, il doit y avoir une qualité constante qui identifie votre travail. Cela ne signifie pas que toutes vos œuvres se ressemblent, mais plutôt qu’elles portent toutes la marque unique de votre créativité.
De l’innovation : Expérimentez avec votre voix. Les grands récits sont souvent le fruit d’une rupture avec les habitudes et d’une présentation originale des idées. Votre voix peut évoluer au fur et à mesure que vous grandissez en tant qu’autrice et auteur, en reflétant de nouvelles influences et de nouvelles idées.
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