Le personnage principal, celui ou celle sur lequel ou laquelle doit porter l’admiration du lecteur/spectateur, pourrait se présenter en lui offrant une première impression plutôt désagréable. Certes, ce serait voulu par l’autrice et l’auteur à cause que c’est utile à leur discours mais dans ce cas comment faire pour créer et maintenir un lien émotionnel entre le personnage et la lectrice ou le lecteur qui ne soit pas seulement d’indifférence ?
Une raison d’être
S’il est comme il est, c’est parce qu’un personnage se débat avec sa souffrance ou bien il est dans une telle position sociale qu’il est devenu méconnaissable par les effets du pouvoir. C’est un état des lieux du personnage nécessaire pour mettre en place le récit et qui provoque dans le regard de ceux et celles qui l’observent un réel déplaisir (y compris le lecteur/spectateur).
Pourtant, il peut se créer de l’empathie même envers un personnage déplaisant. Il suffit de comprendre pourquoi il est comme il est, quelles ont été les conditions qui ont fait de lui ou d’elle ce qu’ils sont devenus, en somme, qu’est-ce qui existe au fondement de ce personnage ?
Bien sûr, l’autrice et l’auteur doivent se méfier d’eux-mêmes et ne pas trop forcer sur le déplaisir. L’intention est de montrer la rédemption du personnage ou bien sa quête du bonheur, c’est-à-dire ce qui représente pour lui un enjeu ; si les conditions qui ont fait qu’un événement ait pu seulement se produire ne sont pas expliquées au lecteur/spectateur, l’effort de rédemption ne sera pas accepté et seule la première impression de déplaisir demeurera.
Et nous pourrions même envisager le mouvement inverse : Walter White de Breaking Bad est d’abord présenté comme un professeur de chimie aux manières douces qui se met à cuisiner et à vendre de la méthamphétamine après qu’on lui a diagnostiqué un cancer du poumon en phase terminale. Sa motivation initiale est d’assurer l’avenir financier de sa famille après sa mort. Cependant, au fur et à mesure que la série progresse, le personnage de Walter se transforme et son trouble intérieur prend une tournure sombre.
Walter devient de plus en plus avide de pouvoir et impitoyable, ce qui l’amène à prendre des décisions moralement répréhensibles. Il ment, manipule et recourt à la violence, tout en justifiant ses actes par la conviction qu’il le fait pour sa famille. Le lecteur/spectateur peut d’abord compatir à sa situation difficile, mais il a finalement du mal à s’identifier à lui à mesure qu’il devient de plus en plus corrompu sur le plan moral. Ses troubles intérieurs le conduisent sur la voie de la destruction, faisant de lui un personnage antipathique, voire méchant, à la fin de la série.
Une justification
Tant que le niveau de violence du personnage principal peut se justifier, le risque de rompre le lien d’empathie n’est pas trop sérieux. Batman utilise la violence pour lutter contre le chaos et la brutalité provoqués par le Joker. Batman utilise la violence pour mettre fin aux actes de terreur et de violence du Joker, protégeant ainsi les citoyens de Gotham City. Ses actions sont motivées par un sens du devoir qui lui permet d’éviter que le mal ne s’aggrave.
Il y a cependant un aspect dans le caractère de Batman qui limite l’influence de ses actes de violence sur le lecteur/spectateur : il s’efforce de ne pas tuer ses adversaires ou de ne pas leur causer de dommages inutiles. Il met l’accent sur l’utilisation de méthodes non létales et de technologies de pointe pour neutraliser ses ennemis, conservant ainsi un code moral qui le distingue des criminels auxquels il s’oppose. Et nous reconnaissons ce code moral parce que nous y adhérons. Batman pense que ses actions sont nécessaires pour maintenir l’ordre et empêcher les plans anarchiques et destructeurs du Joker de se réaliser. Il représente le symbole de l’espoir et de la justice pour les habitants de Gotham ou dit autrement, le fol espoir d’un auteur.
De surcroît, Batman est confronté à des dilemmes éthiques, tels que le choix entre sauver une vie ou plusieurs, et les conséquences de ses actes. Cette complexité ajoute de la profondeur à son personnage et à la justification de sa violence. Bien que Batman a recours à la violence, le récit explore les implications morales et éthiques de ses actions, ce qui rend son usage de la violence plus nuancé et, dans le contexte du récit, justifiable dans la poursuite de la justice et la protection de vies innocentes.
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