Qu’est-ce qui rend la nécessité si impérieuse ?
Première hypothèse : un sens actif & pratique de la réalité
Répondre à une nécessité impérieuse commence par posséder un sens actif et pratique de la réalité, c’est-à-dire la capacité d’un individu à s’engager dans le monde et à le comprendre tel qu’il existe réellement, en se basant sur des preuves empiriques et des considérations pratiques. Plusieurs notions entrent en jeu.
Il s’agit de percevoir et de comprendre le monde principalement par l’observation directe et l’évidence plutôt que par des croyances subjectives, des vœux pieux ou des théories abstraites. Les personnes qui ont un sens actif et pratique de la réalité s’appuient sur des faits, des données et des expériences tangibles pour former leur compréhension du monde.
Cet état d’esprit comprend la capacité d’analyser les informations de manière critique, de remettre en question les hypothèses et d’évaluer la validité et la fiabilité des sources. Les personnes qui ont ce sens de la réalité sont moins susceptibles d’accepter des affirmations ou des croyances dès l’abord et sont plus enclines à rechercher des preuves et des justifications.
Le sens pratique de la réalité met l’accent sur l’application des connaissances et de la compréhension pour résoudre les problèmes du monde réel et prendre des décisions en connaissance de cause. Il s’agit de reconnaître les implications pratiques de ses croyances et de ses actions et de les adapter pour relever les défis et atteindre les objectifs de la vie réelle.
L’engagement actif dans la réalité implique également la volonté et la capacité d’adapter ses points de vue et ses actions en réponse à de nouvelles informations ou à des circonstances changeantes. Cette capacité d’adaptation garantit que la compréhension de la réalité reste actuelle et pertinente.
Les personnes qui ont un sens actif et pratique de la réalité s’efforcent d’être objectives dans leurs évaluations et leurs jugements. Elles cherchent à minimiser les préjugés et les émotions personnelles qui pourraient fausser leur compréhension du monde et prennent des décisions basées sur des critères objectifs.
Un sens pratique de la réalité implique la capacité d’identifier et de traiter les problèmes de manière efficace. Il comprend la capacité à décomposer des questions complexes en éléments gérables et à élaborer des solutions pratiques basées sur une compréhension claire des facteurs profonds ou implicites.
Avoir un sens pratique de la réalité signifie également avoir des attentes réalistes quant à ce qui peut être réalisé et à la manière dont les choses fonctionnent dans le monde. Cela aide les individus à se fixer des objectifs réalisables et à faire des choix éclairés en fonction des possibilités et des limites réelles auxquelles ils sont confrontés. Avoir un sens actif et pratique de la réalité signifie s’engager dans le monde d’une manière fondée sur l’évidence, la raison et l’aspect pratique.
Cela implique un engagement à comprendre le monde tel qu’il est, plutôt que tel que l’on voudrait qu’il soit, et à utiliser cette compréhension pour relever efficacement les défis de la vie.
Seconde hypothèse : la transcendance
Joseph Campbell, mythologue et auteur américain, est connu pour ses travaux sur l’étude comparative des mythes et l’exploration des thèmes et symboles universels dans diverses mythologies du monde entier. Il a introduit le concept de transcendance en tant que thème central du Hero’s Journey, une structure narrative commune que l’on retrouve dans les mythes et les récits de toutes les cultures.
La transcendance, dans le cadre de Campbell, représente une étape importante du développement personnel et spirituel du héros.
Selon Campbell, le Hero’s Journey, ce parcours héroïque, se compose typiquement de plusieurs étapes, dont l’une est Atonement with the Father (nommée aussi Atonement with the Abyss). Au cours de cette étape, le héros rencontre une force suprême ou transcendante qui représente un niveau supérieur de conscience, de sagesse ou de réalité. Cette rencontre conduit souvent à une transformation profonde et à un sentiment d’unité avec quelque chose de plus grand que soi.
Atonement signifie expiation, réparation, et cette idée, liée à celle du père (Father) ou des abysses (Abyss), repose sur la réconciliation entre le désir et le besoin : le désir, qui est l’issue préférée du héros, et le besoin, qui est l’issue nécessaire de son parcours.
La transcendance, dans le contexte de Campbell, implique de dépasser les limites de l’ego ou du moi individuel et de se connecter à une vérité ou une réalité supérieure et universelle. C’est un moment d’illumination ou d’éveil où le héros réalise que l’existence ne se limite pas au monde ordinaire et banal.
Cette prise de conscience peut conduire à un sentiment d’unité avec l’univers, à une compréhension plus profonde des mystères de la vie et à un sentiment de paix intérieure et d’accomplissement. Campbell, en effet, pensait que les mythes et les récits mettant en scène le thème de la transcendance servaient de représentations symboliques du voyage humain vers l’éveil spirituel et la réalisation de soi. La capacité du héros à transcender son existence ordinaire et à se connecter à une réalité supérieure est un aspect clé de sa transformation héroïque.
Il est important de noter que les idées de Joseph Campbell sur la transcendance sont profondément enracinées dans le contexte de la mythologie et des contes. Bien qu’il ait exploré des thèmes universels dans les mythes, son travail n’est pas nécessairement une prescription pour le développement spirituel ou personnel, mais plutôt un cadre pour comprendre les éléments communs et les archétypes que l’on trouve dans les mythes de différentes cultures.
Chacun peut interpréter et appliquer le concept de transcendance dans son propre contexte spirituel ou philosophique, en fonction de ses croyances et de ses expériences.
L’impérieuse nécessité
La motivation est un élément crucial dans l’écriture d’un scénario, en particulier lorsqu’il s’agit des actions du héros ou de l’héroïne, car elle contribue à rendre l’intrigue et les choix du personnage crédibles et compréhensibles pour le lecteur/spectateur. La motivation fournit une base logique et cohérente aux actions d’un personnage. Lorsque le lecteur/spectateur comprend pourquoi un personnage agit comme il le fait, il lie l’action aux traits de caractère et à la personnalité du personnage, ce qui rend ses actions plus crédibles.
La motivation lie le lecteur/spectateur au personnage sur le plan émotionnel. Lorsqu’il peut comprendre ou plutôt ressentir par empathie les désirs, les objectifs ou les luttes d’un personnage, le lecteur/spectateur s’investit émotionnellement dans le récit.
Cet engagement émotionnel peut conduire à une connexion plus profonde avec le héros ou l’héroïne. Par ailleurs, les motivations d’une héroïne ou d’un héros peuvent souvent entrer en conflit avec celles d’autres personnages (et non seulement l’antagoniste), ce qui crée un conflit et de la tension dramatique. Ce conflit est au cœur de la narration et peut faire avancer l’intrigue, rendant le récit plus captivant.
Pour que le lecteur/spectateur suspende son incrédulité et s’immerge dans l’histoire, il doit croire que les actions du héros et de l’héroïne sont plausibles dans le contexte de l’univers narratif. La motivation aide à combler le fossé entre la fiction et la réalité en faisant en sorte que les choix du personnage semblent rationnels et justifiés.
Un détour par Merleau-Ponty
Maurice Merleau-Ponty, philosophe phénoménologue français, a introduit le concept de retraite subjective dans le cadre de son exploration de la perception humaine et de la relation entre le corps et l’esprit. La notion de retraite subjective est étroitement liée à ses idées sur la perception incarnée et l’expérience vécue du corps.
Dans la philosophie de Merleau-Ponty, le retrait subjectif fait référence à la manière dont notre conscience ou notre perception (conscience et perception signifient ici la même notion) semble se retirer ou s’éloigner de la conscience immédiate de nos propres expériences corporelles.
Il s’agit de l’idée selon laquelle nous ne sommes souvent pas pleinement conscients de la manière dont notre corps interagit avec le monde et de la façon dont nos expériences sensorielles sont interconnectées avec notre sens de soi. Nous avons plutôt tendance à considérer ces expériences comme allant de soi ou à supposer que notre perception est purement objective. Merleau-Ponty a souligné que notre corps n’est pas seulement un objet physique, mais qu’il joue un rôle fondamental dans la formation de notre perception et de notre compréhension du monde.
Ce repli subjectif se produit lorsque nous négligeons l’importance de nos expériences corporelles. Nous faisons souvent l’expérience du monde comme s’il était directement accessible à notre conscience, notre corps et nos expériences sensorielles s’effaçant à l’arrière-plan.
Cela peut conduire à un sentiment de transparence perceptive, où nous ne sommes pas pleinement conscients de la médiation de nos sens. Le retraite subjective consiste à considérer nos expériences perceptives et nos sensations corporelles comme allant de soi, en supposant qu’elles sont simples et sans problème. En réalité, notre perception est façonnée par les capacités de notre corps, le contexte culturel et notre histoire personnelle. Le concept de recul subjectif proposé par Merleau-Ponty encourage les investigations phénoménologiques qui consistent à examiner de plus près nos expériences vécues afin de comprendre comment notre perception est imbriquée dans notre incarnation.
Il estime qu’en procédant ainsi, nous pouvons acquérir une compréhension plus profonde de la nature de la conscience et de la perception humaines. Les idées de Merleau-Ponty remettent en question la notion philosophique traditionnelle d’objectivisme, qui postule qu’il existe une réalité objective indépendante de notre perception. Au contraire, il soutient que notre perception est toujours incarnée et en situation, et que nous ne pouvons pas nous séparer de nos expériences perceptives.
Ainsi, le concept de retraite subjective chez Merleau-Ponty souligne la nécessité de reconnaître le rôle de notre corps et des expériences vécues dans la formation de notre perception du monde. Il souligne l’idée que notre perception n’est pas purement objective, mais qu’elle est profondément liée à nos expériences subjectives et à notre existence incarnée. En reconnaissant ce recul subjectif, nous pouvons développer une compréhension plus nuancée de la conscience humaine et des complexités de la perception.
Identification
Lorsque les motivations du héros et de l’héroïne sont claires et compréhensibles, le lecteur/spectateur est plus susceptible de s’identifier au personnage. Cette identification peut conduire à un lien émotionnel plus fort et à un intérêt dans ce qu’il adviendra à l’héroïne et au héros car la motivation joue souvent un rôle central dans l’arc dramatique de ces personnages qui décrit leur évolution psychologique au cours de leur aventure.
Au fur et à mesure qu’ils poursuivent leurs objectifs et font face à des défis, leurs motivations peuvent évoluer, conduisant à une croissance et à une transformation personnelles. Ce développement du personnage est un aspect fondamental de la narration.
La motivation sert de moteur à l’intrigue. Elle pousse l’héroïne et le héros à aller de l’avant, ce qui entraîne une série d’événements qui font progresser l’intrigue. Sans motivation claire, l’intrigue peut sembler sans but ou artificielle. Même dans des environnements fantastiques ou d’un autre monde, le scénario doit donner une impression de réalisme ou de cohérence interne. La motivation aide à maintenir ce réalisme en ancrant les actions des personnages dans des motivations et des réactions crédibles.
Merci de soutenir nos recherches. Et Merci à notre lecteur qui a guidé notre réflexion.
Lecture difficile mais certainement profitable. J’en profite pour m’interroger sur la manipulation que l’auteur exerce sur les motivations de ses personnages. Il est vrai que tout commence (pour l’auteur) par le choix des traits psychologiques de ses personnages. Ensuite, il doit veiller à ne rien lui faire penser et accomplir qui ne soit en cohérence avec ces traits psychologiques. C’est loin d’être facile.
La question n’était pas facile non plus. Merci de participer.