Chaque récit est d’abord le récit d’une relation. Certes, un personnage se définit lui-même par ses actions. Toutefois, ces actions se produisent dans un contexte défini par une relation. Ainsi, pour sauver la femme qu’il aime, le héros décide de pénétrer dans l’immeuble en flammes.
Cette décision est le fruit de la relation assumée entre lui et cette femme. Ce à quoi aspire un personnage, ce qu’il convoite, ce qu’il aime & comment il aime et de même ce qu’il hait & comment il hait, ses souffrances, ce qu’il tue & ce qu’il sauve, enfin comment & pourquoi change t-il peuvent être expliqués par son passé et peut-être aussi par ce qui est inné en lui.
Seulement la lectrice et le lecteur d’un tel personnage ne peuvent vraiment le comprendre que lorsqu’il le voient et l’entendent interagir avec les autres. On ne peut vraiment éprouver ce par quoi il passe au cours du récit qu’à travers le regard qu’il porte sur les autres & qui lui est retourné par autrui.
Une relation peut exister au début du récit et se créer dans le temps de l’exposition et évoluer car rien n’est vraiment figé. Cette relation qui est un élément dramatique à elle seule accompagne l’évolution personnelle des personnages qui la vivent et peut expliquer leur arc dramatique (ce par quoi ils passent et les font devenir) ou le fait qu’ils ne changent pas (c’est souvent le cas de figure du personnage antagoniste).
Le message du récit
La relation aide à asseoir un thème. Lorsqu’un personnage est convaincu que la relation entre un homme et une femme ne peut être d’amitié (Lorsque Harry rencontre Sally) et qu’il s’aperçoit qu’il aime sa meilleure amie, c’est toute la relation entre Harry et Sally qui porte ce thème.
Une relation est un lien entre deux ou plusieurs concepts, objets ou personnes. Ce lien peut être d’amour, d’amitié ou de haine. La relation peut décrire le sentiment & l’émotion d’une jalousie, d’envie ou de répugnance entre un protagoniste et son antagonisme.
Quelle que soit la relation, elle sera définie en amont car il faut la comprendre dès le début du récit afin de créer des espoirs et peurs associés au développement de la relation et à sa résolution.
La résolution peut être bénéfique : deux étrangers que tout sépare et qui doivent s’associer pour les besoins de l’intrigue peuvent découvrir mutuellement, par ce par quoi ils passent dans le cours de l’intrigue, que leurs motivations est précisément ce qui les rapprochent. En revanche, la relation peut évoluer en un mépris profond et être la source d’une destruction de l’autre.
Il est important d’explorer en profondeur le personnage et ses relations. L’intrigue en dépend et en est aussi le support. Le récit tout entier a besoin d’une structure afin d’être cohérent mais pour le lecteur/spectateur, elle est totalement invisible.
En revanche, il aspire à un lien émotionnel (qui pourrait lui manquer dans la vraie vie) et le trouve auprès des personnages. Ce sera donc avec un peu de psychologie que l’autrice et l’auteur parviendront à unir un personnage & le lecteur/spectateur.
L’arc dramatique d’un personnage, c’est-à-dire les étapes par lesquels il passe et qui sont autant d’états psychologiques qui démontrent qu’il est devenu autre au cours de l’intrigue, est une approche nécessaire de l’élaboration d’un personnage. Même lorsque le personnage est figé dans un état psychologique donné, cela aide à définir sa fonction comme chez l’antagoniste par exemple.
Deux univers coexistent chez un personnage (un personnage est une imitation d’un être bien réel) : extérieur & intérieur. L’extérieur est l’espace & le temps dans lesquels se meut le personnage, où il agit, réagit & où l’interaction est considérable. Actions & dialogue sont les constituants de ce monde extérieur.
Puis il y a l’intimité d’un personnage, ce qu’il éprouve. C’est-à-dire pour la lectrice et le lecteur, ce seront des choses invisibles mais dont ils percevront des signes, des indices qu’ils interpréteront (ce sera leur manière de participer à l’histoire, à ce qu’il s’y passe par un lien empathique ou tout au moins sympathique).
En somme, il y a une lecture sous-jacente aux apparences ou à l’intention que l’on croit deviner chez un personnage. Cette interprétation est aussi guidée par l’auteur et l’autrice car chaque personnage (tout comme dans la réalité) possède un point de vue singulier sur le monde. Il existe autant de regards que de personnages.
L’archétype
Il est possible sans nuire à sa créativité d’utiliser les archétypes pour définir un personnage. Un archétype est une structure singulière qui supporte des comportements communs et des psychés qui s’appliquent à des catégories d’individus. Ensuite, il suffit de tordre un peu un archétype, de lui ôter ou de lui ajouter quelques traits de personnalité afin de le différencier des autres personnages.
Il sera bénéfique de s’interroger sur ses personnages comme par exemple le monde dans lequel il a été éduqué. Ce questionnement pourrait ne pas servir l’intrigue mais sur le plan de la connaissance intime avec un personnage, il s’avère indispensable.
Notre esprit humain est la clef pour inventer un personnage. Il suffit d’observer ses propres interactions avec autrui, d’être curieux à propos de soi, des autres et de tenter de comprendre ou d’analyser nos relations aux autres. Le fait social est un critère important de l’évolution de l’esprit humain. A chaque époque, ses propres notions de dévorer ou d’être dévoré : actif ou passif, c’est déjà un élément de caractérisation.
Chaque personnage que nous développons est en quelque sorte une projection ou un reflet de nous-mêmes. En travaillant sur nos propres récits, nous travaillons également sur notre soi.
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Com un peu hors sujet (quoi que) : l’ultime version de SCENARIOPOLE vient de disparaître…
C’était ici : https://www.scenariopole.fr/ et le site est désormais inaccessible.
Une occasion de remercier ces deux sources de grande qualité : SCENARMAG et SCENARIOPOLE, qui à elles deux représentent (représentaient pour Scenariopole) à peu près 80% du contenu de qualité exploitable sur internet (bien placé pour le savoir, ayant passé 3 ans depuis 2020 à récupérer tout ce qui y est lisible et téléchargeable en tous formats, scenariopole inclus) : on obtient ainsi, après recoupements, classement et tri (pour éliminer les éventuelles bêtises de certains sites) une encyclopédie d’une évidente utilité pratique.
A signaler aussi une autre source peu connue mais également d’un grand intérêt : https://lelivreduscenario.com/
Ce n’est pas gratuit mais ayant ignominieusement^^ fayoté avec l’auteur, me suis vu offrir un exemplaire gratos et ça vaut vraiment la peine car extrêmement complet (attention : c’est construit comme un cours de fac, au lecteur donc de faire comme un étudiant ses petites fiches pour bien profiter de cet enseignement).
A noter également, en mode gratuit : https://cineuropa.org/Files/2016/03/24/1458839706188.pdf
Enfin, pour revenir sur SCENARMAG, la seule critique qu’on puisse faire à l’ami Williams est de ne pas classer suffisamment les fabuleuses richesses de son site. S’il pouvait voir ce que donnent ses contenus de scenarmag synthétisés, classés et triés avec esprit de système dans des fichiers word thématiques (je me suis tapé tout le site depuis le début sauf la partie Dramatica qui ne m’inspire pas vraiment car elle prive du – grand – plaisir de la gamberge), il en serait vert de jalousie^^. En lisant scenarmag régulièrement, on a parfois l’impression que ces contenus se répètent indéfiniment (par exemple les RELATIONS ont déjà été traitées plusieurs fois), mais c’est en recoupant tous les articles sur un même sujet (ce qui implique un dégraissage des inévitables redites au fil des ans) qu’on découvre la profondeur et l’exploitabilité pratique de la bestiole : absolument inestimable pour un scénariste, sans même parler des formateurs de tous poils qui viennent allégrement picorer (c’est toujours amusant, pour qui a épluché SCENARIOPOLE et SCENARMAG à fond, de retrouver ça et là dans les cours de certaines écoles – et pas les moins prestigieuses…^^ – des fragments de ces deux sources un poil « ré-arrangés » à la sauce du formateur…)
Bonsoir. Merci pour ces références hyper-utiles.