Les dialogues créent de l’espace sur la page, ce qui non seulement facilite la lecture mais offre aussi une certaine esthétique. Surtout, ils donnent vie aux personnages, ce qui est émotionnellement attirant. Nous sommes beaucoup plus intéressés par le contexte d’une histoire quand il est présenté à travers une scène de dialogue. Le dialogue révèle les motivations des personnages et leurs intentions opposées. Les mots prononcés permettent au lecteur/spectateur de savoir où se situent les personnages intérieurement et créent du suspense pour la suite du récit.
Le dialogue comme approche
C’est par le dialogue que nous introduisons nos personnages auprès de la lectrice et du lecteur. Le dialogue combiné aux expressions faciales et au langage du corps révèle qui est ce personnage qui parle. C’est comme dans la vraie vie, nous approchons l’autre par le moyen de la parole.
Nous interagissons par le dialogue plus que tout autre moyen. Les mots nous permettent de juger autrui, ou du moins d’interpréter autrui avec plus ou moins de justesse. Ainsi en est-il du lecteur/spectateur qui éprouve une sympathie ou une antipathie d’une manière sensible, par ce qu’il voit et entend d’un personnage. Et ses sens peuvent le tromper car il généralise un comportement qui n’est peut-être pas la vérité du personnage.
Autrices et auteurs ont le pouvoir d’évoquer chez le lecteur/spectateur des sentiments positifs ou négatifs envers un personnage en utilisant la puissance des mots qu’ils font prononcer à leurs personnages.
Le dialogue s’ajoute à l’impression autant que l’apparence. Un personnage qui cherche ses mots, qui semble peser chacun des mots qu’il prononce pourrait manquer de confiance en lui, ou bien être socialement mal à l’aise ou bien encore, cela pourrait traduire un état dépressif. Le dialogue révèle autant qu’une tenue vestimentaire.
Chacun des personnages présent dans un récit a une raison particulière de l’être. Il a une motivation, une intention. Considérons qu’un personnage possède un mobile et un motif pour ce qu’il fait. Le mobile est la cause de ses agissements. Il est motivé à agir.
S’il agit, c’est selon un motif. Il veut quelque chose. Une force impalpable est mise en action et en mouvement dans une volonté que l’on peut réduire (pour conserver au récit son aspect divertissant) à une passion. Dans ce cas, la passion explique l’action.
D’ailleurs, cet aspect passionné du personnage peut être établi lors de l’élaboration de sa personnalité. Il semble que les personnages les plus fascinants soient ceux dont on peut déterminer les passions qui motivent leurs comportements. On a ainsi plus de choses à dire qu’une simple énumération d’événements.
Par exemple, ce personnage qui participe à un tournoi, le fait-il vraiment pour remporter un prix ? Ou ne serait-ce pas plutôt parce qu’il veut prouver à son père qu’il est bien plus digne que celui-ci pense de lui. Cet autre personnage qui se plaint qu’on critique son comportement, est-ce que, suivant qu’on est autrice ou auteur, nous cherchons à dire l’injustice qui s’abat sur lui ou bien plutôt l’importance que l’image que ce personnage renvoie a pour lui ?
Derrière chaque parole, il y a une intention masquée, un sous-texte diront certains. Car à chaque fois qu’un personnage ouvre la bouche, il énonce une vérité sur lui-même. La manière de faire, c’est-à-dire un comportement, dénonce certains aspects du personnage ; par exemple, un personnage qui n’a pas fait le deuil d’un être aimé pourrait avoir un comportement de laisser-aller plus ou moins accepté par son entourage.
Ce que nous percevons dès l’abord de ce personnage, c’est cette nonchalance parce qu’une manière d’être est quelque chose d’extérieur, qui traduit une réalité plus profonde du personnage. Mais l’effet recherché sur le lecteur/spectateur, ce qu’est ce personnage, ce qui fait qu’il est ce qu’il est, sera donné par les dialogues.
Dialogues comme révélation
Les dialogues nous révèlent les motifs cachés. Si notre personnage adopte une nonchalance exaspérante, peut-être est-ce causé par une vengeance inassouvie. La parole dévoile les motifs, ce qui explique un comportement.
Seulement un personnage n’admettra jamais ses véritables motivations dans une conversation avec autrui. Souvent parce qu’il ignore lui-même ce qui le fait véritablement agir. Alors si la parole d’un personnage ne peut expliquer les raisons qui le font agir, parfois certaines scènes où il n’est pas présent et parce qu’il est nécessaire qu’à ce moment soit connu du lecteur/spectateur certaines motivations, deux personnages peuvent parler entre eux de cet autre personnage et nous communiquer, à nous lectrices et lecteurs, des informations essentielles.
