APPROCHES STRUCTURELLES – 3

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Un grand nombre d’auteurs et d’autrices reconnaissent que tout récit est structuré. Une structure ordonne les événements. Elle permet aux uns de garder le contrôle sur ce qu’ils racontent, aux autres de construire une histoire qui les satisfait (et qui intéresse aussi lectrices et lecteurs).

Il faut d’abord se rappeler que la structure concerne la forme et non le contenu. Il s’agit de la nature des événements, du moment où ils se produisent et de la manière dont ils modifient la situation dramatique. Le qui, le quoi, le et le pourquoi de ces événements appartiennent au contenu, c’est-à-dire la substance qui remplit le récipient structurel.

La structure et le contenu sont largement indépendants. Cependant, la souple nature de la narration permet à ces deux éléments de s’adapter l’un à l’autre, c’est-à-dire que le contenu peut être façonné pour répondre aux besoins de la structure, et vice versa afin de créer l’apparence d’une unité.

Par conséquent, n’importe quelle prémisse dans n’importe quel genre peut potentiellement être exécutée à travers la même structure. Étant donné que le lecteur/spectateur se concentre sur le contenu d’une histoire et rarement, voire jamais, sur la structure sous-jacente, les similitudes structurelles entre les œuvres passent continuellement inaperçues y compris par les conteurs qui les créent.

L’ordre du monde

Pourquoi ce rituel d’une sorte de descente aux Enfers et de retour tout empli d’une nouvelle espérance ? Pourquoi un récit doit-il contenir certains éléments, dans un certain ordre, avant que le lecteur/spectateur ne le reconnaisse comme un récit ?
Parce que notre société, nous rappelle Dan Harmon, chaque esprit humain qui la compose et toute la vie elle-même ont un rythme, et lorsque vous jouez dans ce rythme, il résonne.

structureL’univers qui nous entoure se meurt, passant d’un état de haute énergie à un état de basse énergie. Sur Terre, cependant, les choses ont tendance à évoluer dans une direction opposée. Les œufs se transforment en poulets ; les gens se transforment en plus de gens ; la chair guérit ; quelques idiots deviennent plus intelligents, et la planète, autrefois froide et vide, est maintenant si pleine de vie qu’il est impossible de laisser notre pain à l’air libre. Comment la vie a réussi à tromper un univers mourant comme celui-ci ?

Cette créature planétaire connue sous le nom de Vie sur Terre a pu croître et prospérer grâce à une course aux plus forts évolutive entre les différentes parties d’elle-même. Figurativement, les parties les plus avancées de la vie dévorent les parties les moins avancées, devenant ainsi plus abondantes jusqu’à ce qu’une partie plus avancée encore les consomme.

C’est ainsi que toute vie progresse et s’étend. La bataille permanente entre dévoreurs et dévorés est à l’origine de cette arme biologique de pointe qu’on nomme un cerveau, et elle pourrait même conduire un jour les humains à se jeter, comme des spores, sur des planètes mortes et à ramener ces planètes à la vie.

Pour vous et moi, consciemment, la mort peut être une déception, mais pour Mère Gaia, pour la vie elle-même, inconsciemment, elle est absolument essentielle, c’est 50% de la façon dont les choses se font.

L’humain

structureLa conscience (conscious) est un lieu agréable et familier. Mais l’inconscient (unconscious) est plus archaïque, plus sombre et beaucoup, beaucoup plus effrayant. Nous appelons ce sous-sol de l’esprit comme notre inconscient.

L’inconscient est exactement ce qu’il semble être : C’est ce à quoi vous ne pensez pas, ne voulez pas ou ne pouvez pas penser. Freud et Jung ont leurs visions singulières de cet inconscient. Et même s’il contient des énergies vitales, c’est un endroit primitif, puant et effrayant et il n’est pas étonnant que, si on a le choix, on ne s’y attarde pas.

Dans la mesure où nous gardons la porte du sous-sol fermée, toute la maison devient instable. Les créatures d’en bas deviennent plus bruyantes et le type d’en haut (votre ego) essaie de couvrir le bruit par un comportement névrotique.

Pour certains, la porte du sous-sol peut finir par sortir de ses gonds et les créatures visqueuses et primitives des profondeurs peuvent devenir des partenaires de jeu, précise Dan Harmon. Vous pouvez appeler cela une dépression nerveuse ou psychotique, peu importe. Le fait est que les incursions occasionnelles de l’ego dans l’inconscient, par le biais de la thérapie, de la méditation, de la confession, du sexe, de la violence ou.. d’une bonne histoire, maintiennent la conscience en état de marche.

La société

Toute société est un macrocosme d’individus. Dan Harmon ne s’embarrasse pas de conscience collective : à l’étage, l’ordre ; au sous-sol, le chaos.

Alors que la santé mentale d’un individu dépend de la descente et du retour réguliers de l’ego vers et depuis l’inconscient, la longévité d’une société dépend de personnes réelles voyageant dans l’inconnu et revenant avec des idées.

Dans leur forme la plus dramatique qui demande effort, courage et refus, ces personnes sont appelées des héros, mais chaque jour, la société est réalimentée par des millions de personnes qui plongent dans l’obscurité et en ressortent avec quelque chose de nouveau (ou d’oublié) : des scientifiques, des peintres, des enseignants, des danseurs, des acteurs, des prêtres, des athlètes, des architectes et, surtout, des autrices et des auteurs.

Les sociétés ne fonctionnent pas tout à fait ainsi parce qu’au bout du compte, elles meurent aussi. Il existe une compétition entre les sociétés : les perdantes sont dévorées et les gagnantes se reproduisent comme le ferait un organisme qui, en absorbant d’autres organismes, voit son état changé.

Dan Harmon est persuadé que, tout comme l’individu, les sociétés deviennent névrosées et peuvent s’effondrer si elles font l’erreur de lutter contre leur inconscient collectif. Notre peur de l’inconnu crée encore plus d’inconnus et de peurs. Un tel comportement serait diagnostiqué chez l’individu comme symptomatique. On n’a jamais eu autant besoin de héros et ils n’ont jamais été aussi rares.

structureDan Harmon perçoit des rythmes : qu’ils soient biologiques (le cycle de la vie et de la mort), dans la psychologie de l’humain (les nécessaires allers-retours entre la conscience et l’inconscient) ou dans les sociétés elles-mêmes qui répètent le cycle immuable de l’ordre et du chaos.
Quoi qu’il en soit, l’évolution sociale suivra son immuable destinée entre ordre et chaos. Nous le savons tous. Nous avons déjà cette compréhension instinctive du monde dans nos esprits inconscients.

Une résonance

Comprendre ces trois rythmes qui animent nos vies, c’est permettre aux lectrices et lecteurs de résonner avec le récit. Il envoie l’ego de votre audience dans un bref voyage vers l’inconscient et l’en fait revenir. Lectrices et lecteurs ont un goût instinctif pour cette excursion.

C’est ainsi que Dan Harmon structure un récit selon le Story Circle (sa notion de cercle correspond à ces rythmes ou cycles). Notre société, chaque esprit humain qui la constitue et la vie elle-même possèdent un rythme. Lorsque l’autrice et l’auteur s’accordent à ce rythme, alors le récit résonnera.

Le Story Circle vu autrement

structure

1- You : ESTABLISH A PROTAGONIST

You signifie tu mais ici, il est question d’établir un sujet, c’est-à-dire un je. Tant que ce je n’ est pas fixé dans l’esprit de la lectrice et du lecteur, ceux-ci ne sont pas encore amarrés à votre récit. L’aquilon de l’indifférence pourrait les éloigner de vos rivages.

Qui allons-nous être ? Tôt ou tard, nous devons être quelqu’un, car si nous ne sommes pas à l’intérieur d’un personnage, alors nous ne sommes pas à l’intérieur de l’histoire. Comment faire entrer lectrice et lecteur dans un personnage ? Il suffit d’en montrer un, dit Dan Harmon. Il faudra faire des efforts pour que le lecteur/spectateur ne s’imprègne pas du personnage car qu’il soit un raton laveur, un SDF ou le Président, on ne peut empêcher lecteur et lectrice de s’identifier à lui ou à elle jusqu’à ce que le lecteur ou la lectrice ait un meilleur choix.

Peut-être pour retarder le phénomène d’identification, le personnage principal n’apparaît pas dans le prologue. S’il y a plusieurs personnages dans une scène, donc plusieurs possibilités d’identification, le lecteur/spectateur choisit le personnage qu’il reconnaît le plus proche de lui.
Dans le doute, il suit ses passions. Si un raton laveur est poursuivi par un ours, nous sommes le raton laveur. Dans une salle pleine d’ambassadeurs, si le Président entre et trébuche alors nous sommes le Président. Quand vous vous sentez désolé pour quelqu’un ou que ce quelqu’un suscite en vous une émotion, une passion quelconque, vous utilisez la même partie de votre cerveau que vous utilisez pour vous identifier à lui.

Beaucoup d’histoires modernes nous font passer d’un personnage à l’autre au début, jusqu’à ce que nous nous installions confortablement dans l’un d’entre eux. Le changement de personnage peut être efficace, mais s’il représente plus de 25 % de l’ensemble de votre récit, vous allez perdre votre audience.
Comme tout adhésif, notre sentiment d’identité s’affaiblit un peu chaque fois qu’il est changé ou testé. Plus longtemps il a été collé sur quelque chose, plus il sera déstabilisant pour le lecteur et la lectrice de l’arracher et de le coller sur quelqu’un d’autre.

Ce que conseille Dan Harmon pour situer ce je dans l’esprit du lecteur/spectateur et cela fonctionne jusqu’au niveau de la scène (en laquelle il y a un protagoniste qui peut ne pas être le personnage principal), est que ce je agisse comme le ferait ce lecteur/spectateur s’il se trouvait dans une situation similaire.

2 – Need : SOMETHING AIN’T QUITE RIGHT

Le voyage débute et il ne sera pas facile. C’est une évidence que le drame est ainsi fait. C’est là que nous démontrons que quelque chose est déséquilibré dans l’univers, quelle que soit la taille de cet univers.

S’il s’agit d’une histoire de guerre entre la Terre et Mars, c’est le bon moment pour montrer ces vaisseaux martiens qui se dirigent vers notre paisible planète. D’un autre côté, s’il s’agit d’une comédie romantique, peut-être que notre héroïne est à un dîner d’amoureux qui se passe mal. Notez à travers ces exemples que Dan Harmon use ouvertement du In Media Res. C’est-à-dire lorsque les choses nous sont montrées, elles sont déjà en cours. Nous sommes aussitôt invités dans l’action.

On nous présente l’idée que les choses ne sont pas parfaites. Elles pourraient être meilleures. C’est là qu’un personnage se demande pourquoi il ne peut pas être plus cool, plus riche, plus rapide ou meilleur amant. Ce souhait sera exaucé d’une manière inattendue pour le personnage.

C’est le moment du Call to adventure qui est amené par un messager (le Herald de Joseph Campbell) par exemple. Ce messager peut prendre n’importe quelle forme selon les exigences du récit : une lettre, un animal, une catastrophe naturelle..

Souvent, le protagoniste (ou personnage principal) refuse l’appel à l’aventure. Il ne souhaite pas franchir le seuil vers l’étape suivante : il est bien comme il est, croit-il. Ce Refusal of the call n’est pas un ingrédient nécessaire, c’est juste une autre astuce souvent utilisée pour nous maintenir dans une identité. Nous avons tous peur du changement : personnes réelles ou personnages de fiction.
Imaginons notre personnage au volant de sa voiture par une nuit pluvieuse en rase campagne. C’est la nuit et l’un de ces maudits pneus décide d’éclater. Le personnage parvient à se garer sur le côté de la route : il ne peut pas refuser l’appel à l’aventure qui commence maintenant et que se lit de la peur sur son visage alors qu’il observe quelque chose à travers la vitre de sa portière.

3 – Go : CROSSING THE THRESHOLD

Cette troisième étape est ce qui permet de répondre à la question : de quoi parle votre histoire ? Une femme fuit un cyborg tueur mais c’est au moment où elle commence à le faire qui compte et c’est ce que décrit cette troisième étape. Si votre histoire parle d’un amour, c’est peut-être le moment où notre héros pose pour la première fois les yeux sur l’objet de son désir, précisément lorsque l’objet devient désir.

Mais si notre protagoniste est lui-même l’objet d’une dangereuse obsession, le désir de l’autre n’est peut-être que la seconde étape et le franchissement du seuil (Crossing the threshold) se produit lorsque l’obsession se manifeste et que le protagoniste prend conscience qu’il lui faut y répondre. S’il s’agit d’une histoire de passage à l’âge adulte ou d’un parcours initiatique, ce pourrait être le premier baiser ou le premier rasage et s’il s’agit d’un film d’horreur, c’est le premier meurtre ou la découverte d’un cadavre.

La moitié supérieure du Story Circle est le monde ordinaire (Ordinary World) ; la moitié inférieure est ce monde spécial (Special World) que le héros ou l’héroïne doivent découvrir et affronter parce que les épreuves qui les attendent n’ont aucune commune mesure avec ce à quoi ils ont été habitués jusqu’à présent.

  1. Le protagoniste est le maire d’un petit village.
  2. D’étranges morsures sur des cadavres d’animaux sont découvertes.
  3. Preuve est faite que le coupable est un loup-garou.

Pour Dan Harmon, c’est le moment où l’on commence l’exploration de son inconscient (Unconscious). Par exemple, le héros est un jeune homme suicidaire ; il décide de voir un psy (il franchit le seuil) et nous allons tenter de comprendre pourquoi il a ce désir de mourir.

Peu importe que la portée de votre histoire soit étendue ou non, ce qui compte c’est l’importance du contraste entre ces mondes. L’aventure, quelle que soit sa taille ou sa subtilité, a commencé. Le protagoniste devra se lancer dans quelque chose qu’il n’a jamais fait.

4 – Search : THE ROAD OF TRIALS

Cette étape est le moment des épreuves (The road of trials). Dan Harmon considère que le mentor qui apprend les rudiments du nouveau monde au héros ou à l’héroïne afin de les initier aux dangers qu’ils devront bientôt affronter est une perte de temps.
L’idée de cette partie du Story Circle est que notre protagoniste a été jeté à l’eau et qu’il doit maintenant nager ou couler.

Dans Le héros aux mille visages, Campbell évoque en fait l’image d’un tube digestif, décomposant le héros, le débarrassant de ses névroses, le dépouillant de sa peur et de son désir. Il n’y a pas de place pour les foutaises dans le sous-sol de l’inconscient. Aucun artifice ne peut aider le protagoniste. Le but ici est devenu d’une simplicité rafraîchissante et effrayante. Nous nous dirigeons vers le niveau le plus profond de l’inconscient, et nous ne pouvons pas l’atteindre encombrés de toutes ces choses que nous pensions être importantes.

La route des épreuves (Road of the trials) est ce chemin personnel qui consiste à nous dépouiller de l’image que nous renvoyons aux autres, de nous débarrasser du voile de nos illusions et de chercher à nous assumer dans la plénitude de notre être.

5 – Find : MEETING WITH THE GODDESS

Afin de mieux comprendre cette étape, je vous conseille la lecture de l’article sur l’archétype de la mère.

L’étape précédente prépare le héros ou l’héroïne en devenir avec cette rencontre avec eux-mêmes. Selon Campbell, le héros peut rencontrer sur sa route une figure féminine puissante avec laquelle il trouvera une unité et un lien quelconque. La déesse (Goddess) peut être un être mystique ou surnaturel ou bien une femme ordinaire avec laquelle le héros gagne en soutien et en synergie.

Dans La Guerre des étoiles, Luke rencontre Leia, une figure de princesse à la fois énigmatique et dynamique. Lorsque Luke découvre que Leia est sa sœur, bien que le sentiment amoureux soit perdu, il est remplacé par un lien de parenté indéfectible. Dans Le Seigneur des Anneaux, Frodon rencontre la grande elfe Galadriel, qui lui donne un gage et lui montre un avenir possible.

La déesse représente le côté féminin du héros (son anima et pour une héroïne, son animus) qui, s’il peut s’unir à cet aspect de lui-même ou d’elle-même, le rendra entier. L’union avec la déesse peut indiquer un amour inconditionnel et parfait.
S’ils s’assemblent, le héros et son autre moitié forment la syzygie du couple divin ou le mariage sacré d’une union d’âmes, et le héros acquiert ainsi un plus grand pouvoir.

Dans l’histoire mythologique, l’une des représentations les plus anciennes est l’histoire grecque de la mère terre Rhéa qui sauve l’enfant Zeus de son père Titan, Kronos. La mère de la terre apparaît également dans de nombreuses cultures et représente l’incarnation vivante de la planète terre.
La figure maternelle symbolise la création, la naissance et l’éducation et, dans la religion chrétienne, Marie occupe une position particulière. Lorsque le héros est une femme, il peut s’agir d’une inversion, celle-ci rencontrant un Dieu qui représente son animus.

Pour Syd Field, cette étape correspond au point médian. Sur le Story Circle, l’étape 5. Get what they desired est situé à un pivot du récit. Imaginez que votre protagoniste a commencé au sommet et a dégringolé jusqu’ici. C’est ici que la tendance naturelle de l’univers a entraîné votre protagoniste, et durant un moment qui dépend des exigences de l’histoire, nous faisons l’expérience de l’apesanteur.
Tout est possible ici. C’est le moment des grandes révélations et de la vulnérabilité la plus totale. Si vous écrivez un thriller par exemple, cette étape sera le lieu d’un rebondissement, et d’un rebondissement fort.

Dan Harmon considère cette étape du Story Circle comme un autre seuil à franchir. Car il y a un choix à faire et de cette décision dépend la remontée.

Déesse est utilisée par métonymie pour désigner un moment de vérité comme par exemple l’aveu par le personnage d’un fait qu’il croit honteux comme d’avoir perdu son emploi. La déesse représente alors une libération. Elle peut être un geste, une idée, un objet, une destination.
La déesse illustre dans le concret l’effort d’un personnage qui se livre corps et âme dans la dénonciation de ce monstre qu’il porte en lui.

Dans Die Hard, John McClane, après avoir couru sur du verre brisé, est assis dans une salle de bains et baigne ses pieds ensanglantés dans un lavabo. C’est à ce moment qu’il réalise enfin la véritable étendue de son amour pour sa femme, et ce qu’il a fait de mal dans leur mariage.

  1. In a zone of confort – You : Establish the protagonist
    John McClane..
  2. They desire something – Need : Something ain’t quite right
    est un être obstiné et bien qu’il le sache, il ne peut se corriger.
  3. Enter an unfamiliar situation – Go : Crossing the threshold
    Sa femme dont il est maintenant séparé est prise en otage.
  4. Adapt to the situation – Search : The road of trials
    Après maintes difficultés, il se procure un talkie-walkie : cet objet est nécessaire à McClane pour que l’intrigue et le Story Circle puissent continuer. Mais cet objet n’est pas fourni par la providence : depuis l’introduction des méchants dans le récit, nous savons qu’ils communiquent par talkie-walkie.
  5. Get what they desired – Find : Meeting with the goddess
    McClane comprend enfin ce qu’il lui manque dans sa vie. Avec le talkie-walkie, il fait passer un message à sa femme par l’intermédiaire de son homologue bienveillant, heureux en ménage, mais hésitant avec les armes : « Elle m’a entendu dire ‘je t’aime’ des milliers de fois.. mais elle ne m’a jamais entendu dire ‘je suis désolé’.« 

C’est un tournant majeur du récit. Tout ce qu’il s’est passé jusqu’à maintenant dans ce fragment de vie d’un personnage mène à cette vérité personnelle qu’il est enfin capable de formuler. C’est un des thèmes majeurs du récit.

Dan Harmon considère aussi que les étapes qui se font face sont dans une relation d’opposition ; elles ne s’éclairent pas mutuellement, elles se confrontent. Ainsi, l’étape 5, Meeting with the goddess, s’oppose à l’étape 1, la zone de confort, In a zone of confort, durant laquelle le personnage principal nous est exposé dans sa singularité.

Lorsqu’il atteint cette cinquième étape, le personnage principal a tendance à vouloir y rester. Mais il ne le peut. Le désespoir est un puissant aiguillon et c’est ainsi qu’au-delà de cette cinquième étape, le mouvement ascendant est organisé autour de la volonté du héros ou de l’héroïne.
Le personnage principal ne peut demeurer parmi les navires naufragés ayant succombé au chant des sirènes. Ce serait une condition qui lui ferait perdre son statut de héroïne ou de héros.

Voyez comme Dan Harmon ordonne son cycle :
en 1), ce sont les bras confortant et rassurant de la mère mais en 2) nous sommes arrachés à cette douce étreinte par l’archétype du père qui soulève en nous une certaine urgence à changer. Le besoin, le désir, l’absence d’accomplissement, qu’ils viennent de l’intérieur ou de l’extérieur, nous ont attirés vers 3) et nous ont fait franchir un seuil vers l’inconnu.

Et nous concrétisons 4) en 5).
En conséquence, 5) ne peut être un fait mineur et est bien une étape cruciale du cheminement du héros ou de l’héroïne.

6 – Take : MEET YOUR MAKER

Dan Harmon tient compte de la symétrie qu’offre un cercle. Ainsi, la remontée entretient de nécessaires références au parcours vers le bas du personnage principal. Alors que les étapes 1) et 5) sont essentiellement féminines, maternelles et comportent des moments de vulnérabilité, les étapes 2) et 6) sont fortement masculines, paternelles, proactives et ce, qu’il s’agisse d’un héros ou d’une héroïne. Ce qu’il se produit à l’étape 2) est véritablement l’élément déclencheur qui engendre les étapes successives.

Au sortir de l’étape précédente, les illusions se sont grandement dissipées. Dan Harmon ose l’allégorie que cette étape 6 est la rencontre avec son créateur, s’apercevoir qu’il est mauvais et du même coup comprendre qu’on ne peut le détruire.

Cette sixième partie concerne les conséquences. Le protagoniste vient de passer le point médian de l’histoire, il a mûri et mué et a rencontré la Déesse. Maintenant, il doit retourner dans le monde ordinaire. Mais un prix doit être payé pour cette nouvelle compréhension du monde et surtout de lui-même.

Car cette découverte ne peut être gratuite. Un sacrifice s’impose. À mi-parcours (ou peu après), le héros découvre soit qu’il y avait une dimension, un aspect, lors du Call to adventure (la seconde étape) qu’il n’a pas pleinement apprécié, soit qu’il s’est fait avoir.

Souvent, ce changement de perception est dû à une meilleure compréhension du monde spécial (la dénomination que donne Dan Harmon au monde de l’aventure), une compréhension qui lui a été donnée par la Déesse (la Déesse étant un raccourci pour ce qui a provoqué cette révélation).

Lors de cette sixième étape, le protagoniste découvre donc qu’il y a quelque chose qui ne va pas ou qui manque dans son point de vue sur le monde ou la réalité. Et cette nouvelle information réoriente le récit. Dans Edge of tomorrow, Cage comprend que l’oméga est capable de lui insuffler de fausses visions ; dans Piège de cristal, McClane réalise que les terroristes n’en sont pas et qu’ils ne sont en fait que des malfaiteurs.

La rencontre avec la déesse a des répercussions et, dans l’étape 6, le protagoniste doit payer. Quelque chose de fondamental manque à sa compréhension de la situation dans laquelle il se trouve et donc contrecarre sa stratégie et suite à sa rencontre avec la déesse, il sait maintenant de quoi il s’agit.

Si l’on ne parvient pas à réaliser la véritable nature de l’adversité, on cherche ses causes dans des prétextes qui ne nous permettent pas de résoudre le problème. C’est très vraisemblable. C’est douloureux et en cela, reconnaissable par la lectrice et le lecteur.

Cette étape 6 initie une remontée. Cette ascension sera pavée elle aussi d’épreuves. La moitié droite du cercle prépare le héros et l’héroïne à leur rencontre avec la déesse tandis que la moitié gauche du cercle les prépare au retour au monde ordinaire.

Dan Harmon fait correspondre cette sixième étape MEET YOUR MAKER avec la neuvième étape du parcours héroïque tel que le conçoit Joseph Campbell : ATONEMENT WITH THE FATHER. Le héros peut se heurter à une figure paternelle qu’il faut vaincre, persuader ou dont il faut obtenir l’approbation d’une manière ou d’une autre. En fin de compte, par quelque moyen que ce soit, la difficile relation entre les deux doit être apaisée.
Il peut s’agir d’une personne ayant une haute autorité ou un pouvoir important. Il peut également s’agir d’un dieu ou d’un immortel quelconque. La figure paternelle peut même être quelque chose de symbolique, comme un idéal ou un concept qui sert de directive au héros. Ainsi, cette figure paternelle chez Sherlock Holmes est cet idéal d’une logique parfaite qui explique le crime.

La figure paternelle représente, d’une certaine manière, tous les pères, avec lesquels de nombreux fils entretiennent une relation ambiguë, recherchant à la fois l’approbation et la compétition pour le même statut de père. Le père représente le pouvoir, et en particulier le pouvoir ultime sur le héros. Si ce pouvoir peut être pris, alors le héros devient apparemment omnipotent.

En se mesurant à la figure paternelle, le héros prend la tête de la table et devient ainsi le père. En obtenant l’approbation du père, le héros est porté à un niveau supérieur. Les filles ont également une relation étrange avec leur père, à la fois en compétition pour l’attention contre leur mère et en connaissant le tabou de l’inceste.

Dans une histoire d’amour, c’est le moment où ils se séparent. Maintenant vient la barbe, la vaisselle sale et les stores fermés. La profonde, profonde, dépression suicidaire. Une nouvelle relation mais ennuyeuse avec un partenaire supposé meilleur. Et enfin, la réalisation que rien n’a jamais été plus important que lui ou elle.
Lorsque vous réalisez que quelque chose est important, vraiment important, au point que c’est plus important que VOUS, vous prenez le contrôle total de votre destinée. Dans la première moitié du cercle, vous réagissiez aux forces de l’univers, vous vous adaptiez, vous changiez, vous cherchiez. Maintenant, vous êtes devenu l’univers. Vous êtes devenu ce qui fait que les choses se produisent. Vous êtes devenu une sorte Dieu vivant ose Dan Harmon.

7 – Return : BRINGING IT HOME

Pour cette septième étape, Dan Harmon convoque RESCUE FROM WITHOUT et THE MAGIC FLIGHT des étapes du Hero’s Journey de Joseph Campbell. Durant Rescue from without, le héros est sauvé d’une situation désespérée par une source inattendue. Ce n’est pas un deus ex machina qui fait intervenir la providence (une coïncidence par exemple) pour sortir l’héroïne ou le héros de l’impasse dans laquelle l’auteur ou l’autrice les ont jetés.

Cette source inattendue, nous la connaissons mais elle nous fut présentée de manière à ne pas attirer notre attention. Le sauveteur peut être quelqu’un qui avait précédemment abandonné le héros ou même quelqu’un que le héros ne connaît pas. Dans les récits mythiques, cette intervention peut provenir d’un dieu, mais ce dieu existe dans le récit en tant que personnage.

Dans Le Seigneur des Anneaux, Frodon est incapable de détruire l’anneau par lui-même, et a besoin de l’aide non volontaire de Gollum pour mener à bien sa mission. Peu après, Frodon et Sam sont sauvés par des aigles.
Même les héros sont faillibles et ce besoin d’être secouru réaffirme qu’ils nous ressemblent d’une certaine manière, ce qui renforce le lien avec eux et attire le lecteur et la lectrice vers une figure héroïque qui a fait ses preuves.

Le secours (extérieur, le héros ou l’héroïne ne peuvent trouver en eux la force pour être sauvés) est un schéma qui se répète souvent dans nos vies et qui nous rappelle le confort de l’enfance, celui d’un parent tout-puissant qui est toujours là pour nous sauver.
Concernant The magic flight, le héros se hâte de regagner ses pénates après avoir obtenu ce qu’il voulait. Il peut s’agir d’une course folle, peut-être pour échapper aux forces ennemies restantes, peut-être par peur des bandits ou de la perte du trésor en cours de route, et peut-être pour respecter une certaine contrainte de temps avant laquelle le trésor doit être ramené à un endroit donné.

Selon les exigences de l’histoire, BRINGING IT HOME sera soit un magic flight, soit un Rescue from without. Les habitants des profondeurs ne veulent pas en sortir, pas plus que ceux d’en haut ne veulent que vous y descendiez. Les natifs des mondes conscient et inconscient justifient leurs actions comme ils le veulent, mais dans le grand dessein, leur but est de garder les deux mondes séparés, ce qui signifie que l’on ne peut connaître un monde auquel on n’appartient pas et vivre pour en parler.
D’où pour cette étape du Bringing it home une urgence à agir et ne plus tergiverser sur la possibilité ou non de saisir l’occasion qui se présente à nous de faire avancer les choses malgré notre aversion.

8 – Change : MASTER OF BOTH WORLDS

C’est le moment des confessions. L’héroïne et le héros sont allés dans un endroit étrange, ils s’y sont adaptés, ils ont découvert le vrai pouvoir et maintenant ils sont de retour à leur point de départ, changés à jamais et capables à jamais de créer le changement.

Ce qui importe consiste à rappeler au lecteur/spectateur que si le protagoniste est capable d’un tel comportement, c’est à cause de ce qu’il s’est passé au préalable. Les conditions de ce comportement ont été rendu possibles. Regardez le côté opposé du cercle. Cette étape 8 fait face à la quatrième étape, la route des épreuves.
Après tout ce qu’ils ont vécu, héroïne et héros se ressaisissent. Nous acceptons que le bègue prononce soudain un discours parfait. Pourquoi ce n’est pas Deus Ex Machina ? Parce qu’il l’a mérité au cours de la quatrième étape.

YOU NEED GO, SEARCH, FIND, TAKE, RETURN AND CHANGE

C’est ainsi que Dan Harmon distingue les huit étapes dramatiques : Il te faut y aller, chercher, trouver ce que tu cherches, le prendre et t’en retourner en ayant été changé par cette aventure.

C’est un mouvement qui mène à une seule destination : la nécessité pour chacun d’entre nous (si héros et héroïne ont quelque chose à nous apprendre) du changement. Il nous apprend que nos désirs ont un prix à payer ce qui rend le désir dramatique et lui donne de la valeur.

Endurer, se sacrifier est ce qui en coûte pour obtenir cet accomplissement personnel auquel nous devrions tous aspirer.

Seulement, Dan Harmon prévient que ce n’est pas le récit qui doit suivre une structure à la lettre, c’est que, s’il n’y a pas un semblant de structure, le récit ne sera pas reconnu comme tel.

Et si vous pouviez m’aider par vos dons (quelques euros suffisent pour que fonctionne Scenar Mag), je vous serais sincèrement reconnaissant.

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