Émotionnellement parlant, un enjeu fort inclut quelque chose qui rappelle la mort. Et celle-ci engaine de manière assez classique d’ailleurs le parcours du personnage principal. Ce n’est pas une question de genre : quel que soit le récit, un enjeu létal ajoute déjà un sentiment de réalisme, un rappel de l’essence même de notre condition humaine.
Si la mort du héros est physique, son sacrifice ne sera pas vain. Du moins s’il triomphe de lui-même, car le véritable tragique est d’échouer à la fois sur le plan extérieur et sur le plan personnel. Certes la mort physique est l’enjeu favori du thriller.
Mais la romance n’en est point dépourvu. Au contraire. Lorsque la passion éclate les limites, l’amour s’offre en sacrifice.
Un enjeu social
La mort en fiction est souvent une métaphore pour la perte. La mort de l’être aimé est évidemment puissamment dramatique ; or, dans un registre peut-être un peu plus léger, perdre son emploi ou un quelconque statut social peut être très mal vécu et être un thème intéressant à explorer.
Le quotidien d’un avocat, par exemple, est constitué d’affaires perdues et remportées. Rien de bien dramatique en cela. Néanmoins, si pour le héros ou l’héroïne qui œuvrent ainsi dans leurs vies professionnelles et qui font de chaque cas un enjeu personnel quel que soit l’individu qu’ils aient à défendre, vous déplacez l’enjeu sur le besoin du personnage principal et non plus un désir de s’élever socialement, objectif superficiel qui ne satisfait ni le personnage, ni le lecteur ou la lectrice.
Sans conteste, ce sera sous l’angle psychologique que la mort sera la plus fascinante. L’arc dramatique d’une héroïne ou d’un héros ne sera positif que si ce héros ou cette héroïne comblent ce besoin qui agit sur eux comme une souffrance.
Si le besoin est de trouver un sens à sa vie, les réussites professionnelles, les amours sans cesse rejouées.. seront bien vaines si le personnage en question ne comprend pas qui est cet inconnu en lui.
Dans la comédie romantique, il est évident que les deux amants connaîtront un dénouement heureux. Quid du suspense ? Que nenni. Car l’absence de l’autre, les obstacles nombreux qui rendent impossibles leur amour rendent tangibles le néant de leurs âmes et interpellent notre sensibilité.
Le sentiment de perte est subjectif. C’est une question de regards : ce qui importe pour l’un ne compte pas pour un autre.
Et le conflit s’installe. Le caractère du drame en tant que conflit dans lequel la volonté consciente, c’est-à-dire exercée en vue de l’accomplissement de buts spécifiques et compréhensibles, est suffisamment forte pour amener le conflit à un point de crise. Passions et volontés ont des exigences contradictoires.
Quel enjeu ?
Pour qu’il y ait crise et l’une de celles qui retiennent l’attention, pour laquelle le lecteur/spectateur se demande ce qu’il adviendra ensuite, les passions et volontés seront exacerbées. Les passions amoureuses sont évidemment souvent sollicitées ne serait-ce que par le pouvoir incommensurable qu’elles exercent sur l’imaginaire.
Les volontés subissent plus qu’elles ne dirigent dans les passions amoureuses. Quand on pense son personnage principal, avant d’écrire l’aventure à laquelle il participera, il est bon de s’interroger sur l’enjeu, sur ce qui le motive à prendre le risque d’être détruit, un risque dont il est conscient quand il se lance dans cette quête, qu’il s’engage à tenir une promesse qu’il se fait d’abord à lui-même.
De quelle mort parle t-on dans votre récit ? De la vie du héros ou de l’héroïne ? De leurs spiritualités ?
Dans un thriller, le risque létal est grand mais il est plus important encore de se soucier du salut que peut espérer le personnage principal de sa propre mort. Ou bien le risque encouru et mené à son terme est nécessaire pour que votre héros ou votre héroïne pardonnent ou soient pardonnés pour un acte passé.
On emmène avec soi ses blessures. Votre personnage principal peut-il se réconcilier avec son père mourant ? Si non, il sera consumé de l’intérieur par sa propre culpabilité.
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