Parfois, on sent que ce que l’on écrit ne fonctionne pas. Quoi qu’on en pense, un récit possède sa propre logique. Il y a une raison à ce qu’il se passe. Une fiction n’est pas tout à fait la vie. Elle en a les apparences mais la fiction exige d’être structurée pour être intelligible.
Digresser ou dévier de la logique du récit doit être corrigé. Parce que lorsqu’il existe un manque (par exemple, le lecteur/spectateur ne comprend pas ce qu’il s’est passé), ce manque ou cette incohérence, vous les avez probablement ressentis aussi sans pouvoir les formuler. Si vous ne rectifiez pas ce qui est illogique dans votre récit, le lecteur et la lectrice le ressentiront pour vous.
On crée ses solutions
On n’attend pas de la vie qu’elle nous apporte les solutions à nos problèmes. Il nous faut agir. Face à un problème dans un processus d’écriture, il serait vain d’insister à réécrire une scène, à lui ajouter des détails si le même malaise réapparait.
- Il faut évaluer le problème. Posez sur le papier ce qu’il vous semble ne pas fonctionner.
- Décidez s’il s’agit vraiment d’un problème car ce qui paraît ne pas fonctionner peut parfois être facilement corrigé. Par exemple, dans une scène, votre personnage principal agit étrangement. Peut-être que si vous aviez posé au préalable, dans une scène antérieure, une information sur un moment difficile de son enfance, son action actuelle ne serait plus illogique mais liée à son passé.
- Écrivez votre solution. Ce ne sera peut-être pas la plus parfaite (car il vous faut trouver la meilleure solution), néanmoins, vous commencez à cerner votre problème.
- Reprenez le processus d’écriture.
- Puis réévaluez, après avoir laissé passé un peu de temps, ce que vous avez écrit. L’approche consiste à ne pas passer à autre chose tant que vous n’avez pas posé une solution certes temporaire et imparfaite mais nécessaire pour vous permettre de continuer.
Plus tard, vous vous assurerez alors si le problème est encore présent.
Si une information vous manque (vous avez besoin de faire des recherches supplémentaires mais vous renâclez à briser l’élan de votre inspiration), laissez les détails pour plus tard. Posez votre solution temporaire (ne serait-ce qu’une liste de choses à faire en indiquant le moment où cette lacune vous est apparue au cours du processus d’écriture).
Peut-être découvrirez-vous plus tard, en faisant vos recherches et en vérifiant les faits, que vous êtes plus proche que vous ne le pensiez.
Lorsqu’on se lance dans une scène d’action, on oublie parfois qu’action est synonyme de célérité. Dans une telle scène, le lecteur/spectateur n’a pas besoin d’une myriade de détails. Il doit ressentir ce qu’il s’y passe. Émotion et vraisemblance sont difficilement conciliables. Ce qui importe est de préserver le suspense et la tension dramatique même au détriment de la réalité des faits.
Considérez chaque personnage
Le problème peut venir parfois d’un personnage que vous n’avez pas pris le temps de développer suffisamment. Vous avez adjoint un sidekick à votre personnage principal par exemple. Mais vous n’avez considéré que la fonction (c’est-à-dire l’archétype du sidekick). Ce n’est pas une mauvaise chose.
Mais c’est aussi un être de fiction mais qui imite la vie avec tant de sincérité qu’il serait dommage de ne pas fouiller sa personnalité. Ne retenez pas votre imagination. Par exemple, si ce sidekick ne cuisine pas mais qu’il collectionne les recettes, vous pourriez vous servir de ce trait dans sa personnalité pour justifier les raisons qui le pousse constamment à retenir votre héros ou votre héroïne à prendre des mesures nécessaires face à toutes sortes de situation.
Bien qu’on ait soigneusement réfléchi et planifié les événements majeurs de son récit, on se surprend à ne pas savoir ce qu’il peut advenir maintenant. Reconsidérez les relations qui existent entre vos personnages et la relation que ceux-ci entretiennent avec le monde. Reprenez vos notes. Lancez-vous dans un brainstorming sans vous juger. Il serait étonnant que n’apparaissent pas une solution.
De temps en temps, votre récit doit marquer une pause afin de faire un point sur la situation en cours. Évidemment, cela casse le rythme. Néanmoins, il est nécessaire de maintenir le lecteur et la lectrice régulièrement informés de l’état des choses.
Pour limiter les dégâts que ce rappel des faits peut causer sur le récit, l’astuce consiste à faire passer ce point sur la situation dans les dialogues. Ce peut être un dialogue entre deux personnages ou bien un personnage se parle à lui-même comme une sorte de voix off.
Et alors que la pause ralentit le récit, l’ellipse narrative qui peut être soit temporelle (plusieurs heures, plusieurs jours peuvent être passés sous silence sans qu’il soit fait injure à l’intelligence du lecteur/spectateur), soit qu’elle dissimule une information, l’ellipse participe à maintenir l’attention sur le récit.
Vous incitez ainsi le lecteur/spectateur à tenter de lier les éléments entre eux, à créer des inférences que vous pourriez détromper ensuite.
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Bonjour Scenarmag et cher William, un récit qui ne fonctionne pas, je connais et notamment un dit de jeunesse que je ne suis jamais encore parvenu à « dépatouiller ».
J’abandonne, je renonce mais on ne m’y reprendra plus (c’est aussi une solution face à un récit qui ne fonctionne pas surtout au bout de quelques années où l’âge aidant, on finit forcément par ne plus y croire et refuser de toujours le ressasser).
Il faut évoluer avec ce qu’il en restera toujours de son approche archétypale, esthétique, d’amour des personnages qui se s’éteindra plus et risquera très sérieusement de servir à nouveau ! Il est né d’une source toujours fraîche et qu’il suffit de remuer avec une sage précaution pour y évacuer ce qui la prive de limpidité et de pureté.
A la tête que fait la fille sur la photo d’illustration de l’article, on aurait donc envie de lui rétorquer presqu’en lui secouant l’épaule, que le problème ne se situe pas sur l’écran de son mac qu’elle fixe dubitative mais au moins satisfaite de pouvoir l’apercevoir plus loin que le bout de son nez, qu’au contraire, la solution ne réside qu’en elle, dans ce qui lui appartient le plus profondément du désir et des choix auxquels elle confronte son personnage (si du moins, on part du principe qu’il a forcément été la genèse du récit et de tout son réseau protagoniste et antagoniste).
La solution exige selon moi une sacrée dose d’amour de plus mais en acceptant (et c’est là, le plus difficile et même douloureux puisqu’il est justement question d’amour et de sa part de sacrifice) qu’au delà de la backstory ou des mots d’un dialogue ou monologue, c’est d’abord de cerner dans le contenu dramatique, si le pire et le meilleur sont bien décidés et présents dans les pôles opposés à la plus forte et ainsi juste mesure dans la scène, la séquence, l’acte et dans toute la structure (le contenant) qui bloque ou qui bugue ! …
L’apprentissage bénéfique dont il faut aussi savoir profiter d’un récit qu’on ne serait jamais parvenu à faire fonctionner, en en recherchant plutôt les véritables causes personnelles sans surtout se culpabiliser puisque l’effort demandé ne réclame que davantage d’amour et d’humilité qui ne pointait jusque là que le bout de son nez.