Nombre de récits connaissent des événements qui se succèdent dans un ordre chronologique. Il est arbitrairement déterminé un point de départ et le récit progresse inexorablement vers sa fin. Le temps lui-même est un événement qui détermine le rythme du récit et le déploiement de l’histoire (le récit expose les événements dans l’ordre de leur survenance alors que l’histoire est libre d’organiser ces événements selon le souci de ses exigences).
Le temps mesure le récit. Nous savons souvent intuitivement combien de temps s’est passé entre deux événements ou la durée d’une séquence même si celle-ci est découpée en plusieurs scènes distribuées tout au long du récit.
La fiction n’est pas la réalité
Ce n’est pas parce que la fiction ressemble à notre quotidien qu’elle doit être soumis aux mêmes règles que celui-ci. Dans la réalité, le temps est linéaire. Un récit présente effectivement les choses dans un ordre chronologique ne serait-ce que parce qu’un effet a nécessairement une cause qui le précède.
L’histoire cependant n’est pas obligée de présenter la cause avant les conséquences possibles. Celles-ci peuvent être exposées d’abord et des explications viendront ensuite. L’innovation dans la présentation des choses a toujours retenu l’attention du lecteur/spectateur. Mais être différent pour le plaisir d’être différent ne suffit pas ; il doit y avoir un but dans notre innovation, et cela ne doit pas dérouter le lecteur ; l’histoire doit toujours être fluide et se dérouler dans une certaine séquence logique.
On peut aussi tout à fait respecter l’ordre des événements de façon logique (selon le temps linéaire si les événements se succèdent chronologiquement) ou s’amuser avec le temps comme présenter l’effet avant la cause, dilater ou condenser la durée d’un événements… En fait, cela dépend beaucoup de l’effet que vous cherchez à obtenir sur vos lecteurs et vos lectrices.
On dit souvent et cela s’avère très vrai qu’il faut savoir la fin de son histoire et y avoir suffisamment réfléchie avant de commencer le processus d’écriture. Après avoir bien pensé ce que vous vouliez faire de votre récit, pourquoi ne pas présenter cette fin dans la séquence d’ouverture ?
Mettre la fin en avant nous permet de travailler l’histoire en fonction d’elle, de montrer comment toutes les intrigues ont progressé jusqu’à ce point final.
Le comment et le pourquoi des choses s’exposent au bon gré de l’auteur et de l’autrice. Quant au quoi des choses, ce qu’elles sont, leur nature ou essence, leur raison d’être, cela peut être laissé de côté car lecteurs et lectrices ne se passionnent pas vraiment pour les motifs de l’existence des choses.
Par contre, l’influence que ces choses ont sur eux dans leur vie quotidienne ou bien lorsqu’ils éprouvent des émotions, des sentiments divers par les personnages interposés d’une fiction, l’effet est bien plus bouleversant.
Tout renvoie à la fin
Les événements choisis ont pour finalité une fin précise. Ces différentes étapes sont précisément ce qui fascine. Dans American Beauty, Lester nous apprend d’outre-tombe qu’il est mort. Quid du suspense puisque nous connaissons la fin ? Qui veut le tuer et pourquoi est la clef de cette histoire. C’est cette interrogation qui garde notre attention.
Et parce que Alan Ball et Sam Mendes peignent les personnages de manière si vivante et développent les scènes sous des atours émotionnels contradictoires (pensez à a la relation entre Lester et Carolyn, par exemple), nous restons fascinés.
Le conflit saute aux yeux page après page, et bien que l’on connaisse la fin, le suspense continue de monter. Car nous voulons comprendre car les auteurs ont su nous rendre sympathique Lester. Nous nous préoccupons de ce qu’il lui arrive et, ici, dans ce qu’il lui est arrivé.
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