Le drame, c’est évident, est ce qui rend une histoire intéressante. Qu’est-ce que le drame ? Ce sont des événements, des personnages, événements et personnages qui se rencontrent au sein de situations, de circonstances singulières ET qui retiennent notre attention.
Un simple regard peut signifier beaucoup selon les circonstances dans lesquelles il est posé et si nous sommes témoins de ce regard dans la vie réelle (même si nous en sommes l’objet) ou dans la fiction (par le jeu étrange de l’identification, nous l’éprouvons plus que nous l’observons), alors notre attention est capté et il se crée une situation dramatique.
Toutes les situations ne se prêtent pas au drame
Plus exactement, toutes les situations ne possèdent pas la même intensité dramatique. Une personne âgée souffreteuse attirent la compassion sur son état. Une personne âgée souffreteuse qui donne à votre personnage principal l’information que son père n’est pas son père, et la pression dramatique est bien plus forte.
Le drame focalise l’attention et emplit une scène d’une atmosphère pesante. Quand un personnage reçoit une information qui le trouble, tout comme dans la vie réelle, il veut savoir les pourquoi, comment et éventuellement quand.
Lecteurs et lectrices sont dans le même questionnement. Le sens du drame alimente les histoires d’action et de suspense parce qu’elles reposent sur une montée en puissance de l’implication du lecteur, et la manière la plus évidente de fournir le drame est de faire en sorte que quelque chose se produise.
Mais avant même d’avoir un drame, nous devons avoir un conflit. C’est l’essence même du développement d’une histoire, et que nous l’appelions tension, discorde ou tout autre synonyme, cela signifie simplement que l’histoire contient quelqu’un ou quelque chose qui lutte contre quelqu’un ou quelque chose et que l’issue est incertaine. Le conflit crée le drame, et il établit le point central de l’action ou du suspense à suivre.
Ensuite, nous mettons en scène un événement, un incident, une circonstance, une surprise, quelque chose qui va rompre le ton tranquille et ébranler la sérénité du lecteur. C’est l’impact dramatique, et c’est là que l’action et le suspense se développent.
L’événement peut être aussi subtil qu’un changement de direction du vent ou aussi flagrant qu’une éruption volcanique, mais l’essentiel est de produire un événement, car c’est ce qui maintiendra l’attention du lecteur, qui s’est déjà focalisée sur le conflit.
Le drame se montre. Un incident, un événement se produit. Le génie de la fiction fait en sorte d’impliquer le lecteur dans l’événement. Comment faciliter cette implication ? Par la confrontation. Léon Tolstoï a dit (ou fait dire à l’un de ses personnages) que toutes les familles heureuses se ressemblaient. Mais une famille malheureuse l’est d’une manière unique.
Parce que la souffrance est personnelle, elle est dramatique. Elle abstrait l’individu de la masse. Le lecteur/spectateur prête attention à cet individu. Attirer le regard est nécessaire mais non suffisant. Car maintenant, l’auteur doit travailler cette souffrance.
La confrontation
Faire s’affronter, s’opposer toutes sortes de choses, voici la confrontation. Un personnage hanté par la culpabilité qu’il s’est inventé à la suite d’un trauma est en souffrance. Il ne cesse de lutter contre lui-même. De cette confrontation naît le drame. En fait, le drame se nourrit de ce combat personnel.
Mais ce drame, il faut le montrer. Vous pourriez le faire dire mais seulement après l’avoir fait vivre aux lecteurs et lectrices.
Certes, un conflit n’est pas nécessairement une confrontation. Deux personnages pourraient être opposés dans leurs desseins respectifs sans jamais qu’une confrontation ait lieu entre eux. Mais s’il y a confrontation, vous avez un incident et celui-ci est forcément dramatique. Et si vous peignez cette confrontation avec suffisamment de souffle, vous retenez l’attention du lecteur/spectateur et celle-ci ne faiblira pas.
Le conflit sous forme de confrontation se présente de différentes manières : entre les personnages eux-mêmes (une rivalité ou une poursuite par exemple), entre les personnages et leur environnement (une lutte pour la survie en quelque sorte souvent fortement connotée à l’idée de sacrifice), ou entre les personnages et eux-mêmes (une lutte pour surmonter les effets d’une blessure ou d’une phobie).
Une confrontation qui entre dans une ou plusieurs de ces catégories (une ou plusieurs parce qu’il peut y avoir différents types de confrontation au sein d’une même histoire, même avec le même personnage), c’est la façon dont nous commençons à développer l’action et le suspense.
C’est la confrontation qui permet que cela arrive, et nous restons intéressés. Pourquoi ? Auteurs et Autrices savent que la meilleure façon d’attirer l’attention du lecteur est de lui offrir une chance de soutenir l’un des personnages, en lui permettant de prendre parti.
Développer une confrontation crée une opportunité de s’attacher aux personnages (ou du moins à l’un d’entre eux) parce qu’il y a, bien sûr, deux côtés (peut-être plus, en fait) et on prend parti, et quelqu’un lors de cette confrontation doit obtenir ce qu’il veut.
Rendre la confrontation suffisamment vivante (dramatique) donne au lecteur la possibilité de s’impliquer. Et c’est ainsi que vous l’accrochez.
L’émotion
Une fiction, c’est une recherche d’émotions. Vous pourriez vouloir raconter l’histoire d’un opposant au régime fasciste juste avant la Seconde Guerre Mondiale, la qualité de votre fiction (considérons que ce n’est pas une biographie bien que celle-là même est souvent soumise à l’imagination et à l’invention) dépend de la capacité de votre récit à convoquer des émotions et à tenter de les faire éprouver aux lecteurs et lectrices.
Pensez à la colère. Une contrariété légère peut ne pas générer de réaction particulière de la part d’un personnage (ni provoquer chez le lecteur autre chose qu’une faible réaction), mais lorsque le personnage explose, vibre, rugit, éclate littéralement, l’émotion jaillit de la page.
Ce type de colère est vraiment fort, et peu de lecteurs seraient immunisés. Les émotions fortes, développées par un conflit aigu, sont nécessaires pour construire et maintenir le drame. Le lecteur/spectateur ressent les conséquences. Il dépasse son statut d’observateur et expérimente lui-même la situation.
C’est une manière de voir les choses mais lorsque les émotions surgissent, c’est ainsi que le drame se développe et qu’il donne vie aux circonstances les plus anodines. Une peur profondément ancrée, la vie d’un personnage en danger : ce sont comme des tentacules auxquelles le lecteur se laisse volontiers prendre sans même en avoir conscience. C’est instinctif parce que naturel.
Lorsque les émotions sont fortes, le lecteur développe des peurs en même temps que le personnage, et comment rester à l’écart lorsque les émotions nous enveloppent ? Ce qu’il s’est passé, c’est que le drame a éclaté parce que des émotions fortes ont été dépeintes.
Qui dit émotions fortes dit drame. Nous avons tous des souvenirs d’incidents dramatiques dans notre vie ; combien de fois n’ont-ils pas été accompagnés d’émotions fortes ? Et c’est ce qu’il se produit avec la fiction. Nous nous impliquons dans l’histoire à cause des émotions qu’auteurs et autrices ont été capables de convoquer dans le récit. Le niveau émotionnel est donc d’une importance capitale dans la bonne réception de l’intention de l’auteur.
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