ÉCRIRE VRAI

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Être un auteur ou une autrice, cela ne se voit pas. On croise des auteurs et des autrices tous les jours mais écrire n’est pas quelque chose de manifeste qui permet de distinguer celui-ci ou celle-là comme une autrice ou un auteur.
Ce n’est pas ce qu’ils sont.

L’écriture ne définit pas la personne. Mais écrire est certainement un combat. L’erreur serait de chercher à plaire avec ce que l’on écrit. On écrit pour un lecteur ou une lectrice mais cela ne signifie pas que l’on cherche leur approbation. Cela serait plutôt du domaine de la politique ou une question de marketing dans ce cas.

Pourtant écrire est supposé apporter quelque chose à celui ou à celle qui nous lit. C’est une forme d’égoïsme de se mettre ainsi en avant dans l’écriture. Mais c’est la condition pour être vrai. Être vrai, ce n’est pas chercher à divertir, rappelle Charlie Kaufman. Les moyens de divertissement sont pléthores car la demande est si forte que le risque de se faire manipuler l’est tout autant.

Écrire est différent de vendre

Nous sommes prêts à consommer n’importe quoi non pas pour chercher un sens à notre existence parce que nous nous sentons vides et effrayés et tentons de combler ce manque mais parce que nous avons appris ou compris ou développé l’idée qu’il nous fallait dominer autrui comme une manière d’être dans ce monde.

Être vrai, c’est dire qui nous sommes à la fois dans l’écriture mais aussi dans notre vie. Être vrai, c’est permettre à autrui de se sentir moins seul dans son propre monde. Lorsqu’on se reconnaît dans la sincérité, dans l’honnêteté de quelqu’un, il se crée en nous un espoir.

Ce n’est pas parce que les choses sont comme elles sont que l’on doit s’y complaire. Le monde est un champ de bataille qui mérite qu’on le défende contre ceux qui en ont fait un système consumériste hypocrite et aveugle. Être vrai envers soi-même et les autres, c’est apporter une lumière qui donne de l’espoir.

Votre vérité ne sera pas dans l’imitation. Même si vous êtes très proche d’une comédie telle que les écrit Judd Apatow par exemple, vous n’êtes pas Judd Apatow. Votre voix n’est pas dans l’imitation d’autres voix.
Selon Charlie Kaufman, le problème est notre croyance absurde en ce que nous ne nous sentons pas suffisamment intéressants pour mettre ainsi en avant notre voix. Pourtant, votre voix est la seule chose que vous ayez à offrir. Et vous le voulez vraiment. Vous exposer ainsi dans votre nudité est probablement ce dont le monde a besoin pour retrouver un peu d’humanité.

Un amalgame d’émotions contradictoires

Être sincère avec soi-même et donner cela aux autres, c’est passer à travers toutes sortes d’émotions. Nous connaîtrons autant d’échecs que de réussites, nous nous sentirons bénis et maudits, embarrassés et plein d’élan, mélancolique et joyeux…

Nos vies sont une succession de croisements alors qu’une décision s’impose car la situation ou les circonstances pèsent durement sur nos vies. On ne peut rester dans l’embarras ou le désespoir ou la tristesse car ce sont des aiguillons puissants qui nous obligent à sortir d’un état d’esprit négatif pour trouver un peu de repos et tout surpris, nous nous retrouvons à un autre croisement.

Se dévoiler, c’est exposer sa propre blessure. C’est avoir conscience d’un manque dans son être mais être incapable de le dire. La blessure est spécifique à chacun mais néanmoins, à différents degrés, nous avons en commun une blessure.

C’est quelque chose que l’on cache et même que l’on protège parce que si cela venait à être révélé, non seulement nous montrerions notre faiblesse et cela nous rendrait vulnérables mais aussi parce que qui pourraient être intéressés par ce qui nous hante si douloureusement ? Peut-être pire encore, si cela venait à être su, qui pourraient encore nous aimer ?

Et pourtant, cela peut être partagé si toutefois, chacun est ouvert à l’autre, conscient de l’existence d’autrui et être à son écoute, alors, à ce moment, les choses peuvent commencer à changer. Dans cette relation sincère, quelque chose commence à fomenter sur notre regard sur nous-mêmes, sur le monde et sur notre place dans le monde.

Écrire, c’est affirmer notre droit à l’existence, c’est dénoncer le mal qu’on nous a fait. Dire qui nous sommes dans notre écriture, c’est permettre à d’autres de se sentir moins seuls.

Être curieux

Le doute est l’allié des créateurs ou dit autrement, la certitude tue la novation. Créer des relations, c’est apparier une multiplicité de points de vue. De cette confrontation de vues forcément subjectives naît de nouvelles solutions, de nouvelles approches qui peuvent être utilisées dans l’écriture afin de sortir du conventionnel.

La vie intérieure et ses états émotionnels se manifestent bruyamment dans un médium tel que le cinéma. Écrire un scénario, c’est écrire nos angoisses, nos crises, nos aspirations, nos amours, nos regrets et nos culpabilités dans des récits très riches.

Écrire nous donne la liberté d’un songe, une liberté que nous n’osons pas prendre à l’état de veille. Pour Charlie Kaufman, ce pouvoir du rêve est en partie dû parce que nous ne craignons pas le regard d’autrui dans nos songes.

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