Un personnage dramatique est un être de fiction que l’on peut caractériser par trois points essentiels : sa dimension, le conflit et l’empathie.
Dire d’un personnage qu’il est unidimensionnel, c’est signifier qu’il manque de profondeur. Souvent, il n’apprend rien de ses expériences. On comprend ainsi que si un personnage principal est accusé d’être d’une seule dimension, c’est qu’on ne perçoit pas en lui les changements nécessaires auxquels il devrait aboutir au dénouement du récit.
Alors, auteurs et autrices utilisent néanmoins l’uni-dimensionnalité pour décrire certains traits de personnalité établissant un contraste comme par exemple l’altruisme de l’un contre l’égoïsme de l’autre.
Un manque émotionnel
Ce type de personnages a peu ou pas de profondeur émotionnelle. Son rôle est souvent de mettre en valeur le personnage principal, et il a généralement un point de vue simple et restreint sur la vie ou la situation. Ce personnage est souvent un stéréotype et peut simplement être utilisé comme un outil littéraire pour faire avancer le récit.
Benvolio (Roméo et Juliette) ou Miss Maudie (Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur de Harper Lee) sont des personnages que l’on peut qualifier d’unidimensionnel mais dont la présence est tout à fait légitime et justifiée. Ils ne pourraient être supprimés qu’avec grandes difficultés sans détruire la structure du récit.
Quant au personnage principal, s’il est trop simple, trop parfait, s’il n’y a aucun accident entre la profondeur et la surface de son être, il ne retient pas l’attention. Comme dans la vie réelle, la complexité que l’on peut ressentir chez un être invite à passer du temps avec lui.
Une relation forte est celle d’Atticus Finch avec sa fille Scout. Scout est proche de son seul parent, son père. Elle l’interroge sur des questions concernant la ville, elle, et d’autres. Atticus répond à Scout de manière honnête et ils ont donc une relation père-fille très forte.
Cette relation nous aide à comprendre Atticus et Scout. Lorsque Scout interroge Atticus, il lui répond d’une manière qu’elle comprendra, mais aussi d’une manière qu’il estime juste et qui ne porte pas de jugement.
La façon dont Atticus parle à Scout donne l’impression qu’il veut que ses enfants ne portent pas de jugement, contrairement à la ville de Maycomb. Par exemple, Atticus dit à Scout : On ne comprend jamais vraiment une personne tant qu’on ne considère pas les choses de son point de vue. Cela montre qu’Atticus veut que Scout voit les choses du point de vue des autres plutôt que du sien. Cette citation aide lecteurs et lectrices à comprendre qu’Atticus est un père qui veut que ses enfants aient leurs propres opinions impartiales, basées sur l’examen des deux aspects d’une situation.
Un autre exemple qui explique qu’Atticus veut que ses enfants ne soient pas influencés par l’opinion toute faite, c’est lorsque Scout demande à Atticus s’il est un ami des nègres. Il répond : « Nègres » est un terme utilisé par les gens vulgaires lorsqu’ils pensent que quelqu’un favorise les nègres au détriment d’eux-mêmes.
Cette citation confirme qu’Atticus dit la vérité à ses enfants, car il ne veut pas leur mentir. L’effet de cette citation sur le lecteur est que cela forge le respect envers Atticus. Atticus Finch est un être de paradoxes internes. Il est calme et quelque peu timide – Scout bien que la relation avec son père est sans ombrage se plaint néanmoins de son inefficacité qu’elle qualifie de faible.
Pourtant, nous découvrons qu’il y a du pouvoir dans les mots d’Atticus (d’où l’évidence de son activité d’avocat). Il résiste à l’adversité. Il s’avère être aussi un tireur d’élite, ce qui semble contredire son attitude pacifiste. Atticus a aussi ses défauts et ses lacunes. Sous l’influence de sa sœur, il dit à Scout qu’elle doit commencer à vivre selon sa lignée et devenir une dame. Notre homme de principes n’est pas sans ses moments de faiblesse, et il nous apparaît donc beaucoup plus réel.
Un conflit personnel
Un personnage fort doit avoir une sorte de conflit interne qui oriente l’intrigue d’une manière ou d’une autre. Le conflit est le moteur dramatique qui permet à l’histoire de se dérouler, et le fait d’aborder les questions liées à l’intrigue au sein du personnage permet aux lecteurs de rester accrochés.
Et qui est plus tourmenté que Carrie White, l’homonyme du premier roman de Stephen King ? À la puberté, Carrie développe de puissantes capacités télékinétiques. Elle commence également à se débattre avec ses sentiments pour sa mère, une abusive fanatique.
Carrie n’a pas d’amis, et sa mère est donc le centre de sa vie – elle l’aime vraiment, mais la craint et la déteste tout autant. Alors que Carrie lutte pour contrôler ses pouvoirs, elle lutte également pour gérer ses sentiments de colère et de ressentiments. Elle est douce, et la tension dramatique centrale de ce récit vient du fait que le lecteur veut qu’elle se défende, mais craint aussi qu’elle ne perde l’innocence qui définit une grande partie de son identité.
De ce conflit interne peut naître l’empathie envers un personnage. L’empathie est plus puissante lorsqu’elle s’attache aux méchants de l’histoire. Un méchant complexe qui reste dans l’esprit de vos lecteurs est qu’ils ont compris pourquoi vos méchants font ce qu’ils font.
En créant un moment où le lecteur ressent une certaine empathie pour le méchant, vous l’humanisez, en éliminant ce sentiment de « grand méchant » caricatural. Le Voldemort d’Harry Potter est un vilain demi être qui tue pour le plaisir et le pouvoir, mais vous pouvez, à un certain niveau, comprendre d’où vient sa haine des moldus.
Ni lui ni sa mère n’ont ressenti d’amour de la part de la moitié moldue de sa famille. Bien sûr, cela n’excuse rien, mais vous comprenez au moins ses origines. Vous comprenez aussi que malgré sa diable de taille, il y a au fond de lui un enfant anxieux, en colère et blessé qui a constamment besoin de prouver qu’il peut réussir sans père ni mère. Ce n’est pas une caricature, c’est une menace vivante, qui respire.
L’essence d’un être de fiction serait donc au moins ces trois attributs de dimension, de conflit et d’attirance empathique. En combinant ces qualités (vertus ou défauts), vous conférez à votre personnage une identité unique et originale.
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