ÉMOTIONS & FICTION

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Le monde des auteurs de fiction est un ensemble de contraires : des êtres en désaccord dans leurs croyances, leurs valeurs, leur but et leur façon d’écrire. Certains auteurs ont des intentions commerciales, d’autres des intentions littéraires. Certains planifient, d’autres explorent l’histoire dans des versions successives. Pour certains, le genre est un motif de fierté ; pour d’autres, c’est une étiquette détestable. Le prestige compte beaucoup pour certains, l’argent pour d’autres, et l’option du scénario pour ceux qui aiment prendre des risques.

Une dichotomie moins souvent évoquée est la division entre ceux qui sont à l’aise pour écrire des émotions et ceux qui trouvent difficile de traduire des émotions. Ce dernier groupe accorde une grande importance à la représentation. Pour que le lecteur ressente ce que ressent un personnage, il faut le mettre en situation, lui faire vivre l’expérience d’un personnage. Il faut provoquer l’émotion chez les lecteurs en capturant des moments. Ce seront des passages si sincères, si vivants et si vrais qu’ils transcendent les simples mots. Faites confiance à vos lecteurs et à vos lectrices : ils savent reconnaître l’expérience humaine ou plutôt la condition humaine dans toute son étendue.

Comment emmener son lecteur dans un périple émotionnel ?

Les lecteurs peuvent croire qu’ils vivent une histoire en même temps que les personnages. En fait, ce n’est pas le cas. Les lecteurs vivent leur propre expérience qui est simplement occasionnée par ce qui se trouve sur la page.
Cette expérience peut être suscitée, ou non, par un certain nombre d’éléments de l’histoire : l’intrigue, le contexte, le thème, les dialogues et, oui, ce que les personnages eux-mêmes ressentent. Ce que font l’auteur et l’autrice, cependant, ce n’est pas de faire ressentir aux lecteurs et lectrices les mêmes sentiments que l’auteur et l’autrice ou leurs personnages, mais plutôt d’induire pour chaque lecteur et lectrice un cheminement émotionnel unique à travers une histoire.

Une certitude, néanmoins. Deux lecteurs n’interpréteront pas la même histoire de la même manière. La dynamique des réponses des lecteurs est complexe. Tout aussi complexes et aussi variées dans leurs effets sont les arcs dramatiques des personnages, cette découverte de soi vers un meilleur qui ne peut se produire sans une lutte émotionnelle permanente.

L’intrigue peut également être comprise comme une séquence de jalons émotionnels. En tant qu’auteur, vous vivez un périple émotionnel en même temps que vous écrivez, un périple qui informe et influence non seulement l’histoire que vous créez, mais aussi votre voix et votre identité même en tant qu’auteur.

Pourquoi est-il important de considérer l’écriture de fiction à travers le prisme d’une expérience émotionnelle ? Parce que c’est comme cela que les lecteurs lisent. Ils ne se contentent pas de répondre. Ils n’adoptent vos perspectives ni votre éventuelle indignation.

Ils formulent les leurs. Vous n’êtes pas l’auteur ou l’autrice de ce que les lecteurs ressentent, juste le provocateur ou la provocatrice de ces sentiments. Vous pouvez organiser les expériences de vos personnages et les exposer sous une infinité de possibilités mais la signification de cette manifestation est différente de mille façons pour des milliers de lecteurs et lectrices différents.

La conséquence émotionnelle

Combien de romans vous ont ému aux larmes, ont provoqué pour vous de la colère ou vous ont mené à prendre la résolution de vivre différemment ? demande Donald Maass. Combien d’entre eux ont laissé une marque indélébile, une histoire que vous n’oublierez jamais ? Le nombre n’est probablement pas très élevé, et de ce petit nombre, il est probable que la plupart de vos choix mémorables ne sont pas des romans actuels mais des classiques.

Qu’est-ce qui en fait des classiques ? Une histoire intéressante, intelligente ou belle simplement, mais au-delà du récit, les classiques ont un attrait durable surtout parce que nous nous souvenons des expériences que nous avons eues en les lisant ; nous ne nous souvenons pas tant de l’art que de l’effet de cet art sur nous.

Lorsqu’une intrigue se résout, les lecteurs sont satisfaits, mais ce qu’ils se souviennent d’un récit est ce qu’ils ont ressenti en le lisant. Une accroche peut accrocher efficacement, les rebondissements peuvent surprendre, la tension dramatique peut aider à aller jusqu’au bout de l’histoire et la prose de l’auteur peut éblouir, mais tous ces effets s’estompent aussi vite qu’un feu d’artifice.

Demandez aux lecteurs et aux lectrices ce dont ils se souviennent le mieux à propos des romans ou des films qu’ils ont vus et la plupart d’entre eux diront les personnages, mais est-ce une réponse suffisamment précise ?

Il est vrai que les personnages deviennent réels pour nous, mais c’est à cause de ce qu’ils nous font ressentir. Les personnages ne sont que des êtres de fiction ; notre imagination s’en emparent mais ce que ces personnages provoquent en nous possède une réalité tout à fait différente.

L’impact émotionnel est aussi fondamental pour le but et la structure d’un récit que son intrigue. L’art émotionnel de la fiction sous-tend la création d’arcs dramatiques, de nœuds dramatiques, d’une structure dramatique et de scènes fortes. C’est la base de votre voix en tant qu’auteur et autrice.

L’art émotionnel de la fiction peut également libérer le pouvoir d’une écriture personnelle, en vous reconnectant à votre histoire pendant ces moments chaotiques où votre récit tombe en panne et où votre plaisir ou envie disparaît. Pour Donald Maass, l’art émotionnel sera nécessairement novateur. C’est une manière de comprendre ce qui provoque un effet émotionnel sur les lecteurs et d’utiliser délibérément ces méthodes. C’est une manière de dynamiser votre écriture avec des outils qui sont toujours disponibles : vos propres sentiments.

Maîtriser l’art émotionnel en fiction commence par comprendre comment l’impact émotionnel est produit et ensuite l’appliquer dans la pratique.

D’autres recherches viendront dans les articles futurs concernant les émotions. En attendant, s’il vous plait, si vous pouviez considérer un don pour soutenir Scenar Mag, nous vous en serions vraiment reconnaissants. Nous ne souhaitons pas être une association et bénéficier de subsides. Nous ne voulons pas faire de publicités pour ne pas polluer votre lecture. Scenar Mag a un coût néanmoins. Aidez-nous à persévérer à vos côtés pour vous aider dans vos projets d’écriture. Ne restez pas indifférents à cet effort de partage de connaissances. Faites un don. Merci

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