Le McGuffin est un terme dont se servait Alfred Hitchcock pour désigner ce après quoi les personnages majeurs de son récit étaient arc-boutés. Ce terme est devenu commun depuis l’interview que François Truffaut consacra à Alfred Hitchcock en 1978. Hitchcock se référa pour l’occasion à Rudyard Kipling.
Les histoires de Kipling, dit Hitchcock, se déroulaient en Inde et impliquaient des escarmouches à la frontière afghane, concernant souvent des espions et des complots pour voler des plans confidentiels. Alfred Hitchcock a adapté cette idée pour son propre travail et lui a donné le nom de McGuffin.
La fonction du McGuffin
Dans ce travail de Hitchcock, le McGuffin couvre toutes sortes d’activités, comme le vol de plans confidentiels ou le commerce de secrets gouvernementaux. Il peut s’agir de n’importe quel élément de preuve comme des microfilms ou des plans volés que les espions ou les agents du gouvernement recherchent.
Mais, en fait, Hitchcock disait souvent qu’en tant que narrateur, peu importe ce qu’était le McGuffin et qu’en vérité, le McGuffin n’était rien. S’il semble étrange d’entendre un outil aussi puissant être décrit comme rien, c’était en fait le considérer comme un prétexte pour le complot ; le but du McGuffin est d’orienter l’intrigue.
C’est par le McGuffin que l’on peut justifier les confrontations entre le protagoniste et l’antagoniste et légitimer ce qui les pousse à agir. Le McGuffin est la cause de la concurrence entre le protagoniste et l’antagoniste.
Mais il faut dire que ce que le McGuffin est réellement dans une histoire importe moins pour l’auteur et le réalisateur que sa capacité à conduire l’intrigue ; ce que représente le McGuffin importe beaucoup pour les personnages dans l’histoire mais ils ont besoin de croire qu’il est d’une importance vitale et de la nécessité de le poursuivre obstinément. C’est ce qui permet à l’histoire d’aller de l’avant. Car si les personnages ne croyaient pas dans le McGuffin ou n’en voulaient pas, l’histoire serait figée.
Mais pour que le lecteur/spectateur n’y attache pas trop d’importance et ne s’interroge pas sur ce qui est fondamentalement sans importance, Hitchcock se débarrasse souvent du McGuffin avant la fin du film comme il le fait dans La mort aux trousses.
Vers la fin du film, il y a un échange de dialogues entre le personnage principal, Roger Thornhill, et le chef de l’opération de la CIA, le professeur. Ce dialogue nous est inaudible car nous n’avons pas besoin de l’entendre. Nous avons vu Thornhill lutter pour comprendre les événements confus dans lesquels il a été empêtré malgré lui. Nous savons qu’il y a des espions et des agents du gouvernement, mais Thornhill ne le sait pas encore.
Il faut bien que sa lanterne soit éclairée, mais nous n’avons pas besoin d’entendre le professeur le faire. Ce ne serait pas très efficace donc Hitchcock nous permet seulement de voir les deux hommes se précipiter à travers la piste pour attraper un avion et leur conversation est noyée par les moteurs.
À la fin du dialogue inaudible, les deux hommes continuent néanmoins leur conversation. Thornhill demande ce que fait le méchant, Philip Vandamm, et pourquoi la CIA se préoccupe de lui.
Le professeur répond que Vandamm est dans l’import/export. Il exporte des secrets du gouvernement, ce qui signifie qu’il est un espion. Le professeur dit aussi qu’il est, par des moyens inconnus, sur le point d’exporter des informations top secret hors du pays. Pour le moment, Hitchcock nous fait toujours miroiter le McGuffin.
Un prétexte
Quand, après cela, Thornhill découvre que la femme dont il est tombé amoureux, la glamour et blonde sous couverture Eve Kendall, travaille pour le professeur et est en danger à cause de Thornhill lui-même, il accepte de participer à une ruse pour la protéger.
Lors d’une rencontre mise en scène il provoque Eve dans un café bondé et elle lui tire dessus (à blanc). Thornhill pense qu’elle est maintenant en sécurité et qu’ils pourront être ensemble, mais quand il découvre qu’elle quitte maintenant le pays avec Vandamm et que les décisions et actions de Thornhill ont précipité ce départ, parce qu’elle est maintenant recherchée pour meurtre, il se libère du joug du professeur et se précipite pour la sauver.
Il arrive sur les lieux où Vandamm et Eve attendent l’avion pour les emmener hors du pays. Eve est dans une chambre à l’étage préparant sa valise. En essayant d’attirer son attention, Thornhill entend Vandamm et son lieutenant parler de Eve.
Après avoir vu à travers la ruse concoctée par le professeur et découvert que Eve est une espionne travaillant pour la CIA, Vandamm décide de se débarrasser du problème d’une plus grande hauteur. Au même moment, Thornhill découvre également que les espions possèdent les secrets gouvernementaux volés cachés dans une statue antique achetée plus tôt à une vente aux enchères.
À ce moment-là, le McGuffin est identifié. Maintenant que nous savons ce qu’il est, il devient non pertinent. Nous savons ce que c’est mais ce n’est plus d’une importance primordiale pour Thornhill ou Eve, ou l’histoire. Par contre, il a bien tenu sa fonction en menant l’histoire jusqu’à ce moment.
Il est vrai que le McGuffin compte toujours pour les espions. Ils ont toujours l’intention de faire sortir le microfilm du pays et c’est aussi important pour Eve et Thornhill qui essaient d’ailleurs de s’enfuir avec le microfilm.
Mais cela n’a plus d’importance pour le spectateur car lui avoir dit ce qu’est le McGuffin lui permet maintenant de se concentrer sur ce qui compte vraiment pour lui : l’histoire d’amour, la Love Story, entre Thornhill et Kendall.
Maintenant que le mystère autour du McGuffin s’est dissipé, nous avons quelque chose en jeu qui compte vraiment. A partir de ce moment, la question de l’histoire est : Thornhill sauvera t-il Eve du mal incarné Vandamm et pourront-ils enfin être vraiment ensemble ?
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