HEROS ET HEROINES, AGENTS DE L’ACTION

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De quoi avons-nous besoin pour qu’une action soit entreprise ? Nous savons que nous avons besoin d’un monde, c’est certain. Quelle est la prochaine étape ?
Vous avez besoin de quelqu’un pour vivre en ce monde. Vous avez besoin d’un agent. Il s’agit du héros, de l’héroïne, du protagoniste, du personnage central ou principal. Appelez-le comme vous voulez, sa fonction est d’être l’agent de l’action.

Tout ce qu’il se passe dans votre monde doit être naturel pour ce monde, tout ce que votre héros ou votre héroïne font ou ne font pas, doit être naturel selon leur personnalité. N’oubliez pas non plus que votre personnage principal émerge du monde de l’histoire et ne peut s’en échapper.

Le personnage dans le monde

Il vous faut considérer si votre personnage principal accepte ou non le monde dans lequel vous le jetez. Habituellement, le personnage principal rejette les règles du monde et son antagonisme est le monde lui-même, du moins le personnage qui incarne les valeurs de ce monde.

Tout comme nous avons considéré le monde extradiégétique, c’est-à-dire son histoire, et toutes les choses qui ne participent pas à l’intrigue et qui existent néanmoins, notre héros n’est pas tout frais sorti de la boîte. Des choses sont arrivées. Même si nous le rencontrons au moment de sa naissance, il y a des antécédents familiaux dont il faut tenir compte.
Était-il voulu ? Ses parents ont-ils des problèmes ? Sont-ils pauvres ? riche, aimable ou cruel ? Dans quel genre de monde est-il né ? Encore une fois, comme pour l’exploration du monde, votre personnage pourrait être révélé lentement mais devrait arriver avec une personnalité déjà bien établie.

La finalité des toutes premières scènes dans lesquelles apparaît un personnage n’est pas de créer un personnage qui existe déjà (par votre recherche préliminaire) mais d’établir dans l’esprit du lecteur certains attributs qui caractérisent ce personnage.

Nous en déduisons que vous devez savoir lequel de vos personnages est le plus important. L’épine dorsale de l’histoire sera ses pérégrinations au cours de l’intrigue (le Hero’s Journey, par exemple). Tous vos personnages auront un parcours dans l’intrigue, mais la ligne d’action ne vient que d’un seul. Robin Mukherjee emploie cette expression de ligne d’action. Elle n’est pas cependant une ligne dramatique. Considérons la ligne d’action au sens de Mukherjee comme une succession d’événements.

Robin Mukherjee met en garde contre un défaut. Quand le personnage principal est trop la vision que l’auteur ou l’auteure ont d’eux-même.
Le héros devient alors un prisme trop subjectif à travers lequel nous regardons le monde et imposons à notre lecteur cette vision. Ce n’est plus de la fiction mais de la propagande ou un discours unilatéral qui a oublié son interlocuteur : le lecteur. Il faut soit passer à l’un des personnages les plus intéressants en tant que héros, soit donner à son héros un caractère propre.

Un personnage passif ne peut être le héros ou l’héroïne

Dans Rain Man, on peut s’interrogerhéros de savoir qui est le personnage principal (puisqu’il ne peut y en avoir qu’un comme la définition le suggère). Nous aurions tendance à penser que Raymond est ce personnage.
Dans ces cas-là, c’est généralement quelqu’un d’autre, qui les observe, qui est touché par eux, qui s’inquiète pour eux, qui fait avancer l’action, dont c’est en fait l’histoire. Dans Rain Man, le personnage principal est ainsi Charlie, sans nul doute.

Disons que nous avons maintenant notre personnage principal, notre protagoniste. Le mot « protagoniste » signifie d’ailleurs simplement « l’acteur de premier plan ». Il est intéressant de noter que, dans la terminologie grecque, le personnage et l’action sont une seule et même chose.

Nous rencontrons alors notre protagoniste, après qu’ils aient fait et dit des choses, ou non fait et non dit certaines choses, toutes ces choses ou non-dits qui les ont amenés à ce point de départ de l’histoire.

Mais l’histoire ne commencera que lorsqu’ils commenceront à agir. Il est agréable de s’allonger pendant des heures sur une chaise longue, de regarder quelqu’un d’autre faire le travail, mais cela ne fait pas un drame. Alors, qu’est-ce qui nous met sur pied ?

Et Robin Mukherjee nous suggère d’appeler cela une impulsion. C’est un besoin, un désir, une envie (trois termes néanmoins dont les définitions appellent des démonstrations différentes). Quelque chose est apparu dans l’esprit (le nôtre comme celui de notre personnage) ; on pourrait appeler cela une pensée, mais ce n’est peut-être même pas aussi clair que cela, selon Mukherjee.

Bien sûr, beaucoup de pensées et d’impulsions passent par l’esprit. Beaucoup d’entre elles, heureusement, ne sont jamais suivies d’effet. Ce qu’il passe par l’esprit de notre personnage a beaucoup à voir avec le monde de l’histoire et la compréhension que ce personnage a de ce monde.

Supposons donc que les pensées et les désirs soient en constante évolution. Dois-je tuer le roi et lui voler son trône ? Trop de problèmes. Mais tôt ou tard, quelque chose va arriver. Le personnage principal reçoit un assentiment. Un accord se fait autour de sa volonté.
À ce moment-là sont convoqués les pouvoirs de l’action. Un autre mot pour cela est « émotion », qui vient du latin motio (mouvement) et du préfixe e (qui vient de). Le pouvoir de l’émotion est donc un mouvement suscité par un objet extérieur.

Le pouvoir de cet assentiment, de cette volonté et de cette émotion, devrait être suffisant pour soutenir votre personnage jusqu’au moment du climax, son ultime affrontement, celui qui apporte toutes les réponses.

Si ce pouvoir est faible, vague ou trop fantaisiste, il risque de s’essouffler et rendre inutile le climax, qui ne serait alors plus justifié.

Le moment qui crée l’élan

Le moment de l’assentiment (nommez-le l’incident déclencheur) peut être évident, ou bien caché dans plusieurs couches de matériel dramatique. Il peut même se produire avant le début de votre récit. Mais il doit être là, palpitant déjà, prêt à initier le mouvement du personnage.
Le moment où il s’arrête de palpiter est le moment où votre histoire se termine.

Sans un motif pour agir, l’action n’est qu’un réflexe. Cela ne fait pas une histoire parce que le personnage qui exécute l’acte n’est pas engagé, n’est pas impliqué.
De même, l’activité sans une sorte d’engagement du personnage n’est rien parce qu’il n’y a rien. C’est le néant et non le vide dont on pourrait tirer éventuellement des choses avec de la signification. Ne pas s’engager se ramène à ne pas exister.

Cela pourrait faire une bonne horde de zombies mais, quelque part au milieu d’eux, quelqu’un doit vouloir un meilleur avenir pour eux-mêmes (et peut-être pour les personnes qui leur sont chères) pour nous émouvoir et pour que nous trouvions du sens à cette horde. Il ne suffit pas de se contenter de dévorer même si la dévoration peut expliquer certaines pulsions.

Les personnages sont des personnages parce qu’ils s’engagent dans une action. L’action dramatique est motivée par le besoin, le désir, l’impulsion et l’assentiment (c’est-à-dire la caution des autres). Si nous étudions nos propres expériences, il est souvent difficile de se souvenir de ces moments où nous ne voulions pas particulièrement quelque chose, et où rien ne s’est vraiment passé de toute façon.

Il est difficile de se souvenir d’eux car l’esprit les a déchargés de toute valeur. Pourquoi infliger cela à votre lecteur ? demande Robin Mukherjee. Les événements dont nous nous souvenons ont toujours un besoin ou un désir ou une impulsion derrière eux (en somme, une intention), qu’ils soient satisfaits ou non.

C’est ce qui nous intéresse. Si vous voulez comprendre cette étape cruciale dans la séquence des événements qui composent un acte, c’est-à-dire un drame, vous n’avez pas besoin de regarder bien loin que votre propre vie quotidienne.

Thème et motivation

Notre personnage est maintenant suffisamment motivé pour effectuer une action. Elle peut être spectaculaire ou banale. Gardez à l’esprit que sa force dramatique est déterminée par la puissance du contenu thématique, et non par le comportement ou l’attitude des personnages. Parfois, ce sont les petites choses qui sont les plus puissantes.

Il est difficile de ne rien vouloir. Parce que le besoin, le désir, une motivation et l’émotion font partie intégrante d’un personnage. Tout comme dans la vie réelle. La fiction est imitation.
Ces éléments dramatiques sont à l’origine de notre besoin de survivre, de se réchauffer, de manger, de trouver un foyer, de se reposer, de faire l’amour, de procréer. Ils sont puissants parce qu’ils sont des pouvoirs. Et Robin Mukherjee ajoute : Besoin. Réponse. Impulsion. Assentiment. Des mots certes, mais tout devient compliqué dans la psyché palpitante d’un personnage bien charpenté. Ce qui est exactement comme il se doit.

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