Les œuvres d’art atteignent des valeurs considérables. Elles sont considérées comme un investissement bien plus stable et profitable que d’autres bas de laines.
Mais l’art ou les antiquités ou encore les bijoux possèdent une intimité avec leur propriétaire que d’autres types de valeurs ne peuvent lui procurer.
L’art a donc une double influence sur un individu : sa valeur en tant qu’investissement mais aussi un impact émotionnel, un impact esthétique.
Lorsque de tels objets sont volés, ils sont souvent considérés comme irremplaçables. Rien ne ressemble plus à un lingot d’or qu’un autre. Par contre, le vol d’un bijoux qui porte une charge émotionnelle créera un vide chez son propriétaire qui ne pourra jamais être comblé par un autre objet.
Les raisons du vol
Il y a trois raisons principales qui conduisent au vol d’œuvres d’art.
- L’argent que procure le recel de ces objets.
- Un investissement pour un collectionneur peu scrupuleux qui mise sur la valeur financière de l’objet et dont la disparition ne peut qu’en augmenter la valeur nominale.
- Plus rarement mais intéressant sur le plan de l’intrigue pour un auteur, des raisons politiques ou sociopolitiques donc du terrorisme. Tel que le vol de Le Cri de Edvard Munch en 1994 imputé à des groupes anti-avortements.
Quels que soient les progrès des enquêteurs et leur spécialisation en la matière, le vol d’œuvres d’art, de bijoux ou d’antiquités connait une constante actualité.
Employer un tel motif dans une intrigue ne fera donc pas paraître celle-ci quelque peu surannée.
Une intrigue moderne ?
Si vous situez votre histoire au cours d’une période historique, il est prudent de tenir compte du fait que bien que l’humanité produise des œuvres d’art depuis plus de 40 000 ans, leur valeur vénale n’est considérée que depuis le début du vingtième siècle.
Donc parallèlement au marché de l’art, il s’est développé une véritable organisation autour du vol d’œuvres d’art. Et les trafiquants d’art se sont effectivement très bien organisés.
Les nouvelles collections attirent
Les ventes aux enchères, les vendeurs d’art et les trafiquants eux-mêmes ont besoin que de nouveaux artistes soient côtés. Cela alimente le marché puisque la quantité d’œuvres d’artistes disparus se réduit constamment, ne serait-ce que par leur acquisition par des musées.
De toutes façons, dès qu’une œuvre d’art, même unique, devient marchandise, il y a tout à craindre pour sa sécurité.
Il n’y a pas que les tableaux de maîtres
Effectivement, l’argenterie, le mobilier d’art, les livres rares, des gravures, la porcelaine et puis d’autres antiquités ont plus circulés que les tableaux.
Et que dire des memorabilia ? Et des voitures de collection ?
Il y a certainement à faire pour un auteur.
Et gardez aussi à l’esprit que ces objets sont souvent l’objet de modes. Pour des raisons diverses, il peut y avoir un engouement qui leur donne soudain une valeur improbable.
D’abord parce que l’histoire de ces objets est plus difficile à vérifier voire même celle de leur existence. Ce sont souvent des biens de famille que l’on n’a pas pris le soin de déclarer, ne serait-ce que pour une assurance.
Donc la légitimité d’un agent d’assurances jouant les détectives dans une intrigue doit être savamment réfléchie afin de rendre crédible la situation de ce personnage.
Car les propriétaires et leurs assureurs discutent rarement le montant de l’éventuelle rançon. Ce qu’ils veulent, c’est de voir revenir sain et sauf leur unique trésor.
Plus légitime sur le plan de l’intrigue est le vol d’objets issus de sites archéologiques. Les dégâts culturels que cause la fraude de tels artefacts n’ont d’égaux que l’énorme profit qu’elle génère.
Le crime organisé
La spécialisation se retrouve autant chez les enquêteurs que chez les criminels.
Et chez les acheteurs. Des sociétés d’investissements ont investi essentiellement dans les œuvres d’art (et pas seulement les tableaux).
De plus, les criminels eux-mêmes ne cherchent pas à revendre systématiquement les biens si mal acquis. Ils peuvent vouloir les accumuler pour des raisons diverses, plus sentimentales et émotionnelles que simplement matérielles.
Ce qui peut mener à la création de personnages tels que Vanessa Fisk dans Daredevil qui tient une galerie d’art. Etonnant non ? sachant qu’elle est le grand amour du méchant de l’histoire, Wilson Fisk.
Le crime organisé s’est donc rendu compte que le vol d’objets d’art était moins risqué que de dévaliser une banque. Et certainement plus lucratif.
Faire de l’argent facilement a toujours été très tentant.
Le profil des criminels
Selon les investigations des enquêteurs, le commanditaire est rarement le maître d’œuvre.
Considérons cette intrigue :
Un collectionneur passionné veut un tableau spécifique de Salvatore Dali. Les artistes ont des périodes dans leur vie d’artiste. Leur style change au cours des années.
Donc ce collectionneur averti veut posséder dans sa collection un tableau de Dali qui corresponds à la période impressionniste de ce dernier.
Notre collectionneur s’adresse donc d’abord à une agence de détectives pour retrouver le propriétaire actuel de ce tableau.
Tout serait trop simple s’il n’y avait pas un conflit. Le propriétaire du tableau ne veut pas vendre. Le collectionneur n’intervient pas directement dans la négociation. L’agence de détectives est suffisamment discrète ou ne possède pas l’information sur ce collectionneur qui l’a mandatée pour agir en son nom.
En d’autres termes, on ne peut pas remonter jusqu’à lui. Et puis, une approche trop directe pourrait faire monter le prix si le propriétaire était vendeur.
Ne pouvant acheter le tableau, notre collectionneur va donc s’adresser à l’un de ses contacts : un receleur.
Ce type d’individu est souvent difficile à repérer par les enquêteurs. Ils peuvent remonter jusqu’à eux mais la tâche est difficile. De quoi alimenter une intrigue, d’ailleurs.
Et même lorsqu’ils l’atteignent, la piste pour remonter jusqu’au commanditaire est encore parsemée d’embûches.
Le receleur
Le receleur joue un rôle de pivot dans le vol des œuvres d’art. Il obéit à deux principes :
Soit l’objet ne présente que peu d’intérêt pour d’éventuels acheteurs et sa revente sera donc difficile,
Soit cet objet est trop connu et donc trop facilement traçable.
Dans votre intrigue, vous devriez tenir compte de ces facteurs de choix pour décider de l’objet à escamoter même si ce n’est qu’un McGuffin.
Quelle que soit la motivation d’un receleur, on peut facilement imaginer la difficulté de se débarrasser de quelque chose qui possède une signification historique ou politique, surtout lorsque le forfait vient d’être commis.
C’est la principale raison pour qu’un receleur fonctionne sur ordre, pour un commanditaire. Le vol en lui-même n’est qu’une étape du processus. Tout a déjà été planifié pour que l’objet atteigne, aussitôt sa disparition, son nouveau propriétaire.
Avec les œuvres d’art et les bijoux, on est loin de l’image stéréotypée du petit receleur encombré d’objets divers tels que des ordinateurs, des écrans plats, des téléphones portables…
L’œuvre d’art et autres antiquités sont des objets bien trop sensibles pour qu’on les accumule dans l’espoir de les revendre un jour.
Et puis il y a des collectionneurs qui sont prêts à tout pour obtenir la ou les pièces qu’ils leur manquent.
Les enquêteurs
Les autorités ont mis en place des équipes spécialisées pour lutter contre ce fléau puisque le préjudice subi annuellement est estimé à 200 millions de dollars .
Des bases de données ont été établies afin de tracer les objets qui pourraient être vendus en salles des ventes à travers le monde. Des détails des pièces volées sont publiés dans les magazines spécialisés afin d’informer les revendeurs légaux sur l’origine des pièces mises en vente.
Les enquêteurs ne sont pas recrutés dans le tout-venant. Ils sont généralement eux-mêmes des amateurs d’art. Ils apportent ainsi une perspective de collectionneurs au sein de leurs unités ce qui est un apport inestimable pour leurs enquêtes.
Une des méthodes la plus généralement employée par les enquêteurs est l’infiltration. De plus, les différents services à travers le monde sont en contact permanent : un vol d’objet d’art dans une partie du monde est immédiatement connu des services spécialisés du monde entier.
Il est donc tout à fait crédible qu’un protagoniste, s’il est l’enquêteur, puisse faire avancer l’intrigue à partir d’informations qui pourraient, dans d’autres intrigues d’autres genres, sembler être le fait du hasard (une solution généralement mal vue par le lecteur).
La vitesse avec laquelle est disséminée l’information d’un vol d’objet d’art à la fois chez les professionnels et dans le public est un atout considérable pour les enquêteurs.
D’abord parce que les revendeurs honnêtes se tiendront à l’écart de l’objet mais aussi et surtout parce que les receleurs n’aiment pas manipuler un objet brûlant.
Les choses se tassent
C’est pourquoi la plupart des objets d’art et autres bijoux et antiquités sont mis sous bande le temps que le vol se fasse oublier.
Puis, des années plus tard, ils sont mis en vente ouvertement aux enchères, par exemple.
L’intérêt d’attendre que les choses se tassent n’est pas tant la sécurité des voleurs mais surtout que les objets prennent de la valeur au fil des années pendant lesquelles ils ont disparu de la circulation.
Une opinion favorable
Il faut noter aussi que les grands voleurs en antiquités et autres objets d’art qui ne vandalisent pas ce qu’ils volent reçoivent plutôt une opinion de gentleman cambrioleur dans l’esprit du public.
Néanmoins, leurs méthodes sont devenues de plus en plus violentes. C’est un fait moderne dont il faut tenir compte pour écrire une intrigue qui se veut actuelle et qui offre des scènes d’action solides.
En conclusion, une intrigue étendue
Ecrire sur un vol d’objet d’art ne peut se limiter à un monde aux frontières trop étroites. La diégèse de votre histoire sera plus crédible si elle décrit plusieurs mondes, plusieurs univers tels que des enquêteurs de plusieurs pays avec leurs propres personnalités, des receleurs dans différents pays, un processus qui inclut différentes étapes situées dans des lieux géographiques différents…