Une intrigue souvent se calque sur un modèle. Ce qui n’enlève rien par ailleurs à son originalité.
Considérons quelques motifs :
Un personnage qui ne demandait rien à personne se retrouve projeté dans une situation compliquée ou chaotique.
Il commence par répondre passivement ou de manière plus réactive aux événements qui surviennent qu’il se contente simplement de supporter.
Souvent il y a des forces ou d’autres personnages qui essaient de contrôler son destin. Puis au point médian de l’histoire, il décide de prendre en main le contrôle de la situation.
C’est alors que dans la seconde partie de l’acte Deux, il évolue en une personne plus proactive.
Et l’acte Trois valide son changement de personnalité par une ultime épreuve.
Autre possibilité :
Un personnage s’immisce dans un conflit qui ne le concernait pas. Il y a été attiré par un autre personnage, un objet ou une situation.
Ce personnage développe alors une véritable obsession envers ce qui l’a attiré dans ce conflit. Ce qui l’amène à fourrer son nez de plus en plus profondément dans des entrailles conflictuelles.
Lorsque le danger devient de plus en plus palpable, il choisit de ne pas s’en éloigner et alors l’ultime confrontation surgit où il fait face et vainc (habituellement) les forces antagonistes.
Une confrontation que ces dernières recherchaient d’ailleurs depuis le début.
Et encore un motif :
Deux étrangers aux personnalités naturellement conflictuelles sont réunies pour une improbable association. D’abord, ces deux personnages essaient d’ignorer ou de refréner leurs différences pour le bien de l’harmonie entre eux.
Au point médian de l’histoire, leurs failles respectives refont cependant surface. Le conflit entre eux est ouvert.
Une rupture temporaire est alors de mise. Mais le développement de l’histoire amènent ces personnages à comprendre l’importance de leur relation. Ce qui les incite à se réunir de nouveau et à s’engager loyalement l’un envers l’autre.
C’est ainsi que des histoires qui n’ont pourtant rien en commun répondent pourtant à un modèle d’intrigue. Ou de structure similaire dans le déploiement de leurs intrigues.
Une altérité seulement superficielle
La prémisse est différente, le genre est différent, le style, le ton, les personnages sont différents. Mais lorsque ces éléments dramatiques qui ajoutent à la différenciation sont effacés de l’histoire, la course de l’intrigue est essentiellement la même.
C’est le contenu qui individualise une histoire. C’est la nature des événements qui la constitue. Et ces événements s’inscrivent dans une structure.
Le contenu et la structure sont indépendants. Cependant, les événements peuvent s’adapter à la structure de manière à ce que celle-ci apparaisse comme un tout. Si un événement déstabilise la structure, c’est qu’il ne lui appartient pas. Il n’appartient pas au tout de l’histoire.
Partie intégrante d’un système, n’importe quelle prémisse de n’importe quel genre peut potentiellement être exécutée. Comme le lecteur se concentre sur les événements et les personnages, il ne s’aperçoit pas des similarités structurelles. Michael Welles Schock pense même que l’auteur n’en a pas conscience non plus.
Ainsi, malgré leurs différences superficielles, de nombreuses histoires suivent un modèle d’événements que l’on peut qualifier de structuraux. Mais comme les contextes dans lesquels surviennent ces événements sont particuliers, cette structure se dissout dans l’histoire.
Un modèle qui préserve la créativité
Dans un environnement particulier, une multitude pourtant disparate réagira de façon sensiblement similaire. C’est ainsi qu’il existe des tendances.
Ces modèles sont cependant culturels. Ils sont l’expression dramatique des valeurs, des idées et des concepts de croyance qui fondent une identité culturelle.
Cette identité culturelle détermine une vision du monde et des courants de pensée. Elle permet d’évaluer les choses. Un auteur qui appartient à une culture aura tendance à créer des cadres narratifs qui explorent ou soutiennent les mêmes idées et croyances.
Les contenus dramatiques seront différents. D’innombrables thèmes seront possibles. Mais les conflits seront développés et résolus selon la même notion de vérité.
C’est sur la base des mêmes croyances que le message d’un auteur sera fondé. Puisque s’il démontre son point de vue correctement, il proposera à son lecteur un modèle de code moral ou de comportement juste.
Puisque son lecteur et lui partagent les mêmes valeurs.
La créativité, cependant, n’est pas assujettie à son appartenance à une communauté, qu’elle soit sociale, spirituelle ou culturelle.
L’auteur est libre d’exprimer comme il veut ce qu’il a à dire.
Néanmoins un scénario est forcément limité par sa propre nature. Il s’agit d’une communication audiovisuelle. Puis il est nécessaire qu’il expose un conflit dramatique encore plus marqué que dans toute autre forme de communication.
Et son nombre de pages est standardisé entre 90 et 120.
Si la créativité devait être bornée, ce serait davantage parce qu’elle a choisi une forme d’expression qui ne lui permet pas une liberté totale mais certainement pas parce qu’inconsciemment (peut-être), elle suit un modèle d’intrigue.
La structure aide à intégrer le matériel au média
C’est d’autant plus vrai dans l’art scénaristique. On peut considérer que cet art est une recherche des meilleurs moyens de faire correspondre un discours narratif à un média audiovisuel.
Ainsi, la structure en trois actes s’est avérée très efficace dans ce dessein.
Quelque soit le chaudron culturel, quelque soit l’arrangement entre l’intrigue et ses personnages, une telle structure permet de délivrer le message sous-jacent d’une manière dramatique et claire.
L’auteur reste libre de son matériel (intrigue et personnages). C’est-à-dire de son contenu.
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