Il est important que vos personnages soient en accord avec la réalité de votre histoire, le contexte de votre histoire. Un univers fantastique ou de science-fiction ne change rien à l’affaire.
A l’intérieur de la réalité décrite, chacun des personnages doit rester vrai.
La réalité de la fiction est ce que vous transcrivez de votre imaginaire. Une fois qu’elle est établie, vous ne pouvez plus bouleverser l’ordre établi sous le prétexte de solutionner un problème avec votre scénario.
Peter Dunne explique que si les critères sociétaux, moraux de votre univers ne sont pas constants, vous risquez de violer la légitimité de vos personnages dans cet univers.
Vous infirmeriez toutes vérités qu’ils sont censés exprimer.
Le protagoniste
Le protagoniste est le personnage qui engendre l’intrigue. Ses expériences sont au centre de l’histoire. C’est au travers de son évolution (son arc dramatique) que le lecteur peut être capable de comprendre lui aussi certaines vérités sur le monde et en tenir compte.
Connaître son personnage est important mais il ne suffit pas de le reconnaître superficiellement. Il vous faut posséder une profonde compréhension de son être, de ce qui le fait se mouvoir dans la vie, son cœur (ses sentiments, ses passions, ses tendances…) mais aussi son âme (sa vraie nature, sa conscience et son inconscient).
Vous aurez certainement tendance à mettre beaucoup de vous dans votre héros. Il est probable aussi que vous découvrirez en lui des caractères que vous n’avez pas expérimentés vous-mêmes. C’est naturel et souhaitable.
Plus vous vous identifierez à votre héros et plus, selon Peter Dunne, vous écrirez passionnément sur lui.
Travaillez ses forces et ses faiblesses. Veillez à garder un équilibre, une harmonie entre ce qui fait sa force et ce qui le rend vulnérable et faites de même avec l’antagoniste.
Ce n’est pas parce qu’il est le méchant de l’histoire que seules les valeurs négatives doivent être mises en avant.
Ce que vous devez savoir à propos de votre protagoniste, c’est ce que signifie le parcours que vous allez lui faire faire dans votre histoire parce que votre héros est la personnification du thème de celle-ci.
L’antagoniste
Il ne faut pas que vous mésestimiez votre antagoniste quel qu’il soit (il pourrait être la nature ou une institution).
Le personnage qui incarne l’antagonisme dans votre histoire doit être complexe, réel et intelligent. Lorsqu’il représente une entité, il doit être cependant personnifié afin d’amener le conflit sur un plan personnel. Sinon, le lecteur n’accrochera pas au conflit qui se déroule sous ses yeux.
En fait, l’antagoniste représente les plus grandes peurs du protagoniste. Il est capable d’obtenir le pire chez votre héros.
Si René Belloq est si fascinant, c’est parce qu’il est à l’opposé de Indiana Jones. Il incarne la part la plus sombre de sa personnalité et l’on est en droit de se demander jusqu’à quel point il ne fascine pas aussi Indy.
Le protagoniste sent bien que cet antagoniste connait ses points faibles et peut l’inciter à commettre des actes répréhensibles. Si le mal surgit, ce sera parce que l’antagoniste a trouvé chez le protagoniste le moyen de le lui faire exprimer.
Bien sûr que le méchant de l’histoire veut nuire au héros et l’empêcher d’atteindre le but qu’il s’est fixé.
Mais ce sera le protagoniste qui causera sa propre perte, l’antagoniste ne faisant qu’appuyer sur les rouages les plus sombres et les plus secrets du héros.
Le héros reconnait tant de lui-même dans l’antagoniste que cela l’effraie et l’affaiblit. Le conflit repose davantage sur la similarité que sur leurs différences.
Les êtres humains sont différents par nature. Ce sont leurs âmes au sens jungien du terme qui les différencient. Mais la diversité des âmes ne saurait être une source de conflit.
Cependant, en chacun de nous, le bien et le mal se dispute ou s’harmonise pour créer notre unité. Dans une fiction, le mal est simplement incarné dans l’antagoniste.
Mais il ne s’agit pas nécessairement de faire le mal. La fonction de l’antagoniste est de s’opposer au héros, de contrecarrer son objectif parce qu’il représente une valeur opposée à celle qui anime le héros. Dans la vie réelle, nous avons intégré ces deux valeurs.
Peut-être devriez-vous concevoir votre antagoniste en tenant compte de la faiblesse majeure de votre héros puisque l’antagoniste par définition appuie là où çà fait mal.
Le héros ne peut pas s’en sortir tout seul
Peter Dunne aborde le concept d’alliés (ou sidekicks) du héros en expliquant que le quotidien, les habitudes, en un mot la normalité de la vie anesthésie ou ankylose le protagoniste.
Et lorsque soudain, il est face à un échec ou une menace quels qu’ils soient, il doit apprendre d’un personnage qui éprouve une sympathie pour lui (donc que le protagoniste a tendance à croire et à faire confiance) qu’il n’a pas tous les atouts en main pour défendre ce qui est réellement en jeu.
A propos de sympathie, Peter Dunne ajoute que cet allié qui ouvre les yeux au héros n’entre pas dans l’histoire particulièrement embéguiner du héros.
Au contraire, cet allié commencera par mettre en doute, par contester la démarche du héros dans la quête de son objectif.
Et comme le protagoniste est pressé de résoudre son problème, il va dans un premier temps tenter d’éloigner cet allié ou de s’en éloigner.
Structurellement, il est commun que le héros lorsqu’il lui est présenté pour la toute première fois le problème qu’il devra résoudre (un problème qu’il ne conçoit pas ou ne perçoit pas encore comme tel) refusera de le prendre en charge, disons par principe de prudence.
Ce refus de l’aventure qui se présente pourrait être illustré par cette relation un peu conflictuelle entre le héros et cet allié (même s’il n’en a pas encore tout à fait les contours).
Cette confrontation et cette prudence naturelle entre eux leur permet de se découvrir et de s’apprécier mutuellement à travers les étapes d’états émotionnels plus intenses.
On retrouve ce schéma relationnel dans les séries, dans les tandems célèbres, enfin dans toutes ces histoires où deux personnages font équipe.
Il est bon cependant de déterminer qui sera le personnage principal dans l’équipe qu’ils constituent.
Ce qui est intéressant, c’est que les deux personnages sont souvent obligés de travailler ensemble malgré leurs dissensions pour survivre.
Ce qui permet à ces personnages de se compromettre, de s’exposer à nu (leurs vulnérabilités et leurs faiblesses), de se révéler pour le plus grand avantage du lecteur et pour compliquer les situations.
Plus une situation présentera de complexité et plus elle sera intéressante à lire (et aussi à écrire).
Une dynamique relationnelle
La dynamique issue de la relation entre un protagoniste et cet allié (allié est à considérer comme un terme générique et donc protéiforme, vous donnez la forme que vous voulez à cet allié) crée un mouvement interne chez les personnages.
Quelque chose se produit à l’intérieur d’eux. Il y a transformation, voire transmutation quoique la transmutation n’est pas totale. Il s’agit plutôt d’une révélation que le personnage découvre sur lui-même, processus que l’on nomme arc dramatique en dramaturgie. La révélation elle-même est nommée anagnorisis.
Cet arc dramatique s’accompagne souvent d’une peur irraisonnée. Quelque chose se modifie en nous et cela nous effraie. La comparaison que nous allons faire est peut-être un peu difficile, mais imaginez que l’on vous diagnostique que votre corps est en train de mourir.
Ne croyez-vous pas que ce quelque chose qui se modifie matériellement en vous s’accompagnerait d’une prise de conscience, de révélations sur le sens que vous donniez à la vie jusqu’à maintenant, d’une transformation de votre pensée ?
Nous n’insistons pas, c’est un sujet à débattre. Considérons plutôt que l’arc dramatique est un parcours interne vers la vérité et que le moteur qui met en branle l’arc dramatique, qui lui permet de se développer est la relation conflictuelle entre le héros et un allié choisi pour son influence sur la destinée du héros.
Une influence d’ailleurs mutuelle puisque les effets de la relation ont prises sur chacun des personnages.
La conclusion de l’arc dramatique qui consiste essentiellement à surmonter ses propres peurs est souvent l’objet d’une récompense : amour, prix… A l’auteur de choisir entre absolution, punition, gratification, reconnaissance… qui sied le mieux à son histoire.
Comprenez bien que l’arc dramatique est affaire d’émotions. Cet arc s’inscrit dans une structure émotionnelle comme l’écrit Peter Dunne.
Cette structure émotionnelle permet à l’auteur de s’adresser directement au cœur de son lecteur, à ce qui émeut son lecteur. C’est en faisant appel aux émotions, au ressenti émotionnel du lecteur devant les situations que l’auteur décrit que celui-ci espère l’atteindre et lui faire part de son message, de ses intentions à défaut de le convaincre.
L’auteur se sert de leviers qui connotent un combat personnel même si le lecteur n’a jamais fait l’expérience des circonstances ou des situations que l’auteur a mises en place.
Un combat personnel ou encore tomber amoureux sont des concepts universels, reconnus par le plus grand nombre.
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