Ecrire sur ce que l’on connait semblerait plus facile comme approche. Cependant, c’est assez trompeur et bien plus compliqué qu’il n’y paraît.
Mais, ce que vous connaissez le mieux et que vous souhaiteriez partager, ce n’est pas un savoir-faire mais ce que nous pourrions appeler une vérité émotionnelle. En effet, il s’agirait d’une sorte de sagesse personnelle qui vous permettrait de supporter votre histoire.
A ce sujet :
VERITES FACTUELLE & EMOTIONNELLE
Se connecter au lecteur
Pour Peter Dunne et pour d’autres, écrire une histoire revient à établir un lien entre votre vérité et celle du lecteur.
La vérité émotionnelle se distingue de la vérité factuelle. Une vérité factuelle relate un fait sans émotion, sans passion. Votre vérité émotionnelle relate le fait à travers votre propre filtre d’émotions, de ressentis. C’est en quelque sorte une connaissance faite avec le cœur.
La vérité émotionnelle se constitue de toutes vos expériences de vie qui s’inscrivent dans vos souvenirs.
Par exemple, vous pourriez décrire votre première voiture avec une emphase que vos sentiments vous inspirent mais cependant, cela reste une voiture. Cette voiture est une vérité factuelle et néanmoins, votre description n’en est pas moins fausse. C’est votre vérité à vous sur un fait (qui peut même être prouvé s’il est historique).
L’accumulation de toutes vos expériences produit une sagesse. C’est holistique comme principe : la somme de toutes vos expériences est différente des parties qui la composent et nous pouvons la nommer sagesse.
C’est cette sagesse que vous devriez pouvoir partager dans votre histoire.
Et ce que vous devriez vous demander en la partageant est à quel point votre lecteur ou votre lectrice apprendront de votre sagesse. Ne confondez pas l’intelligence et la sagesse. Peter Dunne insiste même sur l’idée qu’un protagoniste même très intelligent ne parviendra pas à résoudre son problème s’il n’acquiert pas une sagesse, c’est-à-dire s’il n’apprend de ces épreuves, obstacles et erreurs.
La sagesse ainsi acquise lui permettra de faire face d’abord à son problème personnel et ensuite à réussir son objectif dans l’histoire.
L’émotion
Les émotions colorent nos souvenirs. Raconter une histoire, ce n’est pas seulement relater des faits bruts mais de donner cette information nimbée par nos sentiments, nos passions, nos émotions, nos ressentis. C’est le même fait mais on y a apporté une telle charge émotionnelle qu’elle ne peut qu’interpeller le lecteur.
Vous vous livrez à nu. Vous devez être capable de générosité émotionnelle. D’où le concept de sagesse car pour partager, pour être généreux, il faut posséder. Ensuite, vous faites preuve d’altruisme en redistribuant un savoir qui n’a de valeur que parce que vous vous êtes personnellement investi en lui.
L’émotion que vous ajoutez à vos perceptions doit non seulement améliorer votre vie mais aussi celle de ceux qui vous entoure.
Le héros et sa vérité émotionnelle
Dans le cours de l’intrigue, le héros ou l’héroïne devront prendre quelques leçons de vie à travers leurs épreuves (donc leurs expériences de vie). C’est nécessaire s’ils veulent survivre à leur aventure.
Les obstacles (autant psychologiques, intellectuels que physiques) vont vite leur faire comprendre qu’ils sont intellectuellement et physiquement limités pour résoudre le problème qui est le leur. Si l’on compare avec la théorie narrative Dramatica, on peut dire qu’ils n’ont pas encore les moyens pour mettre en place un processus de résolution du problème.
La morale que véhicule l’histoire (l’histoire, en effet, possède ses propres valeurs du bien et du mal) et les défis émotionnels qu’elle impose au héros vont lui permettre de découvrir non seulement une morale mais aussi que ses capacités émotionnelles sont fortes. Il acquerra une vigueur spirituelle qui lui permettra alors de dépasser ses limites et de réussir son double objectif interne et externe.
Pour des raisons dramatiques évidentes, ce voyage ne sera pas facile à accomplir.
Nous pouvons même aller plus loin en parlant de vécu corporel, c’est-à-dire de l’image que le héros ou l’héroïne se font de leur corps. Cette image est le reflet de l’image que vous vous faites vous-mêmes de votre propre corps.
Etes-vous capable de décrire précisément l’image que votre voisin se fait de son corps ? Il est plus facile de projeter son vécu corporel dans celui de son personnage. Il en est de même avec la vérité émotionnelle. C’est votre vérité que vous insufflez dans la psyché de votre personnage qui deviendra alors le vecteur pour créer l’empathie chez le lecteur/spectateur.
Nous nous développons dans nos rapports à la vie. Considérons une expérience universelle : la perte. Celle-ci se présente sous différentes formes : perdre sa dignité, perdre la foi, perdre l’espoir, perdre un amour…
Nous avons tous ressenti ce que signifie une perte et bien qu’apparemment nous soyons dissemblables, ce moment, ce rapport à la perte nous unit. L’auteur et l’autrice doivent saisir cette occasion de recréer ce lien avec le lecteur et la lectrice. Qu’il s’agisse de corriger une injustice ou bien encore de retrouver ce qui a été perdu… cette universalité qui nous unit, vous la partagerez avec votre héros, avec votre lecteur.
Le héros et son passé
Au cours de l’intrigue, votre héros devrait être obligé de faire face aux pertes qu’il a connues avant le début de l’histoire. Il y parviendra en découvrant les défenses qu’il avait mises en place pour les oublier.
Il lui était nécessaire de les refouler pour survivre mais le temps doit venir où ses souvenirs refoulés doivent refaire surface. Parce que ses défenses ne peuvent à jamais le protéger. Et ce temps est le temps de l’intrigue.
Un double mouvement contradictoire est à l’œuvre ici. Alors que dans l’intrigue, les choses vont mal pour le héros, en son for intérieur, les choses s’améliorent. Il atteint graduellement à la vérité et cette vérité le libérera de son joug intérieur. C’est ainsi qu’à la fin de l’histoire, il retrouve un nouvel équilibre de vie plus sincère avec sa vraie nature.
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