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Il n’y a peut-être rien de plus narratif que l’apparence de la réalité. Les images ont une validité, un poids que les mots ne peuvent rendre.
Considérez la traversée du miroir dans Orphée de Jean Cocteau :
Cette scène est un brillant exemple d’écriture d’un scénario qui crée des effets magiques avec des moyens très simples.
Cocteau, metteur en scène, devait tourner cette scène avec un budget très bas. Alors Cocteau le scénariste a fait en sorte que son scénario n’appelle pas d’effets spéciaux compliqués. Et il a utilisé un langage très simple pour le faire.
Ecrire un scénario, cela revient à écrire pour un support qui utilise des images en mouvement pour apporter du sens. Ces images et la manière dont elles sont assemblées sont le langage du film.
Pour écrire un scénario de court-métrage efficace, vous devez comprendre que les images peuvent raconter votre histoire de manière bien plus appropriée que n’importe quels dialogues ou narrateur, même bien écrits.
Donc pour être logique avec vous-mêmes, lorsque vous considérez un matériel pour votre scénario de court-métrage, vous devez vous poser très tôt dans le processus la question primordiale :
Est-ce que cette histoire se prête à être racontée en images ?
Deux choses à retenir :
Les images nous renseignent sur le personnage
Analyze and imitate; no other school is necessary nous dit Raymond Chandler.
(Analyser et imiter ; aucune autre école n’est nécessaire)
La tenue vestimentaire, l’expression des personnages, leurs attitudes sont des indices qui fournissent des informations précieuses à l’attention du lecteur sur la personnalité et la fonction des personnages dans une histoire.
John August conseille de jouer la carte de l’économie. Par exemple, si votre personnage est un manchot qui joue de l’accordéon et qui est très nerveux à l’idée de rencontrer son vrai père, trois informations à propos du personnage sont à l’œuvre ici :
1) Il est manchot
2) Il joue de l’accordéon
3) Il est très nerveux à l’idée de rencontrer son père biologique.
Trois informations probablement toutes importantes pour votre histoire, mais le format du court-métrage vous force à vous demander ce qui compte le plus.
Le fait qu’il soit manchot ou qu’il joue de l’accordéon ou bien qu’il soit nerveux ?
Vous aboutirez probablement à la conclusion que vous devrez supprimer ou altérer certains aspects du personnage afin de ne communiquer seulement l’information qui permettra à l’intrigue de démarrer.
Le modèle du court-métrage consiste à présenter un personnage qui fait face à une situation, prend la décision d’agir et il s’ensuit une conséquence.
Beaucoup de courts ne perdent pas de temps à détailler leurs personnages, la première impression est toujours la bonne (du moins du point de vue narratif), alors il est important que les premiers détails soient suffisamment significatifs pour capter l’attention du lecteur et la diriger vers votre intention.
Les images nous renseignent sur la situation du personnage
Les images permettent d’instaurer une atmosphère, une tonalité pour une scène (avant même que le personnage soit présent).
Conjointement à l’image, le son peut jouer un rôle important dans l’apport d’informations pour le lecteur.
Les images sonores peuvent élargir le cadre hors de l’espace visuel et étendre la signification de ce qui est montré par l’usage du son comme une métaphore. Lorsque ces images sonores sont une part intégrale de l’histoire, elles sont habituellement mentionnées dans le scénario.
Robert Bresson dit que le son évoque toujours une image alors qu’une image n’évoque pas toujours un son.
Considérez cet extrait de Pickpocket (1959) de Robert Bresson :
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Notez comme nous l’avons signalé plus haut comment sont communiqués les statuts sociaux des protagonistes de la scène :
– Le héros (Michel) qui sert de narrateur est vêtu de manière assez négligée,
– Le couple (les victimes de Michel) apparaît comme appartenant à une classe sociale assez élevée.
Leurs seuls tenues vestimentaires et leurs attitudes ont suffi pour transmettre l’information : économie de temps.
Dans cette scène, Michel essaie de trouver le courage de s’emparer discrètement d’une liasse de billets dans le sac de la dame.
En fond sonore, nous entendons l’annonce puissante de la prochaine course, le fort tintement de la cloche, le martèlement des sabots et les clameurs de la foule que nous ne voyons pas mais qui semble être tout autour de nous.
Pendant ce temps, la caméra est posée fixement observant le couple qui sont face à nous ainsi que derrière et entre eux, Michel.
Le fond sonore ainsi que les réactions du couple qui suit la course installe la situation : nous sommes effectivement dans un champ de courses et une course a lieu. Mais cette course n’est jamais montrée. Elle ne pollue pas notre attention qui doit se porter (c’est l’intention de l’auteur) sur le combat interne que se livre le personnage principal, Michel.
A suivre :
ECRIRE UN COURT-METRAGE – PART 4