L’exposition prend place dans l’acte Un. C’est logique parce que lorsqu’un lecteur découvre votre script, il n’a aucune idée de vos personnages ni du monde que vous décrivez. Il vous faut donc les lui présenter.
Vous devez clairement établir le lieu de l’action, ce qui inclue aussi la période. Les 15 premières pages de votre script (pour un scénario de 120 pages) doivent permettre au lecteur de comprendre votre monde, de savoir s’il se conjugue au passé (et quel passé), au présent ou au futur.
Si vous ne parvenez pas à entraîner votre lecteur dans votre monde, cela créera une confusion dans son esprit ce qui ouvre grande la porte à une réticence à continuer la lecture de l’histoire.
Plus vous serez spécifique dans vos descriptions (lieux et personnages) c’est-à-dire en donnant des détails significatifs et plus votre lecteur appréciera votre monde. Il n’aura pas ce sentiment amer de vous avoir donné un peu de son temps à la lecture de votre histoire.
La première étape lorsque vous vous documentez sur un sujet devrait porter sur les lieux de l’action. Vos personnages appartiennent bien souvent à une communauté (petite ou grande). Cette communauté a façonné un monde bien à elle qui influe sur le comportement et les points de vue des hommes et des femmes qui la composent (pensez aux Amish, par exemple).
Les lieux où cette communauté vit sont partie prenante de la psyché de vos personnages, de leur toile de fond c’est-à-dire les événements significatifs dans leur passé (famille, amour, les blessures qui les ont à jamais marquées).
Dans le labyrinthe adapté de The Maze Runner de James Dashner, l’action nous situe dès les premières pages dans un vaste pré de la taille de plusieurs terrains de football entouré de hauts murs (dénommé The Glade et le Bloc dans la traduction française).
Ce bloc qui est au centre d’un labyrinthe est symbolique. The Maze Runner est une allégorie, une sorte de rite de passage vers l’âge adulte. Mais ce Bloc comme ils l’appellent est le lieu de l’action, il est donc crucial de le décrire à la fois comme un espace idyllique de vie (pour ceux qui ne sont pas prêts ou qui refusent de grandir) et un lieu dont il faut absolument s’échapper (pour ceux qui répondent inconsciemment à l’appel vers cet autre étape de leur vie).
Les lieux de l’action déterminent aussi le ton que vous donnez à l’histoire ou à la scène. Si vous présentez un personnage en pleine tempête de neige en Sibérie, la tonalité que vous évoquez sera très différente d’un personnage qui souffre d’un coup de soleil sur une plage face à une mer d’un bleu incomparable.
L’idée lorsque vous décrivez un lieu est de créer de la profondeur et de la réalité à votre monde, vous le rendez tangible. Vos personnages évoluent dans ce monde, ils réagissent à ce monde et pas seulement dans leurs relations avec les autres.
Vous devez rendre concret votre monde en introduisant dès les premières pages du script des scènes visuelles (montrez, mais n’ajoutez les dialogues que si cela est absolument nécessaire) ou des anecdotes qui informent ouvertement le lecteur sur l’époque et les conditions de vie de vos personnages dans leur environnement naturel ou social. Insistez sur ce qui est pertinent avec vos personnages. Si votre personnage est un seigneur du moyen-âge, commencez par décrire son château et non pas la Cour des Miracles.
Si vous créez une réalité différente, montrez les différences qui existent entre votre réalité et notre réalité et faites en sorte que ces différences soient significatives du monde que vous avez imaginé.
Si ces différences sont incapables de justifier cette autre réalité, réfléchissez alors à transposer votre histoire dans notre réalité.
Regardez comment les origines kryptoniennes de Superman décrivent un monde dont la réalité n’a aucun écho dans notre monde quotidien. Pour éviter de vous embourber, soyez simple et logique.
Pour introduire vos personnages, mettez-les dans une situation qui révèle quelque chose de vrai sur leur personnalité. Cherchez les détails comme autant d’indices visuels qui permettront au lecteur de se faire une idée sinon précise du moins intrigante sur vos personnages principaux.
Le lecteur devrait avoir une vue claire du personnage, de l’esprit de celui-ci à travers des situations. Ces situations sont comme des associations d’images ou d’idées qui évoquent chez le lecteur des impressions et des sentiments qui doivent normalement l’accrocher un peu plus fermement à votre personnage, étape importante pour le décider à suivre ce personnage tout au long de son aventure et d’éprouver des craintes et aussi d’espérer que le personnage s’en sortira. Et cela ne fonctionne pas seulement avec les héros. Vous pouvez même réussir à faire aimer le méchant de votre histoire.
Non seulement, le lecteur doit comprendre que le personnage que vous lui présentez est l’un de vos personnages principaux mais il doit aussi sentir ce qui le caractérise. Une jeune femme de 22 ans par exemple a certainement un point de vue et des perspectives sur sa vie totalement différentes de cette même jeune femme à 28 ans. Vous devez donc connaître intimement vos personnages pour faire comprendre à votre lecteur que cette jeune femme a 22 ans et non 28 et surtout ce que cela implique pour ce personnage.
La tenue vestimentaire d’un personnage révèle aussi des choses sur son caractère. Mais vous ne devez pas vous contenter simplement de décrire à quoi ressemble un personnage (beau ou laid, jeune ou vieux, s’habille chic ou négligé…), vous devez aller plus loin jusqu’à décrire aussi des scènes révélatrices de son caractère.
Placez votre personnage dans une situation où sa véritable identité, sa vraie nature ne sera pas masquée. Vous donnerez ainsi au lecteur des indications précieuses à la fois sur le comportement du personnage et les lieux où il évolue. Dans un script, la première impression que l’on se fait d’un personnage est toujours la bonne. Cette première impression décidera ou non de la connection du lecteur avec votre personnage.
Prenons l’exemple d’un joueur invétéré, compulsif comme l’on dit. Son problème majeur est le jeu et il doit le résoudre avant la fin de l’histoire. C’est son objectif et le Story Goal.
Toute l’intrigue portera sur les difficultés qu’il rencontrera pour y parvenir. Maintenant pour présenter ce personnage et cette faille majeure dans sa personnalité (son addiction au jeu), il suffit de l’introduire (dans l’Opening Image, par exemple) avec une scène qui décrit l’ambiance d’un casino, où il est assis à une table de Black Jack et faire comprendre qu’il a misé gros. Et probablement, le faire perdre.
A partir des informations que nous pouvons tirer de cette scène, nous déduisons que notre personnage est un gros joueur et qu’il prend des risques (l’argent misé et perdu était important). A partir de ces idées en viennent d’autres. Puisqu’il est prêt à miser de grosses sommes sur un jeu de hasard, qu’en est-il de sa famille ? de ses revenus ? de son équilibre mental ?
Son addiction est-elle prête à les sacrifier pour se satisfaire ?
Manifestement, il y a des gros enjeux pour ce personnage (et pas ceux qu’il mise, évidemment). Sa famille, sa déroute financière, son emploi.. Tout est dans une situation de risque.
Il est important aussi de bien distinguer vos personnages. Pour éviter toute confusion entre les personnages pendant la lecture, ils doivent être aussi différents que possible les uns des autres. Les dialogues peuvent vous y aider. Comme l’écrit William C. Martell, vous devriez pouvoir reconnaître vos personnages rien qu’à la voix lorsque vous recevez un coup de téléphone et que vous identifiez votre interlocuteur rien qu’à sa voix donc sans le voir.