Le premier et le plus important élément de votre intrigue est son but, le problème que soulève votre récit (Story Goal). C’est l’idée-force autour de laquelle toute votre intrigue s’articulera.
Sans ce Story Goal, votre intrigue ne sera qu’une suite d’événements posés là au petit bonheur (Paul Ricœur usait du mot hétérogène) et votre lecteur se demandera ce que votre histoire cherche à dire. Cet objectif est donc un moyen narratif pour cimenter en un tout cohérent un ensemble d’événements qui pris séparément sont certainement autonomes et significatifs mais sans rapport avec votre récit si vous ne les assemblez d’abord.
Story Goal : Signification
Et lorsque le lecteur se rendra compte que votre intrigue n’a en fait rien à dire (et cela arrivera vite), votre scénario sera refermé sans aucune chance de sursis.
Lorsque vous avez une idée précise de votre thème (le thème est le problème que vous soulevez avec votre récit), le lecteur aura un contexte entre les limites duquel il pourra juger de la pertinence de chacun des événements que vous décrivez.
Mais plus que cela, si votre thème est clairement défini dans votre esprit et sans qu’il le soit nécessairement dans celui de votre lecteur, celui-ci se trouvera malgré cette lacune émotionnellement engagé avec votre histoire.
Car même s’il perçoit confusément les liens entre les événements et entre ceux-ci et votre thème (globalement, votre histoire), il sera entraîné par le fil des événements. Votre histoire l’intéressera et il voudra en connaître l’issue.
Avec un thème clair, votre récit aura du sens, il parlera à votre lecteur.
Cependant, il y a une différence entre le thème et le Story Goal car ce dernier emprunte un chemin plus direct pour parler à votre lecteur.
Prenons MacBeth. Le thème pourrait être l’ambition ou l’orgueil ou encore la destinée contre le libre-arbitre.
Le Story Goal répond plutôt à la question de savoir pourquoi un protagoniste fait ce qu’il fait.
Qu’est-ce qui le motive ?
Pourquoi MacBeth tue le roi ? Parce que son objectif est de devenir roi (plus exactement, il veut créer une dynastie).
Le thème est porteur de sens mais il n’est pas suffisant pour retenir l’attention de votre lecteur. Pour accrocher votre lecteur, vous devrez vous concentrer sur votre protagoniste et sur son objectif.
Induit par votre thème, le Story Goal (c’est-à-dire l’objectif du protagoniste) explicite les motivations de celui-ci. Il décrit ce qu’il veut accomplir et l’énergie qu’il déploie pour résoudre son problème.
Définissons le Story Goal :
- Que veut votre protagoniste ?
- Quel problème cherche-t-il à résoudre ?
- Pourquoi fait-il ce qu’il fait ? Qu’est-ce qui motive ses actes ?
Lorsque vous aurez répondu à ces 3 questions fondamentales du Story Goal, vous pouvez commencer à établir les grandes lignes de votre intrigue. Gardez à l’esprit que votre protagoniste peut avoir deux types d’objectifs : extérieur et intérieur.
Un objectif extérieur serait par exemple de découvrir quelque chose (on l’assimile souvent à un désir). Sur le plan intérieur, l’objectif de votre protagoniste pourrait être d’adopter un nouveau point de vue sur le monde ou de devenir quelqu’un d’autre (généralement un être meilleur) ou plus subtile, d’expier ses fautes (cet objectif interne est souvent considéré comme un besoin. Donc, il est bon de distinguer le besoin et le désir). Assister à la transformation du héros au fil du récit est d’ailleurs assez passionnant.
Le souci qui peut se poser lors du choix de votre Story Goal est de l’extirper des nombreux objectifs et problèmes immédiats que votre héros rencontrera au cours de son périple (que l’on nomme aussi le Hero’s Journey).
Une caractéristique cependant du Story Goal le distingue des autres enjeux possibles. Tous les personnages (Dramatis personæ) de votre histoire ont un enjeu dans la réussite ou l’échec de l’objectif de votre personnage principal. En plus de celui-ci, ils sont tous impliqués par le Story Goal, c’est-à-dire par le problème de votre héros.
Dans MacBeth, tous les écossais souffrent d’avoir un roi immoral sur le trône. Ils sont donc tous concernés par le retour de MacBeth à la régence quel que soit les moyens employés. C’est un schéma que l’on retrouve d’ailleurs dans nombre de récits de fantasy.
Bien sûr, il y a d’autres moyens pour représenter un objectif dont l’issue concerne les autres personnages du récit.
Dans Casablanca, tous les personnages (même ceux qui apparaissent brièvement) se battent ou pour quitter Casablanca (ce qui équivaut pour eux à la liberté) ou bien pour les nazis, empêcher les autres personnages de gagner cette liberté. Victor Lazlo (le protagoniste) parvient à fuir Casablanca à la fin mais il est clair que cette fuite signifie aussi la liberté pour les autres personnages (Ilsa, Richard Blaine et le Capitaine Renault).
Dans Miracle sur la 34° rue, l’objectif est de rendre la foi, d’avoir confiance en soi, d’avoir confiance dans les autres.
Le personnage principal, un vieil homme qui dit s’appeler Kris Kringle doit convaincre une petite fille qu’il est le Père Noël. En chemin, il doit d’ailleurs convaincre toute la ville de New York qu’il est le Père Noël en tentant de prouver son identité devant un tribunal.
Mais les autres personnages ont aussi leurs propres doutes. L’avocat de Kringle doit essayer de convaincre la mère de la petite fille de croire suffisamment en lui pour qu’elle accepte de l’épouser ; La direction du grand magasin lutte pour tenter de se convaincre d’une nouvelle politique plaçant les intérêts de leurs clients avant les intérêts et le profit du magasin ou encore le jeune portier qui a du mal à croire qu’il peut apporter quelque chose aux autres en jouant le rôle du Père Noël.
Une fois que votre Story Goal (le principal objectif de votre héros) est déterminé, reconsidérez l’importance de cet objectif pour les autres protagonistes. Ont-ils le même type de problème pour lequel ils doivent trouver ou ne pas réussir à trouver une solution ? ou encore leurs espoirs reposent-ils sur le succès ou l’échec de l’objectif du protagoniste ?
Un grand merci pour l’aide que vous voudrez bien nous apporter. Si vous appréciez Scenar Mag, supportez-nous. Ne restez pas indifférents à cet effort de partage. Faites-nous la grâce d’un don. Merci