Luke la main froide (1967)
réalisé par Stuart Rosenberg
écrit par Donn Pearce et Franck R. Pearson d’après le roman de Donn Pearce
Luke la main froide est l’étude émouvante d’un non-conformiste, anti-héros solitaire qui obstinément résiste à l’autorité et aux institutions. Une des affiches du film portait l’accroche :
« The man…and the motion picture that simply do not conform. »
L’homme… et le film qui simplement ne se soumettent pas.
Avec ce film éclatant, le réalisateur Stuart Rosenberg fit un des films majeurs des années 60, une décade qui vit la montée de protestations contre le pouvoir en place. Le film en fait un de ces thèmes majeurs.
Une réplique du film perdure encore de nos jours :
« What we have here is…failure to communicate. »
Ce que nous avons ici est.. un problème de communication.
Les films de bagne ont une longue histoire dans l’industrie du cinéma. Cependant, l’une des scènes mémorables de Luke la main froide est le concours d’avaleur d’œufs durs qui révèle chez Luke une obstination à prouver comment l’impossible est possible. D’ailleurs, le numéro de prisonnier de Luke (37) est une référence à L’Évangile selon Saint Luc (le verset 37 du chapitre 1 : « Car rien n’est impossible à Dieu »).
Un récit riche de symbolisme religieux
Le récit est riche de symbolisme religieux avec des références et une imagerie qu’il assume en filigrane. Luke a d’ailleurs été vu comme une figure moderne messianique, ministre d’un groupe de disciples refusant de céder à l’oppression.
Le thème du film :
Un nouveau venu transforme les détenus d’un bagne et se sacrifie à la fin.
ressemble à celui du héros de Vol au-dessus d’un nid de coucou de Milos Forman. Il est aussi facile de rapprocher ce thème du sacrifice du Christ sur la Croix.
Lors de la scène d’ouverture (dans le sud des Etats-Unis en 1948), Lucas Luke Jackson est arrêté pour le délit mineur d’ivresse sur la voie publique et de destructions de parcmètres au cours d’un acte provocateur de rébellion.
Pendant que, négligemment, il sectionne les têtes des parcmètres, l’un d’entre eux affiche le message VIOLATION. Cette scène nous prépare à son arrestation imminente. Au moment de celle-ci, Luke se moque des agents en leur faisant une grimace.
Cette scène d’ouverture tient en une page du scénario et elle résume à elle seule la personnalité de Luke. Bien que la destruction des parcmètres pourrait être mise sur le compte d’une personne en état d’ivresse, elle rend tangible le ressentiment de Luke envers des personnes qui l’ont trompé dans le passé.
Luke imagine les parcmètres comme ses ennemis et il les abat d’une manière à la fois puérile et empreinte d’une réelle amertume.
Vétéran couvert de médailles, rétrogradé puis finalement libéré, Luke a toujours combattu le système et perdu.
« I was just passin’ time, Captain. »
Je passais juste le temps, Capitaine
Bien sûr, son esprit individualiste et violent s’avérera incompatible avec l’environnement du bagne et ses règles strictes, ses gardiens et sa discipline excessive.
L’un des gardiens, Carr, ressent immédiatement le mépris froid qu’affiche Luke
« I hope you ain’t gonna be a hard case. »
J’espère que tu ne vas pas être un dur à cuire
Tout dans le comportement de Luke montre son anticonformisme.
Comme le fait de garder en bouche la cuillère.
Luke tourne en ridicule Dragline lors du combat qui les oppose continuant obstinément à se battre sans se rendre. Cette punition brutale et sanglante que lui inflige Dragline, Luke la supporte d’abord pour amuser la galerie mais toujours se relevant après chaque coup le menant ainsi vers sa propre mort.
Rebuté par l’attitude de Luke, la considérant comme stupide, Dragline implore Luke de ne plus se relever afin de ne pas être tué.
Dragline: Stay down. You’re beat.
Luke: You’re gonna have to kill me.
Dragline : Reste au sol. Tu es battu.
Luke : Tu vas devoir me tuer.
En ne se soumettant pas, Luke remporte le combat lorsque Dragline abandonne le terrain alors que physiquement plus fort, il aurait pu l’achever. La volonté de fer de Luke emporte aussi le respect de Dragline et des autres prisonniers.
Un autre moment important qui nous éclaire davantage sur la personnalité de Luke est lorsque les prisonniers sont autorisés à se protéger de la pluie au camion. Luke lève les yeux et gesticule vers les cieux.
Dans une conversation avec Dieu, Luke défie le pouvoir de Dieu contre la nature et sa propre vie. Il en conclue que l’existence de Dieu est contestable ;
Luke: Let him go. Bam, Bam.
Dragline: Knock it off, Luke. You can’t talk about Him that way.
Luke: Are you still believin’ in that big bearded Boss up there? You think he’s watchin’ us?
Dragline: Get in here. Ain’t ya scared? Ain’t ya scared of dyin’?
Luke: Dyin’? Boy, he can have this little life any time he wants to. Do ya hear that? Are ya hearin’ it? Come on. You’re welcome to it, ol’ timer. Let me know you’re up there. Come on. Love me, hate me, kill me, anything. Just let me know it. (He looks around) I’m just standin’ in the rain talkin’ to myself.
Luke : Laisse-le partir. Bam, Bam.
Dragline : Laisse tomber, Luke. Tu ne peux pas parler de Lui comme çà.
Luke :Tu crois encore en notre Bon Berger là-haut ? Tu crois qu’il nous regarde ?
Dragline : Viens ici. Tu n’as pas peur ? Tu n’as pas peur de mourir ?
Luke : Mourir ? Mec, Il peut avoir cette petite vie quand il veut. T’as entendu çà ? L’as-tu entendu ? Allez, tu peux la prendre, l’ancêtre. Fais-moi savoir que tu es là-haut. Allez, Aimes-moi, Détestes-moi, Tues-moi, n’importe quoi. Fais-le moi simplement savoir.
(il regarde autour de lui)
Je me tiens seulement sous la pluie à me parler à moi-même.
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