TROUVER UNE STRUCTURE : EXEMPLE PRATIQUE – PART 1
Continuons notre exemple pratique qui devrait nous conduire à l’élaboration d’une structure pour un court-métrage.
Qui ou Quoi est l’antagoniste ?
Dans toutes les versions du mythe, Icare a été averti par son père de ne pas s’approcher du soleil. Et dans chacune de ces versions, Icare a ignoré l’avertissement de son père. Comme nous ne souhaitons pas compliquer l’histoire avec l’introduction d’un nouveau personnage, Dédale sera notre choix logique pour tenir la fonction de l’antagoniste.
Quel événement sert d’incident déclencheur ?
Définir un incident déclencheur n’est pas une chose aisée. Et pourtant, votre script ne pourra pas être achevé si le bon événement (agent du changement qui doit s’opérer dans la personnalité d’Icare) n’est pas mis en place.
Au cours de la seconde question, nous avons imaginé Icare passant son temps à ramasser des plumes et nous savons aussi que le climax aura lieu au cours du vol d’Icare et de Dédale, nous pouvons en déduire logiquement que l’incident déclencheur se produit au moment où Dédale a l’idée des ailes pour s’échapper de la prison.
La question qui s’impose est donc de trouver le moyen d’impliquer Icare dans cet événement charnière de la structure de notre histoire. Nous avons défini Icare comme notre protagoniste. C’est donc par lui que l’intrigue avance.
Maintenant, comme le propose Aristote, imaginons cette scène comme si nous étions un spectateur.
Nous avons Dédale, pensif, absent, absorbé dans la découverte d’un moyen de s’évader de cette prison.
Et nous avons le jeune Icare, agité, désœuvré, avec pour seul horizon son père, le paysage à-travers les barreaux de la cellule, le soleil et ces plumes qu’il ne cesse d’amasser et d’en faire un tas pour tromper son ennui.
Icare joue avec les plumes, tentant de les faire voler à l’aide de son souffle, les collant sur sa peau avec un peu d’eau ou de salive et mimant le vol d’un oiseau…
Un père normal et dans des conditions normales aurait certainement réprimandé son fils (devant un tel désordre) mais Dédale est un magnifique inventeur dont l’imagination s’accroche au moindre fait. C’est en regardant Icare jouer avec les plumes que l’idée des ailes se fait jour dans son esprit : des plumes et bien sûr, de la cire !
La réponse à cette quatrième question est devenu évidente : il s’agit du moment où Dédale conçoit l’idée des ailes à la vue d’Icare imitant un oiseau en vol.
Quelle est l’action dramatique du protagoniste ?
A travers cette question, nous devons comprendre ce qui motive le protagoniste, un désir (ou un besoin) secret qui d’une manière ou d’une autre s’interposera dans les décisions du personnage.
Sachant que Dédale s’est débarrassé d’un rival sans scrupule (et c’était pourtant son neveu), on peut s’attendre à une personnalité irascible, ne supportant pas la compétition.
A propos de personnalité, Dédale est quelqu’un de très pragmatique alors qu’Icare est plutôt un rêveur. Deux types de personnalités opposées et qui ont peu de chances de trouver un terrain de compromis pour une relation saine et durable.
On peut en déduire que le désir inavoué d’Icare est de fuir son père, de s’échapper de son emprise. Nous apportons ainsi une réponse à l’action dramatique qui justifie son comportement et son envolée fatale vers le soleil. La question dramatique soulevée par l’histoire serait alors de savoir si Icare pourra s’envoler de ses propres ailes, vivre sa vie d’homme sans l’ombre pesante d’un père castrateur.
Quelle est l’action dramatique de l’antagoniste ?
Dédale, l’antagoniste, est tout orienté à trouver le moyen de s’échapper de la prison avec son fils. C’est ce qui explique son comportement, ses tendances, ses besoins dans cette histoire.
Comment l’action dramatique du protagoniste est-elle résolue ?
Icare parvient à se libérer de son père mais cela sera au prix de sa vie.
Avez-vous quelques images ou idées, même informelles ou furtives, quant au climax ? et à la fin de votre histoire ?
Sachant que le climax est le moment qui devrait être le plus intense de toute l’histoire (pour le lecteur comme pour le protagoniste), il vaut mieux réfléchir à une séquence qui décrira non seulement les actions d’Icare mais aussi ce qu’il ressent.
En tant qu’auteur, vous pouvez avoir cette image ou cette idée de climax assez tôt dans le processus et vous n’avez plus qu’à l’articuler correctement dans la structure de votre histoire. D’autres fois, il vous faudra retourner au matériau originel (le mythe, dans notre exemple) ou faire davantage de recherche documentaire afin de trouver les bonnes idées.
Planifiez votre histoire peut être aussi d’un grand secours pour vous guider vers le climax.
La chute d’Icare est tragique, brutalement tragique mais cela ne nous oblige pas à suivre à la lettre le mythe. Nous recherchons à ce que le lecteur puisse s’identifier dans ce personnage perdu qu’est Icare. Il est donc nécessaire qu’il éprouve de l’empathie envers lui à travers cette passion qui l’anime et qui le conduit à la destruction. Le lecteur devrait être capable de ressentir, de reconnaitre cette croyance d’Icare en la possibilité d’atteindre à ce que son cœur désire le plus.
Dans ce projet qui ressemble peut-être davantage à une adaptation du mythe qu’à l’utilisation d’un mythe comme source de l’inspiration, notre climax sera ce moment où Icare ignore les avertissements de son père et s’enfonce de plus en plus vers les cieux à la rencontre de son destin certes funeste mais cependant libérateur du joug orchestré par son père, peut-être tentons-nous d’illustrer le complexe de castration.
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LA PSYCHOLOGIE DU PERSONNAGE
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QUESTIONS D’INTRIGUE
Pour ce climax, nous avons donc besoin d’images qui vont transcender ce moment d’exaltation intense dans lequel est plongé Icare, celui virevoltant dans les airs comme le ferait une fée s’emplissant du bonheur que lui procure un éther pur et magique (il nous semble que nous nous orientons désormais vers un court-métrage d’animation mais ces décisions concernant la forme ou le moyen par lequel nous allons nous exprimer seront prises ultérieurement).
Quant à la fin de notre histoire, nous savons déjà qu’Icare réussira son objectif, se libérer de son père mais ce sera au prix de sa mort. La mort, l’ultime évasion de toutes les situations, n’est pas nécessairement un mal. Dans le cas d’Icare, elle lui permet d’accomplir sa quête. Elle n’est qu’une réponse possible parmi d’autres choisie par l’auteur et elle n’engage que lui.
A propos de référence pour votre inspiration, la chute d’Icare fut largement représentée dans les arts et en particulier dans la peinture. Une petite recherche documentaire sur cet aspect du mythe pourrait vous aider à concevoir la fin de votre histoire sur le plan visuel (vous êtes le scénariste, n’oubliez pas que votre fonction est d’utiliser des mots pour imiter (ou rendre, si vous préférez) des choses qui se concrétiseront dans des images).
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