Nous avons des valeurs. Et nous nous soumettons à des lois. Mais lorsque les lois viennent contredire nos valeurs ou bien lorsque les lois des hommes entrent en conflit avec les lois divines auxquelles nous pourrions nous référer, quelle attitude devons-nous avoir face à l’obligation qui nous est faite d’accepter ce qui nous est imposé ?
Quelles lois doivent prévaloir afin que notre liberté soit préservée ?
Lorsqu’un aspect sacrificiel semble apparaître comme évident dans le projet d’écriture d’un auteur, il est souvent exprimé sous la forme d’un dilemme.
Ce dilemme est alors utilisé comme un instrument dramatique permettant au personnage principal de prendre soudain conscience qu’un sacrifice doit être fait.
Le dilemme
Instrumentalisé, le dilemme deviendrait par exemple si le personnage principal doit obéir à la loi de la société (ou de l’ordre établi ou de celle plus singulière de sa communauté) ou s’il doit suivre sa conscience ou par exemple s’en remettre à la volonté de Dieu.
Et la décision est alors un choix classique de sacrifice de soi. Connaissant les conséquences de ce choix, le héros poursuit malgré tout son but parce qu’il a le sentiment qu’il est bien plus élevé que les représailles qu’il assume et accepte en maintenant ainsi sa position contre l’ordre établi.
Le sacrifice de soi n’est rien d’autre que de s’abandonner soi-même parce que quelque chose ou quelqu’un est plus important. Que ce soit une cause, un idéal… ou le moyen de trouver sa rédemption.
Le sacrifice est de s’accorder soi-même avec le monde, d’y trouver une harmonie. Le sacrifice de soi est d’abord un équilibre de soi avec le monde.
La dimension la plus intensément dramatique qui puisse être donnée au sacrifice est lorsque le dilemme du personnage principal oscille entre le divin et l’humain. Ainsi, le sacrifice paraît légitime face à un idéal qui nous dépasse même si celui-ci implique la mort du héros (symbolique ou non).
C’est un motif que l’on trouve dans Quo Vadis de Mervyn LeRoy (en 1951).
Un impératif moral
En plus de la religion, n’importe quel impératif moral peut fonctionner avec le sacrifice du héros. Qu’il s’agisse de quelque chose de droit, de juste ou de vertueux.
Par exemple, le héros pourrait questionner sa vie et ses valeurs (qui le déterminaient jusqu’à présent) et comprendre par exemple que les plaisirs terrestres, une position sociale plutôt vers le haut du tableau ou bien encore que l’appartenance à une certaine communauté qui se distingue par ses privilèges peuvent être sacrifiés pour une sorte de rédemption spirituelle comme d’assumer son amour pour une prostituée.
Se racheter (pour une faute que l’on a commise même si l’on est le seul à le voir ainsi) est une motivation qui intervient assez souvent dans le sacrifice de soi.
Les intrigues qui s’approprient le sacrifice font aussi apparaître l’abandon des biens matériels, la notion de délivrance ainsi que celles d’honneur et de déshonneur.
L’amour aussi donne lieu au sacrifice de soi. Et pas seulement dans son aspect le plus romantique qui soit. Un amour non partagé par exemple pour lequel l’amant éprouve un amour fou et se sacrifie pour un être aimé qui ne lui retournera jamais cette faveur.
Et un homme ne serait-il pas capable d’abandonner ce qui lui est le plus cher pour une femme ? Ce n’est pas le pardon qui est recherché dans ce cas pour une faute que l’on a cru avoir commis (et qu’on peut avoir commis, d’ailleurs) mais seulement un accomplissement (physique ou spirituel).
L’amour comme principe du sacrifice de soi
Sur un tel thème, des variations sont possibles. Peut-être celle d’une femme follement amoureuse qui devient l’esclave de son amour. Ou encore se sacrifier pour l’amour d’un enfant…
Le sacrifice de soi est la perte de quelque chose dans l’espoir d’une récompense que nous considérons plus importante. Un amour platonique peut alors être ainsi justifié.
L’amour de l’autre est la raison du sacrifice quelle que soit la réponse de cet autre. C’est par la relation à l’autre que le concept de sacrifice de soi peut être amené. C’est de comprendre dans cette relation ce que le héros est prêt à abandonner, pourquoi et ce qu’il espère en retour.
Cela implique aussi pour le personnage principal un véritable engagement (et puissant) envers l’autre. Sans cet engagement, l’intrigue aura des difficultés à se justifier elle-même.
Il faut de fortes motivations pour dépeindre un sacrifice. Elles seront l’élan qui feront avancer l’intrigue. André Malraux dans Le temps du mépris nous démontre qu’un autre prisonnier des nazis a avoué être l’homme qu’il recherche (Kassner) et dont ils ne connaissent pas l’identité alors qu’ils détiennent Kassner.
Pourquoi ce mensonge ? Pourquoi ce sacrifice si ce n’est au nom d’un idéal ? Et que l’écrivain communiste allemand Kassner est bien plus important pour continuer l’œuvre du Parti.
Mourir pour ses croyances justifie le sacrifice surtout si cela permet à un autre de vivre et de perpétuer ce en quoi l’on croit.
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