PULP FICTION : ANALYSE DU SCÉNARIO

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Rare sont ceux qui ne connaissent pas Pulp Fiction de Quentin Tarantino et Roger Avary. Cependant, ce n’est pas un scénario très accessible pour le lecteur/spectateur habitué à une structure classique et linéaire. En effet, Pulp Fiction semble avoir de multiples histoires dites presque simultanément.

Certains pensent que le film est à propos de deux tueurs à gages, d’autres que c’est l’histoire d’un boxeur. La vérité, en fait, est qu’il n’y a pas vraiment d’histoire derrière ce film.

L’intention de Tarantino est de parodier mais il se sert de la parodie comme moyen d’expression. Il s’approprie le documentaire tout comme le surréalisme.
Les propriétés formelles que ces mouvements artistiques donnent au film permettent à Quentin Tarantino d’exprimer des thèmes plus étendus.

Les techniques narratives de Pulp Fiction

Pulp Fiction appartient au genre du Film Noir et se sert du mouvement surréaliste comme moyen de son expression. En cela, Pulp Fiction refuse toutes constructions logiques de l’esprit concernant sa narration.

D’autres styles d’écriture sont présents dans le scénario mais le Film noir et le surréalisme sont assurément les plus évidents.

Le Film noir

Un des aspects le plus marquant du Film Noir est le fait qu’aucun des personnages ne possède un fondement moral clair (ni gentil, ni méchant). Que ce soit Jules ou Marsellus ou n’importe lequel des autres personnages, ce sont des êtres que l’on ne peut pas caractériser.
Certes, Tarantino a fait le choix du cliché ou de l’archétype pour les incarner mais alors que d’autres auteurs s’emparent de l’archétype pour le travailler en profondeur psychologiquement, Tarantino s’en sert tel quel.

Prenons Jules par exemple. Dès le début, Jules tue des individus qui ont doublé Marsellus (Jules est un exécuteur au service de Marsellus). Marsellus en effet n’admet pas qu’on lui manque de respect.
Juste avant de tuer, Jules a l’habitude de réciter Ézechiel 25:17 (La marche des Vertueux) de l’Ancien Testament.

Jules, d’ailleurs, ne sait pas trop pourquoi il a besoin de citer Ézechiel avant de tuer. Du moins, jusqu’à ce qu’il reçoive une illumination. Dans cette scène où Jules et Vincent abattent les voyous qui ont doublé Marsellus, il apparaît que Jules défend son patron et pas seulement parce qu’il est payé pour cela.
Il le défend sincèrement alors que lors de la conversation entre Jules et Vincent dans la voiture, il critique ouvertement Marsellus pour la mort que Jules considère injuste de Tony Rocky Horror qui n’a fait qu’un simple massage des pieds de Mia, la femme de Marsellus.

La femme dans Pulp Fiction

Pour ce paragraphe, j’utilise une transcréation avec laquelle vous pourriez ne pas être d’accord sur l’illustration de la femme dans Pulp Fiction. C’est une base de réflexion, une hypothèse. N’hésitez pas à laisser un commentaire.

La majorité des personnages de Pulp Fiction sont des hommes. Il en est souvent ainsi lorsqu’un scénario aborde le crime ou la lutte. C’est une tendance très masculine de prouver sa force et d’être belliqueux.

Il peut être intéressant de se pencher sur les stéréotypes féminins et la représentation des femmes lorsqu’un scénario les associe aux crimes et aux criminels.
Les femmes dans Pulp Fiction sont sans conteste partie prenante de l’histoire. Elles sont illustrées soit comme totalement démunies et sous la coupe d’une figure mâle plus puissante soit elles-mêmes puissantes et individualistes.

Le personnage féminin majeur est Mia Wallace. Elle est la femme de Marsellus (un ponte de la pègre) et est représentée par l’archétype de la femme fatale.
C’est une très belle femme, influente, intelligente et séductrice. C’est précisément cette image que l’affiche du film véhicule. La cigarette et le revolver posé près d’elle sont d’ailleurs de puissants symboles sociétaux de pouvoir.

A chaque fois que Mia est présente, son autorité ne fait que s’étendre. Marsellus a demandé à Vincent, qui travaille pour lui, de sortir avec sa femme pendant son absence. Lorsque Vincent vient chercher Mia, il est manifestement mal à l’aise.
Bien que le statut de Mia (elle est la femme du patron de Vincent) pourrait influencer l’état d’esprit de Vincent, Mia elle-même est responsable du malaise de Vincent. Elle joue avec lui de manière intelligente et tentatrice.

Pendant le repas, c’est Mia qui contrôle le mouvement de la séquence. Vincent lui est totalement assujetti. L’archétype de femme fatale est maintenue jusqu’à ce que, ironiquement, elle confonde cocaïne et héroïne et se retrouve plongée dans une overdose.

À partir de ce moment, Mia devient la figure de la femme sans défense que Vincent, en preux chevalier (mais pour des raisons différentes parce que si Mia meurt, il imagine facilement qu’il lui arrivera la même chose qu’à Tony Rocky Horror) doit sauver.

Cela ajoute à l’archétype de la femme fatale une qualité plus mélodramatique.

Les deux autres femmes de Pulp Fiction sont, par comparaison à Mia, des êtres fragiles et faibles. Yolanda, par exemple, est incapable de garder son calme pendant la tentative de vol du restaurant. Elle est totalement frénétique, manifestement effrayée mais essaie néanmoins de garder la situation sous contrôle.

Elle se comporte comme une enfant. Jules la traite d’ailleurs comme une enfant qu’un adulte essaierait de calmer. Par contraste avec les personnages masculins de la séquence, elle est totalement frénétique alors que même Ringo reste calme alors que Jules lui pointe un revolver sur le visage.

Fabienne, la petite amie de Butch, est elle aussi présentée comme une femme enfant fragile et sans défense. Alors que Buck est quelqu’un de très masculin et fort, Fabienne est petite, mince et sur le plan psychologique, c’est aussi une enfant.

La domination presque patriarcale que Butch exerce sur Fabienne est un fait sociétal typique et cela est bien illustré lorsque Butch se met en colère parce que Fabienne a oublié la montre et qu’il jette tout ce qui lui tombe sous la main au-travers de la pièce.
Fabienne alors se réfugie dans un coin et se recroqueville totalement impuissante et à la merci de la colère de Butch.

Le surréalisme

Alors que de manière classique, l’identification aux personnages (ou du moins au personnage principal) est l’élément moteur de la participation du lecteur dans l’histoire, le surréalisme dont Tarantino se sert crée une distance.
Par exemple, dans la scène du restaurant, le lieu même, ce qu’il contient (et la photographie du lieu aussi), les formes des tables, les costumes des serveuses… Tout cela concourt à donner à l’image l’aspect du rêve.

Que cherche à prouver Quentin Tarantino ? Si l’inconscient, selon Freud, est le lieu des véritables désirs des êtres humains, peut-être alors que la réminiscence des années 1950 qu’appelle cette séquence expose à la fois le désir américain de modernisme et de sexe, deux concepts majeurs des médias à cette époque.
Sauf qu’ici, Quentin Tarantino en fait un cauchemar et dénonce l’aspect le plus sombre de l’époque.

L’appartement de Mia rappelle le salon de L’ange exterminateur de Luis Buñuel. Chez Buñuel, on peut y voir un petit groupe de personnages liés par pure convention sociale incapables de réaliser un désir aussi simple que de sortir d’une pièce. On peut y lire la bourgeoisie comme un état de claustration où un simple acte est impossible. Mia pourrait être piégée dans sa propre société bourgeoise.

Son désir inconscient d’en échapper serait traduit par son addiction, par les dialogues entre Vincent et Mia ainsi que par son apparence.

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