Dans cet article, nous allons nous pencher sur les situations 932 à 948.
La liste de toutes les situations se trouve ici :
PLOTTO, MÉTHODE DE SUGGESTIONS D’INTRIGUE
Groupe : Activité & Vie sociale
Sous-groupe : Les idéaux
Proposition B
50, Être poussé par une motivation inhabituelle à s’engager dans une activité hasardeuse voire malhonnête.
Situation : 932
Préquelles possibles : 1111a – 1074
- A est un écrivain qui s’apprête à mettre par écrit une idée qui lui tient à cœur depuis un moment déjà
[Et il va devoir en assumer les risques] - * A est un écrivain et il a une nouvelle idée d’histoire. Mais il n’est pas certain que celle-ci intéresserait ses lecteurs habituels. Pour régler cette question avant de se mettre au travail, il décide incognito de s’immerger dans le même univers que celui qu’il va dépeindre fictivement **
Séquelles possibles : 598 – 835 – 1460
Note : William Wallace Cook n’avait précisé que secret enterprise pour la seconde possibilité, c’est-à-dire un quelconque projet secret. J’ai préféré donner un exemple de projet comme cette immersion dans un monde semblable à celui de l’histoire que A s’apprête à conter et que vous pouvez remplacer par n’importe quel autre milieu. Et j’ai ajouté incognito pour préserver la notion de secret qui entoure ce personnage.
Notez aussi que Cook donne un conseil aux auteurs car ce n’est pas la première fois qu’il insiste sur le besoin pour l’auteur de vivre (ou de s’en approcher le plus possible) les expériences fictives qu’il décrit dans ses histoires.
Situation : 933
Préquelles possibles : 104 – 189
B décide qu’il y a plus à gagner dans la défaite que dans la réussite
Séquelles possibles : 356 – 931
Note : Voici comment j’interprète cette intrigue. Il est incontestable que la vie nous apporte à tous son lot d’épreuves. On pourrait considérer être maudit ou n’avoir pas de chance. Ce qui reviendrait à admettre que nous sommes déterminés à souffrir. Mais au lieu de nous soumettre à un quelconque destin déjà écrit, nous pourrions envisager les choses sous un autre angle qui serait que la souffrance ou la peine que nous endurons (représentées par la défaite dans la suggestion) serait comme un moyen de tendre vers le meilleur, de nous rendre meilleur ou bien par une sorte d’illumination ou de révélation, nous faire prendre conscience de nos erreurs et de ne pas les répéter.
Si nous ne connaissions que la réussite, nous serions aveuglés et incapable de faire des choix (c’est-à-dire d’être libre de choisir notre destinée par nos actions et décisions).
Comme à son habitude, Cook, par le choix d’un personnage féminin, semble dire que la femme est le vaisseau qui peut nous sauver de nous-mêmes (ne serait-ce que par la douleur de l’enfantement).
Groupe : Activité & Vie sociale
Sous-groupe : Les idéaux
Proposition B
17, Supporter vaillamment une situation difficile et chercher à atteindre des objectifs très estimés de manière honorable.
Situation : 934
Préquelles possibles : (181b…*) – (425…*)
A estime que son devoir est de sauver son fils SN de la pente dangereuse sur laquelle SN s’est volontairement laissé glisser
Séquelles possibles : 881 – (181b *…**) – (425 **…***) – (330b si l’on change F-A par A et A par SN)
Note : Essayons d’analyser cette suggestion. Deux personnages : un père et son fils, donc il importe de suivre trois lignes dramatiques : celle du père, celle du fils et celle de la relation entre le père et le fils qui est la condition qui permet soit au père, soit au fils, soit aux deux, d’évoluer au cours de cette intrigue.
Ensuite, il est fait mention du devoir du père. Ce devoir est un sacrifice donc A, le personnage du père, décide volontairement de sacrifier son bonheur pour sauver son fils. Mais son fils a fait le choix du mal. Ce n’est pas parce qu’il est mauvais de nature. Ce sont les circonstances de sa vie (donc peut-être sa relation avec son père) qui a conduit SN à s’orienter vers ce que la morale désigne comme le vice.
Mais pour SN, c’est une voie qui lui permet de s’échapper d’une relation toxique afin de trouver par lui-même le bonheur. Mais il se trompe. Par son sacrifice, le père tentera alors de sauver son fils.
Situation : 935
Préquelles possibles : 718b – (948 si l’on change B par A)
A échange une certaine servitude contre un avantage qu’il n’aurait pu se procurer autrement
[Qu’il soit riche ou pauvre, l’argent n’entre pas dans le manque que ressent A. C’est un bien autrement plus précieux que A offre en échange d’un profit matériel ou moral : sa liberté. Il y a indéniablement du Faust dans cette intrigue]
Séquelles possibles : 595 – 756 – 918b
Situation : 936
Préquelles possibles : 512 – 513 – 1006b – 1073
- Le rêve de A, c’est de vivre des aventures lointaines en mer
- * A ne peut pas accomplir son rêve parce qu’il doit subvenir quotidiennement à ses besoins et à ceux de ses proches **
Séquelles possibles : 991 – 1148a
Note : On aurait tendance dans la première possibilité de choisir les aventures en mer comme cœur de l’intrigue. Ce serait se priver d’une exploration plus fascinante d’un personnage qui vit une sorte de rêve éveillé au quotidien. On peut permettre au personnage de s’évader par des séquences oniriques mais celles-ci sont un peu comme le flash-back. Il vaut mieux s’assurer qu’elles soient indispensables dans le cours de l’intrigue.
Pour ceux qu’une situation comme celle de la 936 intéresserait, des recherches sur le rêve lucide pourraient être avantageuses.
Dans la seconde possibilité, l’objet du rêve est bien plus sollicité puisqu’il est le moyen de s’échapper de la réalité actuelle et ennuyeuse (voire létale) de A. Les difficultés pour A peuvent naître de la confrontation entre l’application pratique et expérimentale de cette échappatoire et du jugement d’autrui (qui mène A, d’ailleurs, à se juger lui-même). Somme toute, cette seconde alternative est assez psychologique dans l’étude du cas de conscience (c’est-à-dire dilemme) qu’éprouve A dans cette quête d’une liberté inaccessible.
Situation : 937
Préquelles possibles : 687 – 689 – 690
- A a réglé sa vie sur de hautes valeurs morales
[Cette proposition pose un à priori, c’est-à-dire que l’auteur ne cherchera pas à expliquer le comment et le pourquoi des principes moraux sur lesquels A a fondé sa présence au monde. Dans le cours de l’intrigue, néanmoins, et par les tribulations de son personnage, l’auteur interrogera la validité de ces valeurs] - * Les hautes valeurs morales de A sont mises à mal lorsque, par un jeu de circonstances, A se retrouve dans un environnement où les instincts les plus primitifs, les plus matériels, sont un moyen de survie **
Séquelles possibles : 197 – 244 – 682 – 901 – 973
Situation : 938
Préquelles possibles : 941 – 1122
- A est un artisan qui cherche à produire une œuvre magistrale
- * A peut devenir riche s’il décide de sacrifier les principes moraux qui ont réglé sa vie jusqu’à présent **
Séquelles possibles : 943a – 944
Note : Dans la première possibilité, A possède un savoir-faire qui lui assure son pain quotidien. Mais cela ne le satisfait pas. Ce qu’il veut accomplir, et il a la technique pour cela, dépasse néanmoins son entendement parce que cet idéal est quelque chose d’inaccessible. C’est comme s’il cherchait à toucher Dieu de ses propres mains.
La morale voudrait que l’on s’efforce d’imiter Dieu pour corriger nos imperfections (si l’on admet être imparfait) et d’être ainsi l’artisan de notre propre vie libérée des contraintes imposées par l’obligation matérielle de vivre dans le monde. Je ne crois pas que A puisse jamais atteindre cette œuvre magistrale mais dans une œuvre de fiction, le lecteur ne peut se contenter de voir aller et venir un personnage qu’il rencontre tous les jours (que ce soit lui-même ou les autres).
Un auteur pourrait alors vouloir rendre possible pour nous tous une élévation spirituelle obscurcie par des obligations auxquelles nous nous soumettons tous par convention et non par choix.
La seconde alternative décrit le combat classique entre les valeurs matérielles et les valeurs spirituelles. C’est-à-dire, d’une manière générale (qu’il faudra donc détailler pour mettre en intrigue cette idée), la lutte entre le bien et le mal. Et de s’interroger sur les significations puisque ce qui est bien pour l’un sera parfois perçu comme mal par un autre. Après tout, un antagoniste n’agit pas selon de mauvais desseins à priori. Son intention n’est pas le mal. Les conséquences de ses actes seront la plupart du temps jugées comme néfastes au héros de l’histoire par le lecteur mais pour expliciter ce personnage de méchant de l’histoire, ses raisons d’agir seront légitimes et de son point de vue, l’antagoniste pensera agir pour le bien.
En somme, c’est par le regard d’autrui (des autres personnages et du lecteur) qu’il sera défini comme une force antagoniste. Les fonctions des personnages (en particulier le protagoniste et l’antagoniste) ne doivent surtout pas être vues sous les aspects du manichéisme ou du dualisme.
Situation : 939
Préquelles possibles : 485 – 922a – 926
A estime que les malheurs qu’il connaît le rendront meilleurs
Séquelles possibles : 907 – 772 – 1167
Note : Par son personnage si particulier, William Wallace Cook semble nous dire que la souffrance serait la condition nécessaire de notre salut. L’expérience nous montre, cependant, que cela peut mener un individu au fanatisme. Je ne pense pas que ce soit l’intention de Cook. Il intègre cette situation dans le sous-groupe des idéaux. A est convaincu que sa situation misérable est le fait d’une instance qui lui est totalement supérieure et il ne s’agit pas non plus d’une punition. La misère vécue est ainsi instrumentalisée pour devenir une approche d’un monde ou d’un être meilleurs.
Néanmoins, cette voie prétendument écrite peut placer l’individu qui s’y soumet sous l’emprise de puissances bien terrestres afin d’étouffer d’éventuelles idées de rébellion.
Ainsi, si nous considérons que cet état d’esprit de A est celui qui le caractérise au début de l’histoire, nous pouvons alors tenter une mise en intrigue par la prise de conscience progressive d’un asservissement de moins en moins supportable et la mise en évidence du libre-arbitre qui permettrait à l’individu de choisir sa destinée et de lutter pour qu’il en soit ainsi.
Situation : 940
Préquelles possibles : 939 – (900…*)
- A est un homme riche et influent mais il découvrira que la vraie richesse ne réside pas dans les possessions
- * A s’engage dans une activité très en-deçà de ses compétences afin de se prouver quelque chose à lui-même **
Séquelles possibles : 918b – 919a ou c
Situation : 941
Préquelles possibles : 171 – 748
Malgré une vie misérable, A pense que son sort n’est pas si désespéré que cela
Séquelles possibles : 942 – 943a – 922b
Note : Pour qu’il y ait intrigue, il faut soit que A soit dans l’erreur ou bien que les autres pensent qu’il fait erreur (et dans ce cas, il lutte contre cette opinion pour imposer et peut-être prouver ses idées ou son idéal de vie).
Si l’idéal de vie actuel de A lui permet de se contenter de sa vie de misère, car après tout, rien ne l’empêche de pratiquer l’ascèse, et que rien ne vienne s’opposer à la tranquillité de son âme (ce à quoi nous aspirons naturellement), il n’y aurait pas d’intrigue donc pas d’histoire.
Situation : 942
Préquelles possibles : 903 – 941
- Depuis quelques temps déjà, A vit de mauvais jours et il semble que tout ce qu’il entreprenne soit marqué du sceau de la malchance
- * A s’accroche à ses idéaux malgré toutes les vicissitudes de fortune qui enveloppent sa vie **
Séquelles possibles : 601 – 632 – 944
Note : Dans la première suggestion, on est en droit de se demander quel idéal poursuit le personnage. Il suffit de savoir que le concept d’idéal chez William Wallace Cook est assez étendu. Il faut le comprendre comme un penchant, une aspiration ou même un désir puissant de changement.
Ce peut donc être à la fois une idée, une simple spéculation sur un sujet, une quête inaccessible pour le personnage mais aussi une aspiration à maintenir sa vie actuelle lorsque le personnage a déduit de ses expériences qu’il agit selon des principes dont il est convaincu de l’efficacité (ce qui implique qu’il pense agir aussi pour le bien de sa communauté).
Mais cette conviction n’emporte pas avec elle une vérité : le personnage peut être dans l’erreur et aveuglé par ses passions, ou plus concrètement par la concupiscence par exemple.
Concernant cette première suggestion de la situation 942, il faut la voir aussi comme une contradiction de la situation précédente. Ici, A mène une vie misérable mais il ne s’en contente pas et il devra lutter contre un sort apparemment écrit. C’est d’ailleurs précisément l’intrigue de la seconde alternative.
Situation : 943a
Préquelles possibles : 700 – 715b – 729
- A sacrifie tout dans la poursuite de son idéal
- * Alors qu’il a l’opportunité de devenir riche, A refuse cette manne providentielle et s’en tient à ses valeurs que cette fortune ruinerait **
Séquelles possibles : William Wallace Cook n’a pas jugé bon de rajouter des séquelles. Je pense que le sacrifice est le dilemme que doit résoudre A. Cette résolution est laissée à l’auteur.
Note : Il faut comprendre que la volonté du personnage est à l’origine de ses actes. Il ne subit aucune contrainte dans la poursuite d’un idéal. Son sacrifice est volontaire. Les deux possibilités ci-dessus se distinguent par la nature du sacrifice consenti.
Dans la première, ce sont les choses auxquelles A est ordinairement attachées qu’il sacrifie. Dans la seconde, c’est une occasion de devenir riche (quelque chose qui lui est extérieur) à laquelle il renonce car contraire à sa morale.
Situation : 943b
Préquelles possibles : 824 – 987 – 1014 – 1022
A préfère mourir plutôt que de succomber à un acte de traîtrise, de félonie ou de déloyauté même si cet acte devait lui apporter la liberté
Séquelles possibles : 80b – 136
Situation : 944
Préquelles possibles : 171 – 549 – 715b – 729 – 938 – 942
Pour A, les vicissitudes de la vie sont des bénédictions et cela ne peut donc pas ébranler ses convictions les plus fortes
[Pour A, il y a toujours le soleil après la pluie. C’est un état d’esprit qui fait chanter sous la pluie. On est assez proche de la situation 939]
Séquelles possibles : 907
Situation : 945
Préquelles possibles : 121 – 244 – (179…*) – (162b…*) – 665
- Les autres condamnent B ou la répudient ou la réprouvent simplement parce que B cherche à vivre selon ses propres convictions
- * B a eu une vie difficile simplement parce qu’elle a voulu vivre autrement. Le regard des autres a été très dur envers elle, mais elle le combattit jusqu’à sa mort. La mort de B ne fut cependant pas vaine et nombreux sont ceux qui louèrent et adoptèrent ses convictions **
Séquelles possibles : 211
Situation : 946
Préquelles possibles : 162b – 211 – 279 – 403 – 557a
B a un lourd passé qu’elle cherche à racheter par une conduite exemplaire
Séquelles possibles : 665 – 669 – 892
Note : B aura certainement à faire face à un dilemme pour que son salut soit effectif. On peut comprendre que les actes passés de B ont été contraints. Si elle a mal agi, c’est parce que les circonstances l’ont poussé dans cette voie ne lui laissant pas le choix de décider. Maintenant, c’est libre et volontaire qu’elle œuvre pour le bien et ce qu’elle cherche, c’est être en paix avec elle-même.
Situation : 947
Préquelles possibles : 96 – 745 – 647 – 976
Le monde dans lequel vit B n’est pas très respectable. C’est un monde réglé par le manque de valeurs morales. Mais B résiste de toute son âme à l’attirance maléfique des avantages fallacieux qui semblent être si facilement à sa portée
Séquelles possibles : 242 – 645
Situation : 948
Préquelles possibles : 947 – 978
Les parents de B, M-B et F-B, sont pauvres mais la modeste B n’entend pas se conformer à un monde où son sort semble déjà écrit. Elle se battra pour rejoindre une grande école
[ou toute autre activité qui semble apparemment hors de sa portée car ce n’est pas une raison suffisante de vivre dans un environnement sordide et y être condamné. Si nous sommes libres, c’est parce que nous le voulons bien mais le chemin peut être compliqué]
Séquelles possibles : 745 – (935 si l’on change A par B) – 993
Le prochain article concernera les situations conflictuelles 949 à 962.