Dans les histoires où l’action prédomine, qu’en est-il des personnages ? Les auteurs ne devraient pas se poser la question puisque la réponse à cette énigme est toujours la même : les personnages font l’action et donc l’intrigue.
Léon est un tueur à gages. Pourtant, il prend un soin extrême à soigner son aglaonema. Pourquoi ce Bad Guy a-t-il besoin de soigner cette plante d’intérieur ?
Parce que l’auteur (Luc Besson) devait trouver un moyen de le connecter au lecteur, de créer immédiatement une sympathie envers le personnage. Prendre soin comme il le fait d’une plante d’intérieur révèle chez le personnage non pas une faiblesse mais au contraire une humanité, une gentillesse et une bonté qui expliquent pourquoi il finira par ouvrir la porte à Mathilda.
Comme le démontre Léon, il est possible de montrer des aspects de nos personnages par leurs actions et souvent ces actions n’ont nul besoin d’un dialogue pour les soutenir. Elles se suffisent à elles-mêmes.
Le protagoniste en tant que personnage central de l’histoire est souvent le plus important (bien que la fonction de l’antagoniste incite à accorder une attention toute particulière au méchant de l’histoire et celui-ci mérite d’être autrement qu’en deux dimensions).
Le héros est donc celui qui connaîtra la plus profonde des transformations à la fin de l’histoire, qui devra relever le plus de défis et affronter plus souvent qu’à son tour le méchant de l’histoire connu aussi sous le nom générique de Némésis.
Les yeux du héros
Mais ce n’est pas tout. Un des éléments clés de la fonction du personnage principal du point de vue narratif est d’emmener le lecteur dans l’histoire. C’est effectivement par les yeux du héros que le lecteur reçoit l’histoire au fur et à mesure de son déploiement.
Il est donc crucial que le héros (même si c’est un Bad Guy) soit attachant pour que le lecteur éprouve quelque intérêt à ce qu’il lui arrive.
L’un des buts de l’auteur est donc de parvenir à engager le lecteur émotionnellement avec son protagoniste. C’est toujours une condition nécessaire que le lecteur éprouve de la sympathie voire mieux de l’empathie pour le héros, et particulièrement dans les histoires où l’action prime. Pour cela, l’auteur ne doit pas hésiter à plonger dans les aspects psychologiques de ses personnages.
La psyché de ceux-ci devrait être familière à l’auteur et concerner leurs émotions, leurs sentiments, leurs souvenirs, leurs besoins et désirs, leurs comportements (selon les circonstances), leurs mécanismes de défense, leurs croyances et vérités, les mensonges et aveuglements et parmi ceux-ci identifier la faille majeure qui caractérise le personnage et par laquelle l’antagoniste peut atteindre le héros.
Il s’agit en effet de vous approprier le personnage intimement en inventant voire découvrant sa psyché lors du processus de création du personnage mais vous ne devez employer que les traits de caractère significatifs et tout particulièrement cette faille, cette faiblesse qui rend votre personnage vulnérable.
Cette vulnérabilité aidera le lecteur à ressentir ce que ressent votre héros et réduira la distance qui les sépare.
L’archétype, un modèle utile
Vous pourriez utiliser lors de la création des éléments archétypaux afin de vous aider à déterminer votre personnage. L’avantage des archétypes est qu’ils sont protéiformes.
En optant pour un archétype pour définir l’un de vos personnages, vous choisissez un moule auquel vous donnerez la coloration nécessaire et pour le différencier des autres personnages de votre histoire et pour le rendre unique bien qu’il appartienne à une catégorie de personnages dont la source remonte à l’origine de l’humanité.
Prenons Tony Stark de Iron Man écrit par un pool de scénaristes et dirigé par Jon Favreau. On apprend de lui que c’est un génie en électronique, en informatique et en mécanique et qu’il a hérité de l’empire de son père, concepteur et marchand d’armes.
Fort de ces informations, nous pouvons essayer d’imaginer ce que pourrait être le monde intérieur de Stark.
N’est-il pas devenu ce génie en sacrifiant son enfance et sa jeunesse aux études pour obtenir les louanges de son père ou bien seulement son attention ? Patron d’industrie, il est probable que ce père n’ait pu consacrer beaucoup de temps à sa famille.
De plus, fidèle au Comics, il sombra aussi dans l’alcool. Quoi qu’il en soit, l’ombre de ce père pesa lourdement, sombrement et profondément sur le jeune Tony ce qui peut expliquer l’homme qu’il est devenu.
De plus, le legs que lui a laissé son père, cet empire industriel, est tombé abruptement sur Tony à la mort brutale de ses parents. Si l’on prend un peu de recul, on s’aperçoit que Tony Stark ne s’est jamais vraiment réalisé. Il n’a pas choisi sa vie, sa vraie nature ne s’est jamais révélée (du moins, jusqu’à son enlèvement en Afghanistan qui lui a permis de prendre conscience qu’il était temps pour lui de changer et de suivre sa véritable destinée).
Et que découvrons-nous de Stark lorsque nous le rencontrons pour la première fois ? Il voyage autour du monde dans son jet privé, il est sûr de lui en tout, il recherche le plaisir (surtout auprès des femmes), il est impulsif et casse-cou.
Il consume sa vie en en savourant chaque instant. Tout ceci, nous le découvrons à travers ses actions et ses lignes de dialogue.
Mais qu’en est-il de son âme ? Comment devons-nous interpréter la façade qu’il offre aux autres ? Que se cache-t-il derrière sa superficialité ?
Nous pouvons imaginer que dans son monde intérieur, Tony lutte avec des sentiments réprimés de perte, de colère et de culpabilité. La perte du père peut-être même plus douloureuse du fait de la quasi absence de celui-ci et compenser par la présence de Stane (associé à son père dans l’histoire contée par Jon Favreau), par la colère d’avoir reçu l’empire de son père en héritage et forcé d’en prendre les rênes sans jamais l’avoir vraiment voulu et par la culpabilité de ressentir cette colère contre son père, un père qui dorénavant ne peut plus ni se justifier, ni accompagner son fils.
Avec cette carte très simplifiée de la psyché de Tony Stark, il est alors relativement facile d’en déduire un comportement.
De Léon à Tony Stark, que pouvons-nous espérer de cet article ?
1) Creusez vos personnages surtout le protagoniste afin de vous assurer que vous entraînerez votre lecteur émotionnellement avec votre héros,
2) Lorsque vous serez entré dans la tête de votre personnage, recherchez les dynamiques fondamentales de ses émotions, de ses désirs (refoulés ou non), de ses passions… Tout ce qui concerne la psychologie de votre personnage et que vous pourrez utiliser pour décrire et rendre cohérent son comportement.
Non pas les événements qui l’ont affecté et qui pourraient expliquer certaines données psychiques mais plutôt les réponses apportées par votre personnage à ces événements.
Si vous mettez votre personnage au cours de votre histoire dans des situations similaires à celles qui lui ont causé un trauma, vous saurez alors quel comportement lui faire prendre, comme par exemple la fuite, la colère, la mélancolie, une panique…
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