Nous avons vu précédemment à l’aide de l’ennéagramme puis avec les 8 cours précédents de cette étude sur l’arc dramatique que vous aviez des points de départ intéressants lorsqu’il s’agissait de créer votre personnage. Nous ne vous demandons pas de suivre aveuglément les types de personnalité présentés. Vous pourriez très bien ne pas adhérer ni à l’ennéagramme ni à la liste que nous avons déroulée devant vous.
Cependant, ce sont des bases sur lesquelles peut s’accrocher votre capacité à inventer de nouveaux personnages.
Le personnage est probablement l’élément dramatique le plus important d’une œuvre d’imagination. Sans lui, du moins sans un personnage vraiment développé (pas une simple image collée là sans rime ni raison), nous ne sommes même pas sûrs que vous pouvez avoir une intrigue.
Il n’est pas question de brider votre imagination en vous proposant ces différents types de personnalité que nous examinons depuis nos cours sur l’ennéagramme et l’arc dramatique. Ce que nous espérons est de vous fournir une base de réflexion lorsque vous voudrez par exemple décrire un certain état d’esprit pour l’un de vos personnages.
Le personnage au cœur du tout
Le fonctionnement de votre scénario dépend d’un bon équilibre entre l’intrigue et le personnage mais votre scénario aura beaucoup à gagner s’il penche davantage vers le personnage.
Vous avez maintenant une idée de personnage. Il commence à prendre forme dans votre esprit. Vous lui avez donné un but dans votre histoire.
Pour que son arc dramatique puisse se déployer harmonieusement, il faut que vous vous attaquiez à sa biographie. Ce n’est pas le plus simple.
Lire à ce sujet :
PERSONNAGE : ELEMENTS DE BIOGRAPHIE
Il est important de consacrer du temps à écrire la biographie de votre personnage (même si de nombreux éléments de celle-ci ne figureront pas dans votre récit) jusqu’à ce qu’il commence à acquérir une autonomie. Il n’y a pas vraiment de règles : Pour certains auteurs, cela peut être évident, pour d’autres, il faudra faire des recherches, concevoir un passé crédible…
Gardez à l’esprit cependant que la biographie n’est pas immuable une fois écrite. A n’importe quel moment du processus d’écriture, vous pouvez la modifier pour l’adapter plus précisément au tour que prend votre histoire.
C’est d’ailleurs à ce moment du travail de création que les types de personnalité que nous vous avons présenté peuvent vous être utile dans la conception de votre personnage. Plus vous devenez intime avec lui et plus sa personnalité vous paraîtra évidente. Si vous nous avez suivi jusqu’à présent, vous saurez où puiser pour ajouter à votre personnage les traits de caractère qui le rendront plus crédible dans le contexte de votre histoire.
Connaissant son type de personnalité, vous pourrez en déduire le cours de ses actions logiquement sans qu’elles viennent heurter d’un contresens néfaste le thème, le message ou votre intrigue.
Des types de personnalité originaux
Bien évidemment, les types de personnalité n’ont pas pour objet de créer des clichés ou stéréotypes de vos personnages. Ils n’ont pas non plus comme dommages collatéraux de rendre prévisible vos personnages.
L’arc dramatique qui est une courbe décrivant l’évolution intérieure de votre personnage doit rester original. Pour garder une spontanéité à cet arc, vous travaillerez la dimensionnalité de votre personnage.
Un personnage est une métaphore de la nature humaine. Mais il est une création de l’imaginaire qui lui permet de dramatiser la nature humaine. Votre personnage est une tranche de vie dont vous allez mettre en scène un aspect pour lui donner du sens, lui apporter un éclairage particulier, faire passer un message…
Ce personnage vous sera utile pour renforcer le thème de votre histoire, pour aider à l’expliquer et vous utiliserez un mode de représentation théâtrale ou filmique pour vous exprimer. C’est cela dramatiser une situation ou un personnage.
La nature humaine est complexe. Par exemple, rien n’empêche à celle-ci d’être à la fois charitable et avare. Les termes sont antinomiques mais sous l’angle de la nature humaine, les deux traits de caractère qu’ils représentent peuvent cohabiter sans conflit.
Selon la situation décrite, un personnage peut être charitable ou se montrer particulièrement égoïste sans que cela ne provoque un quelconque malaise en son for intérieur. La nature humaine est ainsi faite. Chez un personnage, vous devez tenir compte de cette double capacité à afficher tout et son contraire.
Cette contradiction fait écho chez un lecteur, elle ajoute à la crédibilité du personnage tant que les actions de celui-ci sont réalistes. Le réalisme intervient au niveau des situations. Selon le contexte décrit, le personnage se montrera charitable ou cupide. Il ne peut être les deux à la fois dans une situation donnée car le lecteur n’adhérera pas.
Une incohérence qui ajoute à la crédibilité
La contradiction apparente du personnage selon les situations dans lesquelles il se trouve apporte cette touche d’incohérence dans ses comportements, un aspect si humain et si fascinant de la psyché de tout un chacun. Le lecteur identifie et s’identifie à ces contradictions et le personnage trouve grâce à ses yeux.
Considérez Annie Wilkes, par exemple, dans Misery. C’est une infirmière, elle est aimable et pacifique mais elle est aussi sadique, égoïste et meurtrière. Elle refuse de soigner en détournant les soins par des expressions telles que Nom de nom ! ou Dieu Tout Puissant! et elle n’hésite pas à tirer dans le dos du sheriff le tuant sur le coup ou à entraver Paul lorsqu’elle réalise qu’il a tenté de fuir.
Annie est un être complexe, multidimensionnel.
S’il y a un personnage qui doit avoir le plus de dimensions possibles, c’est bien votre protagoniste. De plus, celui-ci doit être désigné comme œuvrant du côté du bien. Un autre personnage que vous devriez approfondir est l’antagoniste du héros : celui qui œuvre donc du côté du mal.
Enfin, les notions de bien et de mal ne sont pas aussi tranchées qu’elles le paraissent.
Dans Secret (2007) écrit par Jay Chou et To Chi-long, l’antagoniste involontaire de Ye Xianglun (le protagoniste) est son propre père. Ce n’est donc pas en respectant une dichotomie pure et dure que l’on établit une relation entre le protagoniste et son antagoniste.
Retenez cependant que vous avez tout intérêt à travailler sur les biographies et les dimensions à donner à la fois au protagoniste et à l’antagoniste de votre histoire.
De nouveau, connaître les types de personnalité permet d’ajouter des dimensions à votre personnage. En vous servant du type comme base de votre personnage, rien ne vous empêche d’ajouter les traits de caractère qui permettront de créer des contradictions chez lui pour le rendre plus humain, plus crédible.
A travers ses actions, réactions et dialogues, le personnage exprimera ainsi sa personnalité entière et complexe.
Commencez avec l’individu que vous avez en tête
CEPENDANT, ne commencez pas à créer votre personnage à partir d’un type de personnalité car comme l’a dit F. Scott Fitzgerald, vous ne créerez rien.
Commencez avec l’individu que vous avez en tête. Son type de personnalité s’imposera alors de lui-même. Décrivez-le tel que vous le voyez dans votre histoire, tel que vous le voyez évoluer au cours de son voyage.
Et l’intrigue dans tout cela ? Votre personnage fait l’intrigue et l’intrigue fait votre personnage.
Que vous commenciez à écrire votre intrigue (du moins ses grandes lignes), il vous faudra ensuite travailler sur votre personnage pour qu’il prenne vie dans votre intrigue et en fin de compte, c’est lui qui fera avancer l’intrigue.
Vous commencez avec le personnage et votre intrigue découlera du travail de création sur le personnage. Dans le même temps que vous concevez le personnage, vous construisez l’intrigue puisque l’origine de l’intrigue prend sa source dans votre personnage principal.
L’intrigue doit être planifiée, articulée et créée autour de non seulement ce que le personnage veut mais aussi les obstacles que vous lui jetterez à la face. Lorsque ces obstacles viennent entraver les désirs du personnage (ce qui est préférable et cohérent), il y a conflit.
Ce conflit provoque un trouble émotionnel chez le personnage qui oriente alors son action ou sa réaction ou ses lignes de dialogue. Les actions du personnage (encore une fois cohérentes avec votre thème ou votre message) poussent l’intrigue vers l’avant.
En d’autres mots, votre personnage veut ou désire quelque chose. Il agit pour obtenir ce qu’il veut ou ce qu’il désire. Vous placez des obstacles pour l’empêcher d’obtenir ce qu’il veut ou ce qu’il désire. Il en résulte un conflit.
Le personnage surmonte (ou pas) ce conflit et pour conséquence, une prise de conscience se fait progressivement jour en lui. Le personnage apprend ainsi de ses épreuves (et de ses erreurs) et son arc dramatique le conduit à devenir différent (normalement un individu meilleur, si tant est que cela n’est pas vanité).
Pour continuer la lecture de cet article :
L’ARC DRAMATIQUE DE VOTRE PERSONNAGE – PART 10