Nous avons vu jusqu’à présent la ligne dramatique de l’Objective Story, celle du personnage principal, abordons maintenant la ligne dramatique de l’Influence Character.
Sommaire de tous les articles :
DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE
La ligne dramatique de l’Influence Character
Comme chacune des quatre autres lignes dramatiques, celle de l’Influence Character n’échappe pas à la règle. Elle est donc constituée d’un certain nombre de Composants thématiques que nous allons passer en revue.
Benchmark
Comme pour les autres lignes, Benchmark regroupe des indices, des signes (donc du contenu narratif) qui permet de mesurer l’évolution de l’Influence Character mais hors de son rapport au personnage principal (c’est une autre ligne dramatique).
Par exemple dans Rain Man, plus Raymond s’éloigne de l’institut et moins ses comportements répétitifs se produisent. Progressivement, il laissera Charlie le toucher. Il autorisera Charlie à prendre soin de lui et il partagera ses repas ainsi que la chambre d’hôtel avec Charlie.
Tous ces indices permettent de noter l’évolution progressive de Raymond au contact de son frère.
Evidemment, pour Dramatica, tout revient à déterminer : Elément de caractérisation, Variation de type, Type et Classe.
Benchmark : Type Preconcious – Classe Mind
Vous trouverez aussi un exemple de Preconscious dans cet article :
DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (32)
Concern
Concern décrit le principal objectif ou but de l’Influence Character. C’est ce par quoi il se sent concerné. C’est ce qui intéresse ce personnage dans sa vie. Ce sont ses objectifs. Et Concern illustre aussi ce qu’il y a chez l’Influence Character qui a le plus d’impact sur le personnage principal.
L’Influence Character est aussi un personnage de fiction qui n’est pas un stéréotype. Gardez en tête que vos personnages bien que fictifs recopient la vie. Il aura donc besoin d’atteindre un certain degré de développement ou peut-être davantage de contrôle sur les choses.
Et tout comme le personnage principal, ce que cherche à atteindre l’Influence Character peut être concret ou abstrait. Tout dépend de la nature de sa ligne dramatique et aussi des rebondissements que prévoit l’auteur pour ce personnage.
Concern a aussi un aspect pratique car il permet de distinguer entre deux personnages celui qui est le personnage principal et celui qui sera son Influence Character. Souvenez-vous que les expressions Personnage principal et Influence Character ne sont pas des fonctions dans l’histoire. Les archétypes sont ces fonctions. Par exemple, le protagoniste pourra être le personnage principal (mais ce n’est pas forcément le cas) et l’antagoniste par exemple (car ce pourrait être n’importe quel autre archétype) sera Influence Character.
Lorsqu’on les voit comme des fonctions de l’histoire, les personnages sont alors dénommés par Dramatica comme personnages objectifs. Ce qui rend parfois plus difficile l’identification.
L’auteur doit voir ce qui se passe réellement dans son histoire même s’il s’est arrangé pour que son lecteur ne croit que ce qu’il voit, c’est-à-dire que l’évaluation de l’histoire par le lecteur est ce qui semble ce qu’il s’y passe. Seul l’auteur, cependant, détient la vérité. Et c’est cette vérité que l’auteur doit considérer.
J’ai besoin d’expliquer ce qu’est le Storyform dans le vocabulaire de Dramatica. On part du postulat qu’une histoire possède une structure. Cette structure est le squelette de l’histoire. C’est l’arrangement particulier des événements qui s’y produisent qui forment ce squelette. C’est cet ordonnancement que Dramatica nomme Storyform.
Si nous ne considérons pas seulement le matériel narratif mais plutôt à quelle catégorie celui-ci appartient (un exemple que chacun connaît est l’incident déclencheur. On imprégnera cet incident déclencheur de matériel narratif et ce contenu narratif sera rangé sous la catégorie de l’incident déclencheur), on se retrouve avec des moments particuliers de l’histoire (incident déclencheur, point médian, les articulations entre les actes…) et des explorations du thème dont traite l’histoire. Tout ceci forme le Storyform.
Une fiction fonctionne selon cette structure (Storyform) et lorsqu’elle suit correctement ce Storyform en répondant à toutes ces exigences, il ne devrait subsiter dans l’histoire aucune incohérence, aucun manque, aucune zone d’ombre parce que l’histoire aura été correctement documentée dans le Storyform.
Et donc pour en revenir à cette vérité que détient l’auteur mais pas le lecteur (du moins pendant le déploiement de l’histoire), c’est ce point de vue particulier de l’auteur sur son histoire qui identifie clairement la structure du projet, c’est-à-dire le Storyform.
En connaissant précisément ce dont son histoire parle, il peut alors le cacher à son lecteur, l’obscurcir et semer ici et là des indices sur cette vérité.
Les événements qui se produisent forment l’intrigue. J’ai l’habitude d’écrire que l’acte Deux est l’espace de l’intrigue. En tant qu’événement, l’incident déclencheur qui est posé dans l’acte Un souvent par le plus grand des hasards fait aussi partie de l’intrigue qu’il initie en fait.
Les événements de l’intrigue (hormis la survenue de l’incident déclencheur) sont liés par un rapport de causalité. Cet assemblage est dénommé Storyweaving par Dramatica parce qu’en effet, ces événements tissent l’intrigue.
Et il est tout à fait possible que les événements ne respectent pas la linéarité de l’histoire. Dans le suspense, par exemple, pour maintenir ce suspense justement, le Storyweaving peut être ordonné différemment de la logique de l’histoire.
Tout ceci étant dit, la toute première question que doit se poser l’auteur est de savoir quelle est la nature du Contenant thématique Concern de son personnage principal.
Je vous renvoie à cet article concernant ce contenant :
DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (79)
Le Concern du personnage principal lui est forcément personnel. Le matériau narratif que vous placerez dans Concern doit aider à communiquer au lecteur le point de vue de ce personnage principal.
Ensuite, posez-vous la question de connaître qui parmi tous vos personnages a un point de vue alternatif et foncièrement différent sur le même type de problème.
C’est en identifiant ce personnage que vous mettrez le doigt sur votre Influence Character. Une autre approche est de choisir arbitrairement parmi vos personnages celui qui deviendra l’Influence Character et lui donner un point de vue sur le monde, sur les choses différent ou alternatif à celui du personnage principal.
Cette seconde approche peut fonctionner surtout si vous n’avez pas une idée claire de qui pourrait être l’Influence Character.
Critical Flaw et Unique Ability
Concernant l’Influence Character, Unique Ability décrit ce qui le rend capable de maintenir la pression sur le personnage principal afin qu’il change sa nature profonde.
Nous avons abordé dans cet article :
DRAMATICA : LA THEORIE EXPLIQUEE (24)
la notion d’élément décisif (Crucial Element selon le vocabulaire de Dramatica).
Nous savons aussi qu’il y a une ligne dramatique qui concerne l’évolution de la relation entre le personnage principal et l’Influence Character. Qu’est-ce qui permet à l’Influence Character d’être aussi important dans son rapport au personnage principal ?
C’est son aptitude personnelle et non partagée par d’autres personnages de se porter en faux vis-à-vis du personnage principal.
Ainsi, il occupe une position opposée en regard de l’élément décisif de l’histoire (Crucial Element). Unique Ability donne ainsi à l’Influence Character un pouvoir unique dans l’histoire par sa capacité à maintenir la pression sur le personnage principal pour qu’il change vraiment sa nature, qui il est (dont, bien souvent, il n’a pas conscience). Et ce sera en intervenant sur l’élément décisif (Crucial Element).
En somme, l’Influence Character est une sorte de catharsis pour le personnage principal.
Par contraste, Critical Flaw sera ce qui inhibe ou sape l’influence ou l’impact de l’Influence Character sur le personnage principal. Cette Critical Flaw amoindrit l’impact de Unique Ability. En fait, elle joue contre l’influence qu’il peut avoir en général, mais c’est surtout en minorant Unique Ability qu’elle se manifeste.
Tout comme pour le personnage principal, s’il n’y avait pas une Critical Flaw pour instaurer un équilibre, Unique Ability lui conférerait un pouvoir omnipotent. Ce n’est pas très efficace sur le plan dramatique.
Reconsidérons Rain Man. Raymond est l’Influence Character de Charlie (le personnage principal). Lorsque l’histoire débute, Charlie nourrit une vraie animosité envers son frère. Et ce ne sera que lorsque Raymond révélera à Charlie qu’il était le Rain Man qui chantait pour Charlie (son ami imaginaire, en fait) lorsqu’il était un petit garçon apeuré qui incitera Charlie à changer d’attitude envers son frère.
Pour Raymond, nous avons donc :
Unique Ability : Variation de type Closure du type Subconscious de la classe Mind.
Closure est un élément qui permet de mettre un terme à quelque chose ou bien de le mener à terme.
Concernant la Critical Flaw de Raymond, il est évident que celui-ci a une vue assez étroite de la vie. C’est sa Critical Flaw. Par exemple, lorsque Charlie, contrarié, le laisse seul dans la voiture, il en éprouve de l’anxiété.
Sans surveillance, Raymond se met à errer dans la petite ville. En plein milieu d’une route fréquentée, son habitude de fixer les choses le fait s’arrêter brusquement en plein milieu de la route. Et le pire est évité de justesse.
Critical Flaw : Variation de type : Preconception du type Future de la classe Universe.
D’autres Contenants thématiques de l’Influence Character seront abordés dans le prochain article.