Continuons d’explorer les conseils de William C. Martell sur le bon usage des dialogues.
Les précédents articles :
DIALOGUES : CONSEILS DE WILLIAM C. MARTELL (1)
DIALOGUES : CONSEILS DE WILLIAM C. MARTELL (2)
Le passé des personnages
Lors de notre précédent article,
DIALOGUES : CONSEILS DE WILLIAM C. MARTELL (2)
nous avons vu que les dialogues traduisaient une attitude, un comportement.
Le passé d’un personnage influe aussi grandement sur ce qu’il a à dire et comment il le dit. Beaucoup de personnes voient le monde à travers leur propre cadre de références (qui ont été forgées dans notre passé) et cela se fait sentir dans notre discours.
Souvent les origines d’un personnage (classe sociale, communauté particulière…) et ses propres expériences de vie affectent non seulement le choix de ses mots et son vocabulaire mais aussi sa façon de voir le monde.
The Lighthouse de Robert et Max Eggers par exemple ou encore Midsommar de Ari Aster en sont de très bons exemples.
Si votre personnage est issu du monde rural, ses réponses et ses réactions aux situations seront teintées par cette origine et ses dialogues seront passées au crible par la construction même de votre personnage.
La forme (ou élaboration esthétique) que vous donnerez à ses dialogues est inhérente à ce qu’est votre personnage.
Vous risquez dans ce cas que vos lecteurs ne saisissent pas immédiatement (ou du moins hors contexte) le sens des propos du personnage (ses intentions).
Pour remédier ou pour éviter un décrochage, tentez de toujours mettre les dialogues un peu technique, un peu spécifique (appartenant à un domaine non familier du lecteur) dans un contexte où les mots prononcés (ainsi que leur intonation) prennent du sens.
Tenir compte du passé du personnage, de leurs expériences et de leur point de vue sur le monde permet de créer des différences fondamentales entre les personnages et de permettre au lecteur de bien les distinguer pour éviter toute confusion néfaste à la compréhension de l’histoire, et partant, de la frustration.
La structure des phrases
Il existe des personnes dont chaque phrase est une question révélant une fragilité ou un manque de confiance en soi. Il existe d’autres personnes qui ne prennent même pas le temps de respirer entre deux phrases.
Pourquoi font-ils cela ? C’est une question que vous devriez vous poser lorsque vous construisez vos personnages. S’ils font cela dépend en grande partie d’un problème ou d’autre chose rencontré dans leur passé.
La structure des phrases que vous leur ferez dire traduit souvent une blessure et c’est une jolie invention narrative que de réussir à transmettre l’idée d’une blessure par le biais d’une façon de parler (différent de l’intonation).
Prenez l’exemple d’une jeune fille dont le père s’est livré à des gestes incestueux sur elle. Alors que le secret n’est pas encore révélé, vous pourriez livrer cependant un indice important en affublant la jeune fille d’une logorrhée anormale.
Il faut simplement tenir compte que chaque personnage agencera ses mots de manière très particulière et que les variations sont infinies. Différentes personnes ont une cadence particulière dans leurs discours. William C. Martell va même jusqu’à écrire que ces rythmes verbaux sont comme des empreintes digitales. Elles appartiennent en propre au locuteur (ou à l’interlocuteur).
Chaque personnage devrait avoir sa propre voix. Deux personnes peuvent discuter de la même chose mais avec des termes différents voire contradictoires.
Laissez vos personnages s’exprimer comme ils l’entendent (si vous avez établi une biographie même succincte pour chacun d’eux, cela devrait pouvoir vous aider).
Des mots privilégiés
Chaque personnage a ses expressions favorites et celles-ci tendent à l’identifier. Lorsqu’une telle expression sied bien à un personnage, il est intéressant de la parsemer dans ses dialogues tout au long du scénario. Cela aide à en faire un personnage unique et attachant.
Attention cependant à ne pas en abuser car vous obtiendriez l’effet inverse. Gardez aussi à l’esprit que ce qui est répété dans un scémnario (dialogues, situations…) prend soudain une importance (ce n’est pas comme dans la vie réelle) qui fait aussitôt sens dans l’esprit du lecteur.
Il est donc nécessaire que les expressions favorites d’un personnage lui soient vraiment personnelles. Si vous vous apercevez que cette expression pourrait être dite par un autre personnage sans que cela ne dénature le précédent propriétaire, pariez sur le fait que cette expression est inutile.
Lors des réécritures, vérifiez que deux personnages n’emploient pas la même expression et encore une fois n’en faites pas un usage exagéré et soyez créatif.
Wiliam Thacker dans Coup de foudre à Notting Hill emploie l’expression « Saperlipopette » lorsqu’il essaie de franchir la grille. C’est une formule qui le caractérise mais qui fait aussi partie de son jeu de séduction envers Anna (intention d’auteur et non du personnage).
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