Que votre protagoniste soit immédiatement sympathique ou bien que vous ayez décidé de le présenter à vos lecteurs/spectateurs sous des atours pour le moins antipathiques, son passé sera crucial à la fois pour lui donner vie (et de la consistance plus qu’une essence, d’ailleurs) et forger son arc dramatique.
Le protagoniste Ebenezer Scrooge
Personnage principal de Un chant de Noël de Dickens, Scrooge réunit sous sa chair de fiction une quantité de qualités négatives et pas seulement l’avarice.
il est sans cœur, pingre, égoïste et indifférent à ceux qui l’entourent.
Dur et tranchant comme une pierre à fusil comme l’écrit Dickens, Scrooge symbolise l’opulence d’une certaine classe victorienne qui ignore délibérément les pauvres qui vivent pourtant parmi elle.
Cette seconde classe est symbolisée par l’infirme Bob Cratchit.
Le thème est celui de la rédemption d’un homme au cœur de pierre. Son arc dramatique, à la fin de l’histoire, nous le montre transformé en quelqu’un qui se préoccupe des autres et qui apprécie dorénavant l’esprit de Noël qu’il avait toujours considéré comme… foutaises.
Cet esprit de Noël étant peut-être l’allégorie qu’emploie Dickens pour faire passer son message de compassion envers certaines conditions de vie de son époque et en particulier celles des enfants.
Les incarnations des Noëls passés
Ce qui rend cette histoire crédible et évite surtout une bouillie mélodramatique, ce sont les incarnations des Noëls passés de Scrooge.
Mais comme toute fiction bien structurée, Scrooge refusera d’abord l’appel à l’aventure. C’est pourquoi il refuse l’invitation à dîner de son neveu.
Et cette invitation est aussi l’événement déclencheur qui va faire remonter à la surface quelques souvenirs de Scrooge.
Ainsi, avant l’apparition des fantômes, les souvenirs non seulement se mettent en place et y restent.
Et Scrooge préfère les ignorer.
Le premier des trois esprits
Celui-ci nous permet d’aller à la rencontre des joies et des peines de Scrooge. La solitude d’un Noël dans un pensionnat mais aussi la joie d’un Noël en famille, la salle de danse comme la rupture de ses fiançailles.
Sa rédemption devient plus plausible lorsque nous comprenons dans le même temps que Scrooge ce qu’il a perdu.
Nous apprenons aussi que la sœur de Scrooge est morte alors qu’elle donnait naissance à son neveu, celui-là même qui lui apportait l’invitation.
C’est une perte importante car Fran était la seule véritable alliée de Scrooge.
Toutes ces informations sont destinées à nous faire comprendre les raisons de l’amertume de Scrooge et à éprouver une empathie envers lui alors qu’il est exécrable comme homme.
Car nous apprenons aussi que l’humanité de Scrooge n’est pas perdue. On l’a vu s’amuser lors de l’épisode de la salle de danse. On sait qu’il a été sincèrement amoureux de Belle mais son obsession pour l’argent et les affaires ont eu raison de cet amour.
Peut-être bien que Dickens cherche à nous faire comprendre que la persona de Scrooge est certes illustrée par le mal mais au fond de ce personnage, il y a encore du bien.
Scrooge doit seulement oser aller à la rencontre de sa véritable nature.
Toutes ces scènes et séquences qui montrent le passé de Scrooge sont nécessaires pour expliquer son état d’avare renfermé sur lui-même.
Mais aussi pour démontrer qu’il y a un espoir pour lui. Il y a une possibilité pour sa rédemption. Et ce n’est pas une question de renaissance.
Cette transfiguration du personnage consiste à lui faire adopter un style de vie qu’il a toujours eu au fond de lui.
Il suffit en fin de compte d’une prise de conscience pour qu’il ait le courage de le faire remonter à la surface.
C’est donc en revisitant son passé qu’il a pu être incité vers un futur bien différent et meilleur pour lui.
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