Michael Hauge pense que le principe fondateur d’une intrigue est le Story Goal, c’est-à-dire un objectif poursuivi par le protagoniste qui affecte ou implique la plupart des personnages de l’histoire. Hauge donne une astuce pour définir le Story Goal. Il faut que l’objectif puisse être visualisé. Il faut que vous soyez capable de visualiser ce que sera la vie de votre héroïne ou de votre héros au dénouement et cette image prouvera s’ils ont ou non réussi leur objectif. Par exemple, il n’aurait pas été suffisant de montrer Luke Skywalker pulvériser l’Etoile de la Mort. La cérémonie des récompenses était nécessaire pour le lecteur/spectateur (car en fin de compte, c’est à lui qu’on s’adresse) afin de lui montrer que l’exploit de Luke a changé sa vie pour le meilleur.
Dans Casablanca, montrer que Richard Blaine a finalement décidé d’aider Ilsa ou même lorsqu’il tire sur le Major Strasser n’aurait pas satisfait ce même lecteur/spectateur. Celui-ci a besoin de le voir s’éloigner de Casablanca et de lier une amitié sincère avec Renault.
La fin de l’histoire
Le Story Goal n’a pas obligation de se conclure sur un happy ending. Le protagoniste pourrait très bien ne pas réussir à réaliser son objectif. Par exemple, dans Harold et Maud, la mère de Harold échoue à faire prendre ses responsabilités d’homme adulte à Harold et ceci est montré dans la scène finale où l’on voit Harold joué du banjo que lui a offert Maud alors qu’il vient encore une fois de simuler son suicide.
Un scénario doit donc nécessairement montrer plutôt que de dire. Que ce soit un happy end ou non, une scène finale doit illustrer ce qu’il est supposé advenir au héros et à l’héroïne après la fin de votre histoire.
Michael Hauge dénombre 5 types de Story Goal :
- S’évader
- Empêcher quelque chose de se produire
- Livrer quelque chose de valeur là où l’on en a besoin
- Récupérer quelque chose de valeur et le rendre aux personnes où à l’endroit auxquels cette chose appartient (cela comprend aussi le sauvetage)
- Gagner quelque chose (une compétition, l’amour, le respect..)
Michael Hauge ajoute que le Story Goal qui consiste à Gagner quelque chose est le plus souvent emprunté.
Dramatica
Melanie Ann Phillips, co-créatrice de Dramatica, soutient que le Story Goal le plus commun est Obtaining, c’est-à-dire d’Obtenir quelque chose ce qui revient à Gagner quelque chose.
- S’évader revient à gagner sa liberté, à l’obtenir
(New York 1997 de John Carpenter et Nick Castle ou Casablanca de Colin Higgins) - Livrer consiste à remettre quelque chose tout comme Frodon Sacquet qui doit rapporter l’anneau unique à la Montagne du Destin à des fins de destruction. Il s’agit d’une valeur inverse à celle d’obtenir quelque chose.
- Récupérer & Remettre revient à obtenir et à sa valeur inverse : rendre, remettre. C’est le Story Goal de la plupart des Indiana Jones.
- Gagner consiste à obtenir une victoire, l’amour, l’honneur, un prix, le succès, un statut ou quoi que ce soit d’autre.
- Quant à Empêcher quelque chose de se produire (noté par Michael Hauge), Dramatica emploie soit Future (s’il s’agit d’un événement futur potentiel) soit Progress (s’il s’agit d’un processus qui doit être arrêté ou modifié).
Dramatica va plus loin que Michael Hauge en développant 16 types de Story Goals classés selon 4 catégories :
Activity (ou PHYSICS)
- Obtaining
Il s’agit d’obtenir quelque chose - Doing
Ce verbe d’action doit être compris dans le sens d’une concrétisation, de faire quelque chose. - Understanding
Comprendre quelque chose. - Gathering Information (ou Learning)
La collecte d’informations ou l’apprentissage.
Situations (ou UNIVERSE)
- Present
- Past
- Future
C’est-à-dire le temps présent, passé et futur. - Progress
Cette progression doit être comprise dans le sens d’une activité en mouvement, de quelque chose qui progresse dans le temps d’où l’idée de stopper ce mouvement ou cette force en marche.
Fixed Attitudes (ou MIND)
- Memory
Ce sont les souvenirs, la mémoire. - Impulsive Responses
Ce sont des réponses impulsives, immédiates, sur lesquelles nous n’avons souvent aucun pouvoir. Dramatica les désigne aussi sous le vocable Preconscious - Innermost Desires
Ce sont les besoins si l’on considère que l’objectif (ou Story Goal qui est en fait un désir dont on ne mesure peut-être pas les conséquences). Dramatica rejoint Sigmund Freud dans son hypothèse d’un inconscient et nomme aussi Innermost Desires comme Subconscious - Contemplation
Dramatica le nomme aussi Conscious comme une conscience qui focalise son attention, sa pensée sur quelque chose de précis à l’extérieur ou à l’intérieur d’elle-même.
Manipulations (ou PSYCHOLOGY)
- Becoming
Devenir autre, changer sa nature (Changing one’s nature). C’est l’aboutissement de l’arc dramatique, c’est-à-dire de l’évolution psychologique du personnage après qu’il est appris de ces épreuves et autres tribulations. - Being
Être ou son contraire qui consiste à jouer un rôle social plutôt que d’assumer sa véritable identité ou nature (Playing a role). - Developing a Plan ou Conceptualizing
qui consiste sommairement à développer un plan, une stratégie, une tactique, un stratagème. - Conceiving an Idea
ou Concevoir une idée comme un idéal de justice. Concevoir ne conduit pas naturellement à la réalisation. Un effort sera nécessaire.
La perspective de Dramatica pourrait vous permettre d’entrevoir de nouvelles possibilités pour votre scénario.
Par contre, les 5 types de Story Goal préconisé par Michael Hauge peuvent très bien suffire si par exemple l’objectif de votre protagoniste est de confondre un meurtrier ou de sauver un enfant kidnappé.
Par ailleurs, l’objectif pourrait être de découvrir qui a commis le crime et comment (Activity : Gathering Information), comprendre pourquoi ce crime a eu lieu (Activity : Understanding) ou mettre à bas un syndicat du crime (Activity : Doing).
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